Le réseau de fibre optique, indispensable au bon fonctionnement du trafic Internet, s’étend sur des centaines de milliers de kilomètres à travers la France. Ce réseau, désormais considéré comme d’intérêt général, est au cœur de l’infrastructure numérique du pays, au même titre que les réseaux électriques ou ferroviaires. Il est pourtant de plus en plus ciblé par des actes de sabotage qui, bien que rapidement résolus, suscitent des inquiétudes croissantes quant à sa sécurité et sa résilience.
Dans la nuit du 29 juillet, plusieurs liaisons de fibre optique ont été sabotées simultanément dans six départements, provoquant une interruption temporaire du trafic Internet. Si le service a été rétabli en quelques heures, cet incident n’est pas un cas isolé. Il fait suite à une attaque similaire survenue en avril 2022. Pour les professionnels du secteur, ces actes sont non seulement perturbateurs, mais ils révèlent une vulnérabilité inquiétante dans un réseau aussi crucial.
Selon Philippe Le Grand, président d’InfraNum, la fédération des infrastructures de télécommunications, de telles attaques sont malheureusement vouées à se reproduire. La fibre optique, en raison de son rôle central dans le transport des données numériques, est devenue une cible de choix, tout comme le réseau ferroviaire. Saboter ces câbles revient à compromettre temporairement l’accès à Internet et à paralyser de nombreux services qui en dépendent.
La fragilité des infrastructures
La fibre optique a été déployée en France dans les années 1990, au moment où émergeait le concept d’autoroutes de l’information. Aujourd’hui, ce réseau dense transporte des données à une vitesse proche de celle de la lumière, reliant des points d’échange stratégiques et des centres de données. Cependant, malgré les avancées technologiques, la protection de ces infrastructures reste un enjeu majeur.
Les câbles à fibre optique, bien que souvent enterrés ou placés le long des grands axes routiers ou ferroviaires, sont particulièrement vulnérables au niveau des « chambres de tirage ». Ces boîtiers enterrés permettent d’accéder aux câbles pour la maintenance, mais ils deviennent également des points faibles en cas de sabotage. De récents incidents ont montré que les saboteurs ciblaient ces chambres, souvent situées dans des zones isolées, rendant la détection d’intrusion difficile.
Vers une meilleure protection du réseau
Face à ces menaces, les professionnels du secteur soulignent la nécessité de renforcer la protection des réseaux. Certaines propositions prévoient notamment de masquer les cartes du réseau pour compliquer la tâche des saboteurs. Cette solution pourrait toutefois être limitée par d’éventuelles complicités internes aux opérateurs. Depuis l’attaque de 2022, la question de l’implication de sous-traitants mécontents a été soulevée, même si l’enquête n’a pas encore confirmé cette hypothèse.
Pour améliorer la résilience du réseau, certains experts préconisent un maillage encore plus fin du réseau de fibre optique, permettant une redirection rapide du trafic en cas de panne. Ce maillage, déjà en place sur les principales lignes longue distance, a prouvé son efficacité lors des incidents du mois de juillet, des itinéraires alternatifs prenant rapidement le relais.
Un investissement nécessaire pour l’avenir
La sécurisation du réseau de fibre optique nécessite des investissements importants. Selon InfraNum, le coût de ces mesures de protection pourrait varier entre 7 et 17 milliards d’euros, selon le niveau de résilience choisi. Les collectivités locales, encouragées par l’Agence nationale de cohésion des territoires et la Banque des territoires, sont invitées à intégrer ces considérations dans leurs plans locaux de résilience.
En conclusion, si un arrêt total du trafic Internet sur les grandes lignes est désormais quasiment impossible grâce à un maillage robuste, une fragilité demeure au niveau des réseaux locaux. Les événements naturels, autant que les actes de sabotage, représentent une menace pour ces infrastructures critiques. L’avenir du réseau de fibre optique en France dépendra de la capacité du secteur à renforcer la sécurité et la résilience de ces infrastructures vitales.
Source : Le Monde
Cet article a été repris sur le site Univers FreeBox
