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trois questions à Mathieu Kassovitz, réalisateur du film et co-réalisateur du spectacle

En 1995, « La Haine », film choc sur les violences policières, sort et remporte un prix au Festival de Cannes. Trente ans après son film culte, Mathieu Kassovitz l’adapte en comédie musicale. C’est un spectacle très attendu de rentrée. Rencontre à la veille de la première avec le réalisateur devenu réalisateur.

France Télévisions – Culture Edito

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Mathieu Kassovitz et sa troupe lors des répétitions de "Haine - Jusqu'à présent, rien n'a changé". (YAMAN OKUR)

Le spectacle Haine – Pour l’instant, rien n’a changé – en représentation à partir du jeudi 10 octobre à la Seine Musicale, près de Paris, avant une tournée dans toute la France en 2025 – est actuellement en répétition.
A quelques jours de la première, Mathieu Kassovitz est un co-réalisateur impliqué sur tous les fronts : du studio d’enregistrement, où s’affine le disque qui accompagnera le spectacle, jusqu’aux salles de danse, où se conçoivent les chorégraphies. Le compte à rebours a commencé. Entre deux séances de travail, le réalisateur a répondu à nos questions.

France Info : En 1995, si on vous avait dit que les thèmes de Détester serait intemporel au point d’adapter le film en comédie musicale trente ans plus tard, l’auriez-vous cru ?

Mathieu Kassovitz : Je me serais dit : « Tu es fou ! J’aurai autre chose à faire dans trente ans ! J’aurai un paquebot et je serai au bord de la mer à boire des piña coladas. » Mais ça ne s’est pas passé comme ça. Alors, j’ai été obligé de faire La haine, la suite (rires). Non, honnêtement, je n’aurais jamais pensé que les gens se souviendraient du film. Au début, en tant que réalisateur, je ne comprenais pas très bien que chaque année, on me reparle du film. Puis, après dix ans, vingt ans, trente ans, on se dit : « Tiens, il y a peut-être quelque chose… ». C’est une vie autour de ce sujet. Les gens qui aiment le film me demandent souvent : « Est-ce que tu vas faire Déteste 2 ? Nous voulons savoir qui a tiré à la fin ! Il y a tellement de questions sans réponse. Cela me fait du bien d’essayer d’y répondre. Je pense que je devais terminer ce que nous avions commencé.
Et puis l’histoire du gars qui se réveille le matin et meurt le soir d’une balle dans la tête, c’est un très bon sujet de comédie musicale. Vous savez que vous allez pleurer à la fin, être submergé par des émotions qui vous bouleversent. Il n’y en a plus »romantique.» En plus, les bonnes comédies musicales sont politiques.

Il y a trente ans, la phrase choc du film était « Jusqu’ici tout va bien ». Pour l’émission, vous avez choisi le sous-titre « Jusqu’à présent, rien n’a changé ». Pour quoi ?

Car le sujet est le même qu’il y a trente ans : le problème des brutalités policières. La violence est intrinsèque à la société, elle fait partie des relations entre des jeunes qui n’obéissent pas forcément aux lois et des personnes habilitées à les faire respecter. Le problème c’est que lorsqu’il y a une erreur, un accident, intentionnel ou non, ce sont les flics qui doivent signaler le leur. C’est la question qui se pose à nouveau Détester : bien sûr la police est là pour nous protéger, mais qui nous protège des mauvaises polices ?
Depuis 1995, plusieurs fois par an, à chaque bavure policière, Détester est cité sur les chaînes d’information et dans la presse. Cela fait donc trente ans que je suis informé dès qu’il se passe quelque chose. L’année dernière, par exemple, le jeune Nahel a été tué par un policier. Lorsque l’équipe du spectacle et moi avons vu la vidéo de l’altercation et le choc qu’elle avait créé dans le public, nous avons pris conscience de la responsabilité que nous avions. C’est le même que nous avions à l’époque.

Dans le film, il y a très peu de musique, seulement deux morceaux : Brûler et piller par Bob Marley et Le son de la police KRS-Un. C’était tout un défi de faire un spectacle musical…

Pour le spectacle, la forme de la comédie musicale est venue naturellement, compte tenu du scénario original du film. Si l’on décompose le scénario du film, on découvre que chaque scène a un sujet, donc il est facile de dire à un artiste : « Hé, tu reprends ce thème, ta chanson fait partie du dialogue ». Chaque pièce développe les personnages, mais permet également d’expliquer des scènes qui n’ont pas été expliquées dans le film. Nous avons utilisé la musique pour donner un nouveau caractère au film, pour exprimer quelque chose de nouveau. Cela se fait notamment à travers le hip-hop, le rap, mais pas seulement. Nous avons des artistes comme The Blaze, Mathieu Chedid, les Gipsy Kings, Sofiane Pamart, etc. Avec Proof, le directeur musical, nous avons réfléchi à un arc musical qui fait le pont entre 1995 et aujourd’hui. On retrouve dans le spectacle toutes les musiques actuelles : que ce soit celle des quartiers populaires ou celle des quartiers chics de Paris. Mais finalement, aujourd’hui, en banlieue comme dans le 16e arrondissement, on écoute quasiment la même musique.

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