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Trois CD pour goûter aux charmes discrets de la musique de chambre

Trois CD pour goûter aux charmes discrets de la musique de chambre

► « The Muses Restor’d » de Rachel Podger au violon et Brecon Baroque, label Chanel Classics

Toute la virtuosité du violoniste anglais, maintes fois célébrée chez Bach, Vivaldi ou Mozart, est ici humblement mise au service de pages méconnues du répertoire baroque d’outre-Manche. Elle a voulu entremêler la voix de son violon italien de 1739 avec celles d’instruments traditionnellement présents dans les continues, comme la viole de gambe et le luth, ou plus inattendus, comme l’orgue positif.

Sur un ton conversationnel » entre amis » – comme l’écrit lui-même Matthew Locke (1621-1677) dans le titre de son Petite consort – se succèdent des pages marquées par les danses de la Renaissance, les senteurs de l’opéra, ou encore les souvenirs d’airs populaires. Nous apprécierons particulièrement Baissede Fantaisie de William Lawes (1602-1645), musicien au service du roi Charles Ier, mélomane. Les notes sonores délicatement inscrites par le violon dans une broderie irisée révèlent à quel point la sous-estimation peut être éloquente.

► « Mozart : Sonates/Rondos » de Jérôme Hantaï sur un pianoforte du XVIIIe siècle, étiquette Mirare

Parmi cette famille de musiciens, enfants du peintre Simon Hantaï, Jérôme est apprécié comme le champion de la viole de gambe. C’est ici son intérêt pour les claviers anciens qu’il met en pratique, jouant d’un instrument proche par son âge et ses caractéristiques de ceux de Johann Andreas Stein dont jouissait le virtuose Mozart en son temps. « Si je frappe fort la note, je peux laisser mon doigt sur la touche ou la retirer, et le son s’éteint au moment où je la frappe. Je peux frapper la note comme je veux, le ton sera toujours le même.» (Lettre de Mozart à son père, 17 octobre 1777).

L’oreille d’aujourd’hui met un bref instant à trouver son acuité, mais apprécie rapidement les nuances et l’équilibre du grave jusqu’à l’aigu du registre. Ce véritable charme sonore se conjugue à la simplicité et à l’expressivité du jeu de l’interprète. Les silences, et Mozart sait combien ils sont consubstantiels au chant, ne sont pas des pauses mais les ponctuations d’un même discours.

Une rhétorique aussi subtile ne peut qu’égaler les charmes du répertoire : de l’éclat des sonates de jeunesse aux clairs-obscurs des rondos ultérieurs. Et, plus étrange encore, cet hommage du jeune Salzbourgeois au chantre de Leipzig, Jean-Sébastien Bach, dans leAllemand K 399mouvement d’une suite inachevée.

► « Ravel-Lyatoshynsky : Quatuors à cordes » du Quatuor Tchalik, label Alkonost

Ce jeune quatuor à cordes qui réunit quatre frères et sœurs étonne par son harmonie sonore illuminée par le timbre du premier violon, mais étonne aussi par sa cohérence musicale et sa maturité esthétique. Associez-vous au célèbre et génial Quatuor de Maurice Ravel (1903), deux des cinq quatuors du compositeur soviétique d’origine ukrainienne Boris Lyatoshynsky (1895-1968) échappent au seul hasard. En 1922, lorsque son Quatuor n°2 op. 4l’aspiration à la modernité n’est pas encore freinée en URSS et la référence à Ravel assez explicite, notamment dans le thème du troisième mouvement.

Quant à l’audace dont fait preuve un jeune ensemble en affrontant, chez Ravel, de nombreux prédécesseurs ou « concurrents » illustres, elle est également tout à fait justifiée. A 27 ans, Ravel est aussi un « débutant » et son quatuor est influencé par Debussy et Fauré. Les membres du Quatuor Tchalik soulignent la fluidité des lignes, l’apesanteur des harmonies mais aussi la pointe des rythmes et des sons. On en sera particulièrement convaincu à l’écoute du deuxième mouvement « très rythmé ».

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