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un policier filmé en train de frapper un homme dans une cellule qui donne à réfléchir

un policier filmé en train de frapper un homme dans une cellule qui donne à réfléchir

La victime a porté plainte en août 2022, juste après les faits. Dix-huit mois plus tard, son avocat déplore une enquête restée au point mort malgré des preuves accablantes.

La scène, d’une grande violence, dure trente-deux secondes. Trente-deux secondes durant lesquelles un homme, placé en cellule de dégrisement au commissariat d’Auch, a été frappé par un policier, comme en témoignent les images de vidéosurveillance révélées par La Dépêche du Midi et Le Figaro a pu consulter. Malgré sa plainte et l’ouverture d’une enquête préliminaire, la victime reste sans nouvelles de l’avancée des investigations, un an et demi plus tard.

Les faits remontent à la nuit du 27 au 28 août 2022. Ce soir-là, Jérôme, militaire à la retraite depuis 2010, se trouvait avec sa compagne dans cette commune située au cœur du département du Gers. Une dispute éclate entre eux, amplifiée par les effets de l’alcool. « Il est psychologiquement et physiquement très fragile en raison du stress post-traumatique lié à ses opérations militaires au Kosovo et en Afghanistan »souligne son avocate, Me Sandra Vazquez, contactée par Le Figaro. Plusieurs voisins, perturbés par les vociférations nocturnes du couple, ont alerté la police. Jérôme, la cinquantaine, est arrêté pour « bruit nocturne » et placé dans une cellule de dégrisement.

Une pluie de coups

A 3h04, la caméra installée dans le couloir menant aux salles de garde à vue filme deux policiers escortant une femme jusqu’à une cellule. Les fonctionnaires l’enferment sans incident, puis l’un d’eux se dirige, pour une raison encore inconnue, vers la chambre dans laquelle est détenu Jérôme. Sur les images de la caméra fixée à l’intérieur de sa cellule, ce dernier apparaît allongé sur une couchette, aux côtés d’un autre détenu. Tous deux sont calmes et semblent dormir.

Le policier ouvre la porte de la cellule et le quinquagénaire, vêtu d’un simple t-shirt et d’une paire de chaussettes – son short a été enlevé à cause du cordon pour serrer la taille – se lève et se dirige rapidement vers la sortie. . Il entre en collision avec le policier qui se tient sur le pas de la porte et qui lui donne des coups de poing et de pied sur tout le corps. Jérôme tente brièvement de se débattre puis se recroqueville au sol pour se protéger. Le fonctionnaire continue de le frapper et le traîne au sol, sous le regard médusé du codétenu.

Jérôme s’est vu attribuer dix jours d’ITT.
Le Figaro

« Il s’est déchaîné sur mon client qui était encore assommé par les effets de l’alcool et complètement vulnérable. Tout cela sous les yeux d’un autre policier qui n’a visiblement pas tenté de l’arrêter. », déplore Me Sandra Vazquez. Au terme de ces trente-deux secondes d’une extrême brutalité, le policier ferme la porte de la cellule et s’en va. Jérôme, visiblement abasourdi par l’attaque, met quelques secondes avant de parvenir à se relever. Il chancelle et s’allonge péniblement sur sa couchette.

Un deuxième policier observe, immobile, la scène de violences qui se déroule dans la cellule de dégrisement.
Le Figaro

L’« immobilité » de la justice

Le médecin qu’il consulte à la sortie du commissariat lui délivre une incapacité totale de travail (ITT) de dix jours. Selon la loi, les violences entraînant une ITT de plus de huit jours sont punies d’une peine pouvant aller jusqu’à trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende. Dans les jours qui suivent, Jérôme porte plainte et le parquet d’Agen ouvre une enquête préliminaire contre « violences intentionnelles de la part d’une personne dépositaire de l’autorité publique ».

Mais dix-huit mois plus tard, les enquêtes sont au point mort, dénonce Me Vazquez. « Nous avons les images des caméras de surveillance, deux témoins oculaires, les constatations des médecins… Tous les ingrédients sont réunis pour que l’enquête avance, et pourtant c’est l’immobilité totale »regrette l’avocat pénaliste qui attend des réponses du parquet. « J’espère que la justice fera son travail, j’attends une orientation de l’enquête : soit un renvoi devant un tribunal correctionnel, soit un non-lieu, je ne suis pas juge, mais il faut des réponses. Ce silence est trop lourd.

Sur le plan disciplinaire, une procédure est en cours concernant le policier mis en cause qui ne fait plus partie des effectifs du commissariat d’Auch, précise La Dépêche du Midi.

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