un secteur pléthorique, des produits chers et parfois toxiques
Un dossier enquêtant sur les produits capillaires. Dans les supermarchés, l’offre est abondante, vous pouvez trouver des cosmétiques en tout genre pour les cheveux. Décryptage avec Sylvie Metzelard, rédactrice en chef du magazine 60 millions de consommateurs.
franceinfo : Le soin capillaire est-il un marché en croissance ?
Sylvie Metzélard : Et comment ! C’est l’un des segments de produits cosmétiques qui se porte le mieux, avec des ventes de soins qui devraient augmenter de près de 4 % dans les années à venir. Les produits se multiplient dans les rayons : soins, gommages, sérums, masques de jour, de nuit… Les soins capillaires ont désormais pris le pas sur les soins du visage.
Mais l’idée est que nous devrions prendre soin de nos cheveux comme nous prenons soin de notre peau ?
Justement, on parle même de « skinification » des cheveux. « Skin » signifie peau en anglais, et l’idée est de prendre soin de ses cheveux comme de sa peau.
Mais est-ce efficace ?
Au niveau marketing, oui c’est efficace, puisque les consommateurs multiplient leurs achats de produits, et ne se contentent plus d’un simple shampoing. L’efficacité est autre chose, elle dépend des produits et de ce que l’on attend d’eux.
On voit de plus en plus de produits s’appuyer sur un coiffeur, Dessange, Franck Provost pour ne citer qu’eux, est-ce un gage de qualité ?
C’est pareil ici, on est plus dans le marketing que dans le produit lui-même. On achète un nom, un savoir-faire. Mais pour juger avec précision de la qualité, il faudrait tester tous ces produits, ce que nous n’avons pas encore fait.
Parlons prix, ces produits sont-ils chers ?
Oui, ce sont des produits très chers. On nous vend de nouvelles routines beauté, avec des soins dédiés, qui partent des racines jusqu’aux pointes des cheveux, comme on le fait dans un salon de coiffure, et cela s’additionne vite, y compris pour des marques connues mais pas forcément haut de gamme. . .
Vous pouvez acheter, par exemple, pour les cheveux longs et légèrement ternes, un shampoing à 6,45 euros, plus 4,50 euros pour le soin démêlant, auxquels il faut ajouter 9,29 euros pour le masque, et encore 9, 35 euros pour le « Soin lamellaire ». boisson capillaire »… Nous en sommes à 29,59 euros.
Dans une autre marque, nous avons encore une routine en quatre étapes pour 37 euros, je ne parle pas des gammes des grands noms de la coiffure, où l’on peut doubler, voire tripler le montant !
Mais qu’est-ce qui justifie des prix aussi élevés ?
Un nom, une quantité incroyable d’ingrédients ; nous proposons bien sûr des technologies que nous ne sommes pas en mesure de vérifier. Nous parlons de « premiumisation » des produits. Nous proposons des soins très ciblés, mettant en avant leur haute technicité pour justifier les tarifs.
Vous avez interviewé un dermatologue à l’hôpital St Louis de Paris, que dit-il de tous ces produits ?
Qu’on nous raconte de belles histoires, mais que rien ne rentre vraiment dans la fibre capillaire. On ne peut pas vraiment réparer les cheveux lorsqu’ils sont abîmés par une coloration ou un lissage. Seuls les produits antifongiques et antipelliculaires trouvent grâce aux yeux de notre dermatologue.
Y a-t-il des substances nocives pour la santé dans tous ces produits ?
Pas nécessairement dans tous les produits, mais souvent. Et comme vous vous en doutez, lorsque vous vous retrouvez avec des compositions contenant une vingtaine d’ingrédients, vous risquez de retrouver pas mal de substances problématiques. Sulfates irritants, certains parabènes soupçonnés d’être des perturbateurs endocriniens, substances allergisantes du tabac, etc.
Dans votre article vous mettez en garde contre les effets du lissage brésilien, ça peut être dangereux pour les reins non ?
Oui, il faut être prudent avec les produits qui contiennent de l’acide glyoxylique, utilisé pour ses pouvoirs lissants, et qui a un effet délétère sur les reins. Une alerte a été lancée par les autorités sanitaires en octobre dernier, mais on en retrouve encore dans pas mal de kits de lissage, en vente sur Internet et parfois même dans les salons.
En résumé, le meilleur traitement est d’en faire le moins possible?
L’idéal est de pouvoir se contenter d’un shampoing doux, donc avec des tensioactifs doux dedans, ce qui fait que votre shampoing ne moussera pas beaucoup !