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Un rapport dénonce des services de renseignement de plus en plus « intrusifs » en France

Micros, espionnage informatique, téléphones piégés : les espions français multiplient les « intrusions », alerte la police nationale du renseignement, qui recommande d’adapter le contrôle des services à leur révolution technologique.

Quelque 24 000 personnes ont été surveillées en France en 2023, soit 15 % de plus qu’en 2022 et 9 % de plus qu’en 2019, avant l’épidémie de Covid, souligne la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR). ) dans son rapport annuel publié jeudi.

Pour la première fois, « la prévention de la délinquance et du crime organisé devient le motif premier de la surveillance ». La lutte contre le terrorisme connaît une légère hausse (7,5%).

Mais au-delà des chiffres, « plus significatif (…) est le recours toujours croissant aux techniques les plus intrusives », note le rapport.

Face aux menaces de toutes parts et aux investissements de leurs concurrents étrangers, les services de renseignement intérieur et extérieur (DGSI et DGSE) sont de mieux en mieux équipés.

« Installer des micros dans les lieux privés, collecter toutes les données informatiques de la personne, piéger téléphones et ordinateurs : on tente ainsi de compenser l’apport désormais faible des écoutes téléphoniques », énumère la CNCTR.

Affaiblissement du contrôle

Mais contrairement aux écoutes téléphoniques, centralisées sous l’autorité du Premier ministre, ces « techniques particulièrement intrusives sont directement mises en œuvre par les services demandeurs », puis conservées et utilisées par eux, écrit Serge Lasvignes, président de la CNCTR.

Organisme indépendant chargé de contrôler l’utilisation des outils techniques par les services français, la CNCTR réclame depuis des années à la fois un renforcement du cadre législatif des espions et un contrôle accru de leurs activités.

« Cette forme d’escalade semble difficile à résister (…). Il convient donc de l’encadrer strictement », prévient le haut responsable. A défaut, « le risque est celui d’un affaiblissement progressif du contrôle ».

 » Boîte noire « 

La tension est totale autour des « dossiers de souveraineté », la mémoire de la DGSE et de la DGSI, dans laquelle sont stockés les renseignements humains, ceux issus des outils techniques mais aussi les échanges très sensibles avec les services étrangers.

« On n’a pas avancé du tout », explique à l’AFP Serge Lasvignes. « C’est devenu une question de principe. » La mémoire des agences est donc presque une boîte noire. « Ce sont des domaines auxquels on n’a pas accès », regrette le haut fonctionnaire.

Seule la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) est habilitée, mais seulement si elle est saisie par un réclamant. « Il est rare que des personnes surveillées par les services fassent une réclamation », ironise-t-il.

Le défi de l’IA

En conséquence, lorsque les services deviennent plus efficaces, le contrôle s’arrête. « Il n’y a pas d’enjeu de pouvoir » pour la CNCTR, assure son président, mais il est essentiel d’assurer un « contrôle cohérent et coordonné ». Le rapport met également en avant le développement de l’intelligence artificielle (IA) qui touche autant le domaine militaire que la vie sociale.

L’IA constitue « un défi pour le régulateur, qui se demande déjà si la surveillance d’une personne en viendra à être décidée selon des critères dont aucun humain ne connaîtra ni le contenu ni la pondération avec certitude… », souligne le rapport.

Et ce d’autant plus qu’aucune autorité ne recense de manière exhaustive tous les usages de l’IA. Or celle-ci est aussi présente dans le contrôle social, via des caméras dites « intelligentes » ou « augmentées », dotées d’outils de détection d’anomalies, de comportements suspects et de situations à risques.

Le rapport évoque également « les procédés de reconnaissance biométrique, notamment la reconnaissance faciale » qui « trouvent déjà des utilisations importantes en termes de sécurité et de préservation de l’ordre public dans un certain nombre de pays (Chine et États-Unis notamment) ».

Un débat déjà vif en France. Une loi adoptée en 2023 a autorisé la mise en place, à titre expérimental, de la vidéosurveillance algorithmique (VSA) pendant les Jeux olympiques de Paris 2024.

En mai, Amnesty International France alertait sur les dangers de ces caméras « intelligentes », appelant à interdire la reconnaissance faciale dans le pays. Si cette technologie était autorisée en France, « cela sonnerait le glas de notre anonymat dans l’espace public », critiquait son président, Jean-Claude Samouiller.

Le mois précédent, Amnesty avait déjà regretté que la reconnaissance faciale n’ait pas été purement et simplement interdite au sein de l’ensemble de l’Union européenne.

Cammile Bussière

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