La course au sensationnalisme et au « scoop » conduit souvent à dire des bêtises, confinant à l’indécence, comme cela s’est produit le 16 août, après un accident d’avion au Lavendou, en marge d’une manifestation de la Patrouille de France (PAF), à l’occasion du quatre-vingtième anniversaire du débarquement en Provence.
Une vidéo sur les réseaux sociaux montrant un avion, présenté comme appartenant à la PAF, s’écraser en mer a suscité une vive émotion, notamment après la mort en cours de service du capitaine Sébastien Mabire et du lieutenant Matthis Laurens, lors d’une collision en vol entre deux Rafale.
Mais il est vite apparu que l’appareil en question n’était pas un Alphajet… mais un Fouga Magister, décrit par un titre de la presse nationale comme étant un « petit avion civil biplace des années 1950 », alors que cet appareil a servi à former plusieurs générations de pilotes de chasse de l’Armée de l’Air et de l’Espace (AAE) et de la Marine Nationale (avec la version « Zéphyr »).
Par ailleurs, l’AAE a réagi très rapidement. « La communauté des aviateurs de l’Armée de l’air et de l’espace est très attristée par cette nouvelle, qui ne concerne pas un avion de la Patrouille de France, mais un Fouga Magister appartenant à une association », a-t-elle précisé. Et d’annoncer par la suite que la démonstration de la PAF au large du Lavandou avait été annulée après cet accident. « Les pilotes et l’ensemble de la communauté de l’Armée de l’air et de l’espace témoignent de leur solidarité dans ces moments difficiles », a-t-elle assuré.
Le Fouga Magister n’étant pas doté de siège éjectable, le sort de son pilote ne pouvait que susciter la plus grande inquiétude. Malheureusement, il n’y eut pas de miracle.
Bonjour @Le_FigaroLa communauté des aviateurs de l’Armée de l’Air et de l’Espace est très attristée par cette nouvelle, qui ne concerne pas un avion de la Patrouille de France. @PAFofficielmais un magistère Fouga appartenant à une association.
— Armée de l’Air et de l’Espace (@Armee_de_lair) 16 août 2024
« Ce vendredi 16 août 2024 vers 17 heures, lors d’un meeting aérien au large du Lavandou, un avion civil Fouga Magister s’est abîmé en mer. Dans le cadre de cet événement, un dispositif spécial de sécurité maritime (DPSM) avait été mis en place sous l’autorité du préfet maritime de la Méditerranée. (…) Le corps du pilote a été retrouvé. Le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Toulon a ouvert une enquête pour rechercher les causes de l’accident », a annoncé la préfecture du Var.
Sur les réseaux sociaux (et même dans certains journaux), il a été suggéré que le Fouga Magister en question appartenait à la patrouille Tranchant… ou qu’il s’agissait du « Zéphyr » de l’association Zéphyr 28. Là encore, il s’agissait d’une hypothèse hâtive. Selon les informations de Var Matin, le pilote aux commandes serait Didier Berger, un ancien officier de l’armée de l’air.
J’ai appris avec une profonde tristesse que l’accident du Fouga Magister au large du Lavandou a coûté la vie à son pilote, Didier Berger.
Alors que nous commémorons le courage des héros du Débarquement de Provence, un homme a tragiquement perdu la vie en honorant la mémoire… pic.twitter.com/cqizGUBoHB
– Renaud Muselier (@RenaudMuselier) 16 août 2024
Didier « Helmut » Berger, 65 ans, était un ancien pilote de Jaguar (7e Escadre de chasse) et de Mirage 2000N (Escadron 3/4 Limousin). Après avoir quitté l’Armée de l’air, il a acquis un Fouga Magister qu’il présentait lors de meetings depuis 25 ans.
« Didier était un « moustachu » sans moustache. Un homme de cœur. Un pilote avant tout. Une passion dévorante. Pour son Fouga stationné sur l’aérodrome de Valence-Chabeuil. Peint aux couleurs du Fouga Magister de l’Ecole de l’Air sur lequel des générations d’élèves officiers ont passé leur « PA19 » : le dernier test avant le premier décollage en jet. Son sourire et sa passion nous manqueront. Les lignes argentées de son Fouga Magister dans le ciel de Provence aussi », témoigne le général Bruno Clermont qui l’a côtoyé durant sa carrière opérationnelle.
Et d’ajouter : « Tu as maintenant rejoint ton père et ton frère dans les étoiles et tous nos camarades disparus aux commandes de leur avion. Bienvenue au bar de l’escadron. »
Ironie du sort, le père de Didier Berger a été tué aux commandes d’un Zephyr à Ajaccio, le 7 septembre 2003, dans des circonstances quasiment identiques.