Les citadines vont-elles subir une cure d’amaigrissement forcée ? C’est ce que souhaite le sénateur de Paris, Ian Brossat, qui compte déposer, dans les prochains jours, un projet de loi visant à donner le pouvoir aux maires des grandes villes d’interdire les voitures au-delà d’un certain poids. Un sujet tristement d’actualité après la mort en octobre d’un cycliste tué par un conducteur de SUV à Paris.
Pour résumer, fini les SUV dans les grandes villes. « Depuis une décennie, nos voitures ont gagné 1 cm tous les deux ans et 10 kg par an. En 1996, leur largeur moyenne était de 1,68 m, alors qu’en 2016, elle est passée à 1,78 m, et leur poids a augmenté de 40 % en vingt ans » explique le sénateur communiste dans son projet de loi.
Une massification des gros véhicules
Une évolution qui risque de se poursuivre au vu des derniers modèles présentés par les constructeurs. En effet, les SUV dominent désormais le marché (41 % des ventes en France en 2023) et représentent plus d’un véhicule neuf sur deux acheté dans certains territoires (57 % à Paris).
Or pour Ian Brossat, « la massification rapide des gros véhicules ainsi que cette envolée des poids et des dimensions des véhicules vont à l’encontre des objectifs de réduction des émissions carbone, de limitation des particules dues au carburant et au freinage, de sécurité routière et d’accessibilité des mobilités pour les classes populaires. ».
Selon l’Agence internationale de l’énergie, un SUV électrique produit une empreinte carbone 70 % plus élevée qu’une voiture électrique standard et consomme jusqu’à cinq fois plus de métaux critiques lors de sa fabrication qu’une voiture électrique. Dans le même temps, les SUV thermiques, quant à eux, consomment en moyenne 20 % de carburant de plus qu’un véhicule classique. « Cela contredit nos objectifs climatiques, d’autant que les SUV sont devenus la deuxième source d’augmentation des émissions de CO2, après l’avion », explique-t-il.
Les SUV et les vélos ne font pas bon ménage
Une augmentation de poids et d’encombrement des véhicules qui est d’autant plus absurde selon le sénateur que « les deux départements qui achètent le plus de SUV sont les Hauts-de-Seine et Paris. Il ne me semble cependant pas que nos routes nécessitent un tel équipement. C’est absurde », explique-t-il à 20 minutes.
Cela est d’autant plus absurde que l’augmentation des ventes de gros véhicules s’accompagne d’une augmentation de l’usage du vélo en ville. Un cocktail qui peut s’avérer dramatique en cas d’accident puisque du fait de leur poids, « les accidents impliquant les SUV sont souvent plus graves » ce qui ne contribue pas à rapprocher les différents modes de transport.
Les voitures grandissent, pas les rues
« C’est aussi un problème d’occupation et de partage de l’espace urbain. Ces véhicules, plus gros que les voitures conventionnelles, accentuent les difficultés de stationnement et augmentent la congestion dans des zones déjà restreintes, compliquant ainsi le partage de la voie publique entre tous les usagers », ajoute Ian Brossat.
Dans son argumentaire, l’ancien élu parisien précise également que la hausse des ventes de SUV, souvent très chers et le plus souvent achetés par des personnes plus aisées, fait augmenter de facto les prix sur le marché de l’occasion, pénalisant les classes les plus populaires.
Un vœu soumis au Conseil de Paris
« L’objectif ici n’est pas d’interdire totalement l’usage des SUV en ville, mais de donner les moyens aux élus locaux de prendre cette décision par zone si nécessaire et s’ils disposent d’alternatives comme des transports en commun suffisants », rappelle Ian Brossat qui déjà pense pouvoir compter sur des villes comme Lyon ou Bordeaux pour appliquer de telles dispositions si elles existaient.
S’il ne contrôle pas l’agenda parlementaire, le sénateur annonce d’ores et déjà qu’un vœu en soutien à cette proposition sera déposé lors du prochain Conseil de Paris le 19 novembre.