une épidémie « sans précédent depuis au moins 25 ans » liée à la période post-Covid ?
Depuis le début de l’année, 35 personnes sont mortes de la coqueluche, dont 22 enfants. Les médecins craignent une baisse de la vaccination, notamment chez les plus vulnérables.
Une épidémie particulièrement importante cette année. Depuis le début de l’année 2024, au moins 35 personnes sont décédées après avoir contracté la coqueluche, dont 22 enfants, rapporte Santé publique France (SPF) dans un communiqué publié ce mercredi 18 septembre.
« Nous vivons une épidémie de coqueluche tout à fait exceptionnelle », a déclaré jeudi à BFMTV Christèle Gras Le Guen, présidente de la Société française de pédiatrie.
Alors que 134 639 cas vus en consultation générale ont été enregistrés depuis le début de l’année, le pédiatre constate « un nombre de contaminations qui est considérable et surtout un nombre de formes graves qui est également préoccupant ».
Une épidémie « cyclique »
En juillet, le nombre de décès a atteint un pic avec 9 décès enregistrés, dont 4 enfants.
Pour Christèle Gras Le Guen, il n’y a « pas vraiment d’explication » à cette hausse en plein été. « Cette épidémie évolue depuis le début de l’année 2024 et on sait que la coqueluche revient de manière cyclique, sans qu’on ait d’explications précises puisque l’on a un taux de couverture (vaccinale) de la population plutôt satisfaisant », juge-t-elle.
La pédiatre estime que la rentrée scolaire de septembre pourrait contribuer à une augmentation du nombre de cas. « On sait que les milieux de groupe font circuler les germes », rappelle-t-elle.
Une reprise post-Covid ?
Plus largement, comment expliquer l’ampleur de l’épidémie cette année 2024 ? Selon un article scientifique de l’Institut Pasteur publié mercredi, qui parle d’une épidémie « sans précédent depuis au moins 25 ans », si les contaminations observent bien un rythme cyclique, ce rythme a été perturbé ces dernières années.
« Depuis la ‘période Covid’, la régularité des cycles est perturbée. Alors qu’on aurait pu s’attendre à un pic épidémique en 2022 ou 2023, il a été retardé », indiquent les scientifiques.
En effet, les épidémiologistes estiment que « les confinements et les gestes barrières liés à la « période Covid » ont limité l’exposition à plusieurs virus et bactéries pathogènes, dont ceux à l’origine de la coqueluche », ce qui a probablement contribué à réduire le nombre de cas durant cette période.
« L’immunité diminuant progressivement au fil du temps, toutes ces mesures, combinées à la faible amplitude des derniers pics observés, pourraient avoir progressivement réduit l’immunité globale de la population contre la maladie », ce qui expliquerait la recrudescence actuelle du nombre de patients atteints de coqueluche.
Des antibiotiques plus résistants ?
Par ailleurs, les scientifiques ont observé une augmentation du nombre de deux protéines identifiées comme « facteurs de virulence ciblés par la vaccination ». « Leur prédominance actuelle, contrairement à ce qui était observé avant la « période Covid », pourrait aussi expliquer la très forte circulation actuelle de la coqueluche », précisent-ils.
Enfin, autre élément de réponse, « les scientifiques ont également identifié, pour la première fois en France depuis 2011, un isolat bactérien résistant aux macrolides, les antibiotiques de première intention utilisés contre la coqueluche ». Là aussi, ce phénomène pourrait expliquer la hausse des cas.
Possible baisse de la vaccination
Plusieurs médecins soulignent également que la prévention est trop faible chez certains patients. En juillet dernier, François Vié Le Sage, pédiatre à Aix-les-Bains, en Savoie, et responsable du groupe de vaccinologie au sein de l’Association française de pédiatrie ambulatoire, notait au Monde qu' »aucune des mères des nourrissons décédés n’avait été vaccinée pendant sa grossesse », et que l’enfant de 4 ans décédé à ce moment-là n’avait pas non plus été vacciné, comme le recommandent les médecins.
Christophe Marchenay, président de SOS Médecin à Cherbourg, a également avancé mardi auprès de France Bleu l’hypothèse d’une baisse des vaccinations liée à l’épidémie de Covid.
« Les gens deviennent de plus en plus méfiants vis-à-vis de la vaccination et nous commençons à en payer le prix », s’inquiète-t-il.
Donner la priorité à la prévention
La présidente de la Société française de pédiatrie, Christèle Gras Le Guen, rappelle dans ce contexte qu’il « est plus que jamais important de protéger les petits ». Pour cela, elle appelle les futures mamans à se faire vacciner. « (La vaccination) doit avoir lieu pendant la grossesse, ce qui veut dire que la mère va produire des anticorps qui vont protéger le bébé dès la naissance », explique-t-elle.
« Quand la maladie est déclarée, malheureusement, il n’existe aucun traitement », rappelle-t-elle, alors que la maladie peut prendre une forme grave voire mortelle chez les nourrissons. La vaccination contre la coqueluche est obligatoire pour les nourrissons depuis 2018 avec une injection à 2 mois, puis une à 4 mois et plusieurs rappels ensuite, selon l’Assurance maladie.