« un métier dans lequel on est en contact direct avec l’humanité »
Chaque jour, une personnalité s’invite dans l’univers d’Élodie Suigo. Mercredi 11 septembre 2024 : l’acteur et réalisateur, Daniel Auteuil. Il est à l’affiche de son nouveau film, « Le Fil ».
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Avec 14 nominations aux César, dont deux César pour son rôle d’Ugolin Soubeyran dans Jean de Florette Et Manon des Sources puis un pour Gabor La fille sur le pontDaniel Auteuil est l’un des acteurs les plus aimés et reconnus du cinéma français. Fort d’un héritage transmis par ses parents, chanteurs d’opéra et d’opérette, il s’est lancé dans la scène, les planches, la musique, tout l’attire et l’intéresse. Aujourd’hui, il est devant et derrière la caméra, dans son nouveau film Le filqui sort le mercredi 11 septembre.
Il incarne Maître Jean Monier, un avocat pénaliste chargé de défendre un père accusé du meurtre de sa femme. Cette nouvelle production est inspirée d’une histoire vraie.
franceinfo: Six ans après la comédie Amoureux de ma femmealors tu passes de l’amour à la haine.
Daniel Auteuil : Oui, je passe de l’amour à la haine, mais toujours mêlée d’amour, car ces métiers d’avocat sont des métiers remplis d’humanité. Lors de la préparation de mon film, j’ai eu la chance d’être invité à un procès à huis clos. J’ai ressenti toute la profondeur, la difficulté et l’humanité de ce métier d’avocat souvent décrié.
« Etre avocat est un métier absolument difficile. Cela m’a fait penser au métier de policier, au métier d’infirmière. Des métiers où l’on est en contact direct avec l’humanité. La moindre erreur est fatale. »
Daniel Auteuilà franceinfo
On me le dit souvent, mais avocat et acteur, c’est la même chose. Non, ce n’est pas la même chose. Et ce qui diverge, c’est la conclusion. Si je rate mon rôle, je frise le ridicule, mais je n’en meurs pas. Alors que si je suis avocat et que je rate mon rôle, le type ou la femme peut prendre 20 ans de prison et le destin des gens peut basculer. Et ce qui m’a étonné, c’est que la réalité a tellement plus d’imagination que de fiction. Ça m’a bouleversé.
Dans le film, vous défendez votre innocence avec une intime conviction. Qu’est-ce que l’intime conviction ?
La conviction intime est au fond de la conscience, c’est le degré de perception que l’on a sur la véracité des paroles de l’autre et sur le fait d’être sûr de son innocence. Quand c’est parole contre parole, il n’y a pas de preuve. Pas de preuve, pas de mobile, pas de témoin. Et c’est là que je comprends à quel point le public est fasciné par ces histoires de procès, de films policiers. En assistant moi-même à ce procès pendant trois jours, j’hésitais tous les jours. Mais oui, il est innocent ! Mais non, il est coupable ! Il y a aussi une chose qui m’a touchée, c’est que souvent ceux qui n’ont pas accès à la parole sont facilement coupables parce qu’ils ne peuvent pas se défendre. D’où le travail des avocats.
https://www.youtube.com/watch?v=CAUTN9MevmM
Vous avez trois casquettes sur ce film. Acteur, vous avez également écrit le scénario et réalisé. À un moment, vous avez douté de votre retour à la réalisation.
Oui. J’étais repartie dans des aventures d’actrice extraordinaires, avec des gens passionnants. Je pensais que c’était fini jusqu’à ce que Nelly, ma fille et productrice, m’apporte cette histoire. Mais entre le moment où je l’ai lue pour la première fois et le moment où nous avons tourné, il s’est écoulé trois ans. Il a fallu que je m’empare de cette histoire, que je la fasse mienne. Il a fallu que je trouve un parallèle entre ma vie, mon métier d’actrice et cet avocat qui recommence à plaider au tribunal, au moment même où je recommence à réaliser.
« Il faut plus que de l’énergie, c’est une force de vie magnifique pour faire un film. Il fallait que je retrouve cette force. Je l’ai retrouvée et je suis très heureuse d’avoir fait The Wire. »
Daniel Auteuilà franceinfo
Qu’est-ce que vous gagnez à jouer ?
C’est ma vie. Je suis né pour jouer et je mourrai un jour, je ferai semblant de mourir. Jouer m’apporte, malgré les rôles les plus durs, les plus compliqués et les plus obscurs, une légèreté et un plaisir. Et plus c’est douloureux, plus c’est dramatique et plus c’est jouissif, car ce n’est pas pour de vrai, c’est pour du faux. Nous n’avons pas à souffrir, c’est à vous de souffrir, d’être émus et de pleurer. Il faut juste être convaincant.
Grb2