A raison de deux injections par an, ce médicament du géant pharmaceutique Gilead semble très efficace pour prévenir la transmission du virus. Mais son prix est actuellement fixé à plus de 40 000 dollars par an et par personne.
Il s’agit d’un traitement qui pourrait bien changer la donne contre le VIH, un virus qui touche près de 40 millions de personnes dans le monde et qui en aura infecté 1,3 million de plus d’ici 2023. Le lénacapavir, commercialisé sous le nom « Sunlenca » Le vaccin du géant pharmaceutique Gilead serait efficace à 100% pour prévenir les infections, selon une étude récente. Le problème reste son coût prohibitif : plus de 40 000 dollars par patient et par an durant la première année. Or, selon les experts de l’université de Liverpool (Royaume-Uni), sa version générique pourrait permettre de diviser ce prix par 1000.
Cette nouvelle classe d’antirétroviraux présente l’avantage de ne nécessiter que deux injections par an, ce qui la rend beaucoup plus accessible que les comprimés quotidiens. Le lénacapavir agit en bloquant l’activité d’une enzyme du VIH appelée « capside »En pratique, il est déjà autorisé et remboursé depuis août 2022 en France, pour la « traitement des adultes atteints d’une infection par le VIH-1 multirésistante »selon la Haute Autorité de Santé. En d’autres termes, il s’agit d’une option de dernier recours pour les patients chez qui les traitements antirétroviraux classiques ne permettent pas d’obtenir une suppression virologique.
100% d’efficacité
Mais le lénacapavir ne se contente pas de soigner les patients, il semble aussi très efficace comme traitement prophylactique, en prévenant l’infection. C’est ce qu’a démontré un essai clinique récent mené par Gilead sur 5 300 femmes en Afrique du Sud et en Ouganda. Ces deux pays sont parmi les plus touchés par le sida au monde, avec des taux de prévalence atteignant respectivement 13 % et 5 %.
Les résultats de l’étude, qui seront publiés fin juin 2024, indiquent qu’aucune femme « vacciné » avec le lénacapavir n’a pas contracté le virus, ce qui représente une efficacité de 100 %. Fait important, ce médicament s’est avéré plus efficace que Truvada, le comprimé quotidien communément appelé « Préparation »Une différence qui s’explique par l’observance du traitement, qui est logiquement bien meilleure avec une injection biannuelle qu’avec un traitement quotidien.
Un générique à 40 $
A environ 40 000 dollars par an – son coût actuel dans des pays comme les Etats-Unis, la France, la Norvège ou l’Australie – le lénacapavir est hors de portée des patients des pays à faible revenu, qui représentent pourtant 95 % des infections. Pourtant, selon une estimation dévoilée mardi par des chercheurs britanniques lors de la 25e Conférence internationale sur le sida, son coût pourrait tomber à environ 40 dollars. Pour estimer le coût d’une version générique, les chercheurs se sont notamment entretenus avec les principaux fabricants de génériques en Chine et en Inde, qui produisent déjà « briques » traitement, a déclaré Andrew Hill de l’Université de Liverpool.
Il y a une dizaine d’années, son équipe estimait que le traitement contre l’hépatite C de Gilead – alors évalué à 84 000 dollars par patient – pourrait chuter à 100 dollars si les génériques étaient approuvés. « Le traitement de l’hépatite C coûte désormais moins de 40 dollars »a déclaré le scientifique. Ce traitement, qui représente en quelque sorte le premier vaccin contre le VIH, pourrait « arrêter la transmission du VIH » s’il était administré à des personnes à haut risque, comme les homosexuels ou les bisexuels, les travailleurs du sexe, les prisonniers ou les jeunes femmes, notamment en Afrique, a déclaré Andrew Hill à l’AFP.
Pour sa part, Gilead a déclaré qu’il était « trop tôt » de fixer le prix du lénacapavir à des fins préventives, alors que l’on attend les résultats d’autres essais cliniques. Le laboratoire pharmaceutique, qui subit la pression de nombreuses personnalités et ONG, a de son côté promis « une stratégie pour permettre un accès large et durable à l’échelle mondiale »Dans une lettre ouverte adressée en mai au responsable du laboratoire, plus de 300 signataires (chercheurs, politiques et célébrités) avaient réclamé l’obtention d’une licence de production générique bon marché via le Medicines Patent Pool. Cet organisme lié aux Nations unies permet de développer des versions génériques d’un médicament.
Alors qu’environ 30 millions de personnes vivant avec le virus du sida dans le monde reçoivent un traitement antirétroviral, environ 10 millions n’en bénéficient pas.