Un nouveau variant, plus contagieux et dangereux, frappe depuis des mois plusieurs pays africains. Un cas a été identifié jeudi en Suède, le premier en Europe.
Faut-il craindre une nouvelle pandémie ? L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a déclenché mercredi, comme elle l’avait déjà fait en 2022, son plus haut niveau d’alerte mondial en raison de la résurgence de cas de mpox (anciennement appelé « monkeypox ») provoquée par un nouveau variant de ce virus (clade 1b) jusqu’alors concentré sur le continent africain, mais qui se propage désormais à d’autres pays. Un cas a été identifié au Pakistan vendredi 16 août, tandis qu’un autre, le premier en Europe, a été enregistré jeudi en Suède. De son côté, la Chine a renforcé ses contrôles aux frontières.
Que sait-on de cette nouvelle vague épidémique ? Comment se transmet cette maladie ? Quels en sont les symptômes ? Comment s’en protéger ? Franceinfo revient sur les questions les plus importantes.
D’où vient le virus mpox (et pourquoi ce nom) ?
La découverte de cette maladie infectieuse virale remonte à près de soixante-dix ans. Le MPOX a été isolé pour la première fois en 1958 chez des singes de laboratoire à Copenhague (Danemark), rappelle l’Institut PasteurÀ l’époque, ces primates présentaient sur leur peau des lésions semblables à celles laissées par la variole humaine.
Sa transmission à l’homme a été détectée pour la première fois en 1970, chez un nourrisson de 9 mois en République démocratique du Congo (RDC), rappelle le professeur de médecine Sameer Elsayed. sur le site des médias La ConversationDes cas ont été signalés dans les années suivantes, principalement chez des enfants de moins de 10 ans, en RDC (alors appelée Zaïre), au Nigéria, en Côte d’Ivoire, au Libéria et en Sierra Leone, comme l’ont rapporté à l’époque plusieurs scientifiques dans une publication dans le Bulletin de l’Organisation mondiale de la santé. Cas humains « est resté longtemps confiné au continent africain jusqu’en 2003, où plusieurs dizaines de cas sont apparus aux États-Unis suite à une contamination par des chiens de prairie » qui avait été « hébergé avec des rongeurs importés du Ghana »a rappelé un article publié dans le Revue de langue française des laboratoires en juin 2023.
Ce virus, surnommé « variole du singe » (« variole du singe » (en anglais : en anglais) appartenait, lors de sa découverte, à la même famille que la variole humaine, éradiquée dans le monde entier à la fin des années 1970. Mais plusieurs experts ont jugé son nom inapproprié ces dernières années. « C’est un virus plutôt mal nommé, car son hôte naturel est plutôt un rongeur, comme le rat de Gambie. »expliqué Olivier Schwartz, directeur de l’unité virus et immunité à l’Institut Pasteur, à franceinfo en juin 2022. C’est pour cette raison, et pour éviter « langage raciste et stigmatisant »que l’OMS a décidé de renommer le virus en « mpox » en novembre 2022.
Pourquoi l’OMS a-t-elle déclenché son niveau d’alerte le plus élevé ?
La nouvelle variante du virus, appelée « clade 1b », est plus mortelle, plus contagieuse et touche plus de populations que les précédentes. Selon le comité d’urgence sur le mpox, la situation actuelle constitue « « une urgence de santé publique de portée internationale »a écrit Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l’OMS, sur X mercredi. L’organisme s’inquiète particulièrement du taux de mortalité de cette nouvelle souche, qui est beaucoup plus élevé, et peut atteindre 5% chez les adultes et 10% chez les enfants.
L’agence sanitaire de l’Union africaine a annoncé mardi une augmentation de 160% des cas en 2024, par rapport à l’année précédente. « Le nombre de cas enregistrés (en RDC) depuis le début de l’année est déjà plus élevé » au total enregistré en 2023, avec « plus de 15 600 cas et 537 décès »L’OMS a fait son rapport mercredi.
Le déclenchement de l’alerte maximale permet à « les pays qui ont des vaccins en stock (de) « faire des dons plus rapidement »Sylvie Briand, directrice du département de préparation mondiale aux risques épidémiques de l’OMS, l’a expliqué à franceinfo. « Il s’agit aussi de veiller, puisque le virus traverse les frontières, (…) à réduire la transmission internationale ».
Dans quels pays le MPOX circule-t-il actuellement ?
La nouvelle variante a été découverte pour la première fois en RDC, dans les camps de déplacés autour de Goma, au nord-est du pays, en septembre 2023. Cette ville dispose d’un aéroport international et est située dans une région en conflit, limitrophe de plusieurs pays. « Les risques d’explosion sont réels compte tenu des énormes mouvements de population »« Nous avons besoin de soins médicaux urgents, mais nous devons nous occuper de nos patients », a indiqué à l’AFP Louis Albert Massing, coordinateur médical de Médecins sans frontières (MSF) dans le pays.
En quelques semaines seulement, le virus s’est propagé au-delà des frontières. Tedros Adhanom Ghebreyesus, cité par l’AFP mercredi, « Au cours du mois dernier, environ 90 cas de clade 1b ont été signalés dans quatre pays voisins qui n’avaient jamais signalé auparavant de MPOS : Burundi, Kenya, Rwanda et Ouganda ».
