C’est une première dans l’histoire de la RDC. Une femme, Judith Tuluka Suminwa, a été nommée chef du gouvernement, lundi 1er avril. Premières réactions et commentaires.
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» Je sais que la tâche est grande, les défis sont immenses, mais ensemble (…) nous y arriverons », a déclaré juste après sa nomination la nouvelle Première ministre qui prend ses fonctions dans un contexte sécuritaire compliqué, notamment avec la guerre dans l’Est du pays, où elle représente un grand espoir pour les femmes, comme l’explique Marie-Noël. Anatone, responsable de la société civile de la province de l’Ituri, au micro de Pauline Zidi de la rédaction Afrique.
« Pour nous, c’est un « ouf » de soulagement en tant que femmes. Elle qui est mère, elle qui est femme au foyer, elle connaît les difficultés que traversent les femmes de l’Est. La femme et la fille de l’Orient sont violées, la femme de l’Orient est toujours marginalisée. Nous croyons vraiment qu’en tant que mère, en tant que femme, elle aura un œil tourné vers l’Est. Les messages qu’on peut lui adresser, c’est avant tout la féliciter et lui demander de travailler, de prouver son leadership. Compte tenu des services qu’elle a rendus dans le pays, dans les différents ministères, dans les différentes structures, c’est pour cela que nous la félicitons. Nous lui demandons de travailler dur, de collaborer au développement du pays, d’œuvrer pour la sécurité de notre pays, notamment dans la partie orientale où nous subissons de nombreuses attaques.. »
Libérez-vous de la pression du parti
Cette nomination est un message fort que le président a voulu adresser à son peuple, selon Giscard Kusema, directeur adjoint de la communication à la présidence, au micro de Pauline Zidi. Mais pour Félix Tshisekedi, c’était aussi une manière de se libérer des pressions partisanes. » Le Président de la République souhaitait avant tout alléger le fardeau politique des dirigeants des partis. En regardant de près le profil de Mme Judith Suminwa, on se rend compte qu’elle est, certes, une des premières militantes de l’UDPS, son parti, mais qu’elle n’est pas leader d’un parti ou leader d’une formation politique ; elle n’était pas non plus candidate aux dernières élections. Et donc, sans calculs politiques, elle est a priori prédisposée à se concentrer sur son travail de chef du gouvernement.
Nous pensons aussi, et c’est le deuxième message, que le président Tshisekedi a voulu entrer dans l’histoire en nommant pour la toute première fois une femme à la tête du pays. Cette nomination couronne les combats des femmes congolaises et brise tous les préjugés négatifs sur la capacité des femmes à accéder à des postes politiques élevés. Elle portera les luttes des jeunes et des femmes congolaises, principales victimes des atrocités que connaît le pays depuis plus de trente ans. »
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L’Église catholique critique la gourmandise des politiques
Pour l’Église catholique congolaise en revanche, qui n’a cessé de critiquer le poids financier des institutions politiques et la pléthore de membres du gouvernement, cette nomination est un non-événement. Le cardinal Fridolin Ambongo, archevêque de Kinshasa, qui dénonce déjà une nomination tardive trois mois après les élections, espère que la mise en place du gouvernement ne tardera pas. Il s’est exprimé au micro de RFI de notre correspondant à Kinshasa, Pascal Mulegwa.
« Normalement, la composition du gouvernement ne devrait pas prendre beaucoup de temps et je le dis en prenant l’exemple du Sénégal : en un temps record, ils constitueront leur gouvernement. Mais pourquoi cela dure-t-il pour nous ? C’est parce qu’il y a des négociations : tout le monde veut s’asseoir autour du gâteau et obtenir la plus grosse part possible. Comme au Congo le seul métier qui vaille c’est la politique, tout le monde veut être au gouvernement, au Parlement, sinon ils n’ont rien. Cette situation nous inquiète vraiment. Le gouvernement sortant est éléphantin, il n’avait rien à voir avec une composition pour être efficace. Je crains que le nouveau gouvernement ne soit aussi éléphantin que le gouvernement sortant. Le problème du Congo : 70% du budget sert uniquement au maintien de la classe politique, les 30% restants sont destinés aux 80 millions de Congolais. L’État n’a plus les moyens de sa politique pour rendre des services à la population. »