« Faire beaucoup avec peu en partant de presque rien. » En citant le général de Gaulle pour introduire son discours de politique générale, Michel Barnier a donné le ton de son bail à Matignon, quelle que soit sa durée. Le volontarisme, la modestie et le réalisme sont censés guider l’action du gouvernement, pour le meilleur et pour le pire. Alors que le meilleur reste à ce stade très hypothétique, le Premier ministre doit s’attaquer de toute urgence au pire. La France a fini par être rattrapée par son incohérence budgétaire. Le navire prend l’eau de toutes parts et c’est Michel Barnier qui se charge de renflouer.
Pour un gouvernement, il est d’usage d’imputer systématiquement les problèmes à la gestion de ses prédécesseurs. Pour Michel Barnier, ce n’est pas simple, force est de constater qu’il n’a pas hésité à le faire remarquer à Gabriel Attal lorsque ce dernier l’a interpellé à la fin de son discours. De dénégations en omissions, de calculs électoraux à courte vue en manque de discernement avéré, Emmanuel Macron, Bruno Le Maire et l’éphémère ancien Premier ministre ont laissé la catastrophe grandir dans l’ombre. C’est ce trio qui a plongé le pays dans une chute budgétaire sans précédent.
En 2024, le déficit public devrait dépasser 6 % du PIB. À l’automne 2023, lors du vote de la loi de finances 2024, le ministre de l’Économie avait promis de le ramener à 4,4 %. En quelques mois seulement, le manque d’anticipation d’une baisse des recettes fiscales s’est transformé en accident du travail.
Les pleurs des orphelins
Ce simple constat devrait appeler la majorité sortante à beaucoup d’humilité. Mais au lieu d’offrir leurs bons offices pour tenter de redresser la situation, ses dirigeants campent sur des « lignes rouges » déconnectées de la réalité, ne répondant qu’aux postures politiques afin de préparer le prochain rendez-vous électoral. « Pour l’instant, le budget tel qu’annoncé me semble inacceptable », a décidé l’ancien ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin à l’annonce d’un plan de 60 milliards d’euros d’efforts sur les comptes publics dont un tiers de hausses d’impôts, jurant qu’il ne voterait pas pour elles. Gabriel Attal réclame « le choix de l’épargne plutôt que le choix des impôts ». Mais c’est oublier que si les dépenses avaient diminué ces dernières années, nous ne serions pas obligés aujourd’hui de chercher de nouvelles recettes.
Alors qu’à gauche on crie à l’austérité, à droite on critique le retour des confiscations fiscales. Tout le monde prétend soudain détenir la solution infaillible à un sujet que tout le monde a superbement ignoré jusqu’à présent.
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