Ces derniers jours, le virus a atteint deux nouveaux continents, avec un cas signalé en Suède jeudi et un autre au Pakistan vendredi. « Il est probable que d’autres cas importés de clade 1 soient enregistrés dans la région européenne dans les jours et les semaines à venir »La branche européenne de l’OMS l’a annoncé dans un communiqué jeudi soir.
N’y a-t-il pas déjà eu une épidémie ces dernières années ?
Au printemps 2022, Une vague de MPOX a frappé une partie du monde. Sa propagation a alors été décrite comme « extraordinaire » par l’OMS, qui avait déclaré l’état d’urgence sanitaire mondiale en juillet.
Mais cette poussée épidémique, qui touchait une centaine de pays, a finalement été contenue et l’alerte de l’OMS levée en mai 2023. Le variant du virus, appelé « clade 2 », moins virulent que le clade 1b aujourd’hui, a contaminé plus de 87 000 personnes dans le monde et causé 140 décès entre le 1er janvier 2022 et le 8 mai 2023, selon les chiffres publiés par l’organisation (PDF).
En mai 2023, plus de 5 000 cas avaient été recensés en France, peut-on lire sur le site du service d’information sur la vaccination. Aucun décès n’a été signalé par Santé publique France.
Comment se transmet la maladie ?
La MPOX peut évidemment être transmise par contact direct avec des animaux infectés. En ce qui concerne la transmission interhumaine, Le ministère de la Santé explique que cela peut se produire de trois manières, directes ou indirectes : « Tun contact prolongé face à face par des gouttelettes respiratoires (salive, éternuements, crachats) soit par contact direct avec une personne infectée ; par l’intermédiaire de liquides corporels, de lésions cutanées dues à la maladie ou de muqueuses internes telles que la bouche ; soit indirectement par l’intermédiaire d’objets que la personne malade a contaminés, tels que des vêtements ou du linge de lit.
Les variantes précédentes touchaient principalement les hommes homosexuels et bisexuels. Mais avec le clade 1bDe nombreux cas de transmission lors de contacts hétérosexuels ou non sexuels ont été recensés, notamment entre mères et enfants, ou entre enfants dans les écoles. De nombreuses fausses couches ont également été recensées, et les chercheurs étudient les effets possibles sur la fertilité.
Quels sont ses symptômes ?
Les symptômes commencent par une phase caractérisée par de la fièvre, des frissons, des sueurs, de la fatigue et des ganglions lymphatiques gonflés et douloureux. Des maux de gorge, de la toux et des courbatures sont également signalés par les personnes malades.
Ensuite, une éruption de boutons, parfois urticants, se propage sur la peau. Ils ressemblent à de petites bosses remplies de pus ou de liquide clair et apparaissent le plus souvent sur le visage, la paume des mains et la plante des pieds. Ils se transforment ensuite en croûtes avant de cicatriser dans les semaines qui suivent. Ces vésicules peuvent également coloniser les muqueuses, notamment celles de la bouche et des parties génitales.
Comme la période d’incubation du virus peut varier de cinq à 21 jours, « Il est donc important que les patients restent isolés pendant toute la durée de la maladie (jusqu’à la disparition des dernières croûtes, généralement trois semaines) », prévient le ministère de la Santé.
Bien que bénigne dans la majorité des cas, la maladie peut néanmoins donner lieu à des complications, écrivait en 2023 l’Institut Pasteur, qui recense notamment : « surinfections cutanées, septicémie, encéphalite ou lésion cornéenne ». « « Les personnes immunodéprimées, les femmes enceintes et les jeunes enfants auraient un risque plus élevé de développer une forme grave de la maladie. »précise le ministère français de la Santé.
Avec le nouveau variant, le chef de l’OMS s’alarme : clade 1b « provoque une maladie plus grave que la clade 2 ». Cela conduit à « éruption cutanée sur tout le corps »explique Trudi Lang, professeure à l’Université d’Oxford (Royaume-Uni), dans une interview publiée sur le site de l’organisation Gavi (Alliance mondiale pour les vaccins et la vaccination). Selon elle, les symptômes ont également tendance à durer « pendant longtemps »Dans la même interview, Léandre Murhula Masirika, qui dirige la recherche en RDC, a évoqué les effets secondaires liés à l’infection, les patients se plaignant de « problèmes avec les yeux, la peau ou les organes génitaux ».
Existe-t-il des traitements ou des vaccins ?
Initialement conçu pour le traitement de la variole, un agent antiviral, administré en cas d’infection sévère, a été approuvé pour le traitement de la MPOX, rappelle l’Institut Pasteur. Pour les infections plus légères, aucun traitement n’existe, les symptômes disparaissent spontanément, souligne l’OMS.
Pour prévenir l’infection, deux vaccins existent, mais peu de doses sont disponibles dans les pays africains les plus touchés. Les patients vaccinés contre la variole à un jeune âge présentent des symptômes moins graves, mais les campagnes ont pris fin en 1980 après l’éradication de la maladie. « Par conséquent, à l’heure actuelle, les personnes de moins de 40-50 ans (selon les pays) peuvent être plus sensibles »précise l’OMS. on ne connaît pas non plus le degré d’efficacité de ces vaccins contre la nouvelle variante du virus. Il est donc nécessaire de miser sur la prévention en sensibilisant et en informant les populations