Trois questions sur le stockage de CO2 dans des puits de pétrole, que la France va expérimenter pour lutter contre le réchauffement climatique
Afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre, le gouvernement souhaite capter le CO2 émis par les usines les plus polluantes, le transporter puis le stocker dans le sol, à plusieurs centaines de mètres de profondeur.
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Stocker le CO2 dans les champs pétroliers en France. C’est l’idée soutenue par le ministre de l’Industrie et de l’Énergie, Roland Lescure, qui a lancé vendredi 26 avril un plan d’expérimentation « quatre à cinq projets de stockage de CO2 » en France à partir de 2025. Cette annonce vise à aider les plus grandes industries françaises, très polluantes, à atteindre leurs objectifs de décarbonation, alors que le pays veut diviser par deux les émissions de CO2 de son industrie d’ici 2030. Franceinfo fait le point sur cette annonce.
1En quoi consiste cette méthode de capture ?
La France, qui dispose de réserves d’hydrocarbures (pétrole et gaz) anciennes ou encore actives, compte utiliser ces gisements – situés principalement en Nouvelle-Aquitaine et en région parisienne – pour décarboner son industrie. Ces puits servira à stocker le CO2 émis par les industries. Roland Lescure a lancé une « appel à manifestation d’intérêt »particulièrement destiné aux acteurs du secteur des hydrocarbures.
Concrètement, le gouvernement veut capter le CO2 émis par les usines les plus polluantes (ffabricants d’engrais, cimentiers, chimistes, etc.), le transporter ensuite stockez-le dans le sol, à plusieurs centaines de mètres de profondeur. Ce Technologie de captage et de stockage du CO2 – il existe d’autres techniques, notamment le captage du CO2 dans l’air – vise à piéger les gaz à effet de serre produits par la combustion des ressources fossiles avant qu’ils ne s’échappent dans l’atmosphère. Et ainsi lutter contre le réchauffement climatique causé par les activités humaines.
« Le procédé consiste à capter le CO2 qui s’échappe sous forme de fumée à la sortie de l’usine, à le comprimer de l’état gazeux à l’état quasi-liquide et à le transporter dans des canalisations afin de le stocker au-delà de 800 mètres de profondeur. »résume pour franceinfo Pascale Bénézeth, directrice de recherche CNRS au laboratoire Géosciences de l’Environnement à Toulouse.
En 2022, il y avait près de 200 projets de captage et de stockage du carbone dans le monde, dont 30 étaient en opération, selon un rapport du Global CCS Institute.un cercle de réflexion qui promeut ces technologies. On les retrouve notamment en mer du Nord ou aux Etats-Unis.
2Pourquoi le gouvernement mise-t-il sur cette technologie ?
L’exécutif affirme se tourner vers le stockage pour atteindre ses objectifs de décarbonation : d’ici 2030, la France veut réduire de moitié les émissions de CO2 de son industrie. Elle a notamment ciblé les 50 sites industriels les plus polluants de France, comme celui d’Arcelor Mittal à Dunkerque (Nord), et compte utiliser cette technologie pour certains pour réduire leur empreinte carbone. Ces industries ont estimé leurs besoins de captage à environ 8 millions de tonnes de CO2 en 2030 puis à 16 millions en 2040.
« Si nous voulons réduire de moitié les émissions industrielles en dix ans, nous devons recourir au captage du carbone car il existe des procédés industriels pour lesquels il n’y a pas d’alternative sans émettre de carbone. Il faut donc capter et stocker », a affirmé Roland Lescure. Dans sa stratégie « Carbon Capture, Storage and Utilization » (CCUS), publiée en 2023, le gouvernement espérait capter 4 à 8 millions de tonnes de CO2 grâce à cette technologie d’ici 2030, et 15 à 20 millions à terme. 2050. A titre de comparaison, les émissions de gaz à effet de serre en France étaient de 385 millions de tonnes équivalent CO2 en 2023, selon le ministère de la Transition écologique. Pour le Haut Conseil pour le Climat (HCC), la stratégie CCUS du gouvernement semble « ambitieux » pour 2030 mais « cohérent » pour 2050.
Alors que la France stocke déjà du CO2 dans des projets offshore en Norvège et au Danemark, le projet gouvernemental vise également à « diviser le coût cumulé du transport et du stockage par deux ou trois » en relation avec ces projets nordiques, auxquels La France restera associée, selon Bercy. Les tests réalisés par le gouvernement consisteront dans un premier temps à vérifier que les champs pétroliers ou les cavités sont bien étanches pour stocker le CO2 pendant des millions d’années. Mais si cette technique de stockage peut présenter des risques de fuites, ils sont « maîtrisé, avec suivi de l’injection au stockage »se souvient Pascale Bénézeth.
3Est-ce une solution viable pour lutter contre le réchauffement climatique ?
Le captage et le stockage du carbone font partie des solutions envisagées pour contenir la hausse des températures mondiales. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) intègre cette technologie dans son scénarios pour atteindre la neutralité carbone, mais rappelle que cela doit se faire en complément d’une solution essentielle : la réduction drastique de nos émissions de gaz à effet de serre.
Dans sa dernière feuille de route pour la neutralité carbone en 2050, publiée en septembre 2023, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) elle croyait que ces technologies étaient « cher » Et « n’avait pas encore été prouvé à grande échelle ». Certains acteurs, notamment des ONG, préviennent également que le captage ne doit pas être un prétexte pour continuer à polluer.
« Cette technologie est une option, une possibilité, mais elle doit inévitablement être associée à une réduction des émissions de CO2 à l’échelle mondiale. Cela ne veut pas dire que, puisque nous pouvons capter et stocker le CO2, nous devons continuer à le transmettre. »
Pascale Bénézeth, directrice de recherche au CNRSsur franceinfo
Dans un avis publié en 2020, l’Ademe évoquait le « potentiel limité » de ces techniques pour « réduire les émissions industrielles » En France. Surtout, elle a souligné qu’elles n’étaient applicables qu’à quelques sites industriels situés autour de Dunkerque (Nord), Le Havre (Seine-Maritime) et Lacq (Pyrénées-Atlantiques), en raison des infrastructures nécessaires à ce processus.
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