Trump, Macron et les « hommes forts »
Était-ce pour lui parler à l’oreille entre l’ouverture des portes et le Te Deum ? Lors des préparatifs de sa visite à Paris, Donald Trump a d’abord tenu à être assis à côté d’Emmanuel Macron lors de la réouverture de Notre-Dame, samedi 7 décembre au soir. Même si le protocole est resté discret jusqu’à la dernière minute sur l’aménagement des lieux, le président élu américain et le chef de l’Etat devaient se retrouver dans ce décor improbable, cinq ans après l’incendie qui a ravagé la cathédrale, en 2019. Un dîner est alors prévue à l’Elysée, en compagnie d’une cinquantaine d’invités étrangers présents, dont l’épouse du président américain Joe Biden.
Avant même la cérémonie, les deux dirigeants doivent évoquer à l’Elysée les principaux sujets brûlants du moment : l’Iran, le Moyen-Orient, les risques de conflits commerciaux transatlantiques et, bien sûr, la guerre en Ukraine. L’Elysée espérait même organiser une rencontre à trois inédite avec Volodymyr Zelensky. Le président ukrainien, dont l’arrivée a été confirmée vendredi, tient également à sonder les intentions du républicain, pour mieux plaider la cause de son pays, après plus de mille jours de combat contre l’envahisseur russe.
Chronométré, le ballet diplomatique rappelle une constante des années Macron : la propension du chef de l’Etat à parler aux « hommes forts », comme Donald Trump, et d’autres dirigeants plus ou moins autocratiques, à la tête des pouvoirs décomplexés qui alimentent la chronique. « Depuis son arrivée au pouvoir, Macron cultive les contacts personnels et croit en sa capacité à renverser les situations grâce à son pouvoir de persuasion.observe l’ancien diplomate Michel Duclos. Il ne compte pas s’arrêter aux divergences idéologiques et accepte les limites de la diplomatie transactionnelle. »
Autocrates de tous bords
A peine élu, en mai 2017, l’ex-banquier d’affaires a tenté d’établir une relation forte avec Donald Trump, en marge d’un sommet de l’Otan à Bruxelles, rappelé pour la longue poignée de main virile échangée entre les deux hommes. Quelques jours plus tard, M. Macron instaure le dialogue avec Vladimir Poutine, invité au château de Versailles, avant de se lancer dans une politique infructueuse de rapprochement avec Moscou, définitivement interrompue par l’invasion de l’Ukraine en février 2022.
Cette double approche marque le point de départ d’une longue série d’échanges avec des autocrates de tous bords : le Chinois Xi Jinping, reçu à Paris mais aussi dans les Hautes-Pyrénées, en mai, le Turc Recep Tayyip Erdogan, l’Indien Narendra Modi, l’Egyptien Abdel Fattah Al-Sissi, le prince héritier saoudien Mohammed Ben Salman – revu cette semaine à Riyad, ou encore le libertaire argentin Javier Milei, rencontré à Buenos Aires juste avant le G20 en Rio, mi-novembre. « Dans ces temps-là, il est toujours utile d’essayer de dialoguer avec ces dirigeants, qui sont souvent devenus incontournables, même si cela échoue. Tout le monde le fait discrètement, mais M. Macron l’affiche allègrementobserve Arancha Gonzalez, ancienne ministre espagnole des Affaires étrangères (2020-2021) et doyenne de l’École des affaires internationales de Sciences Po. Il ne faut cependant pas se faire d’illusions. »
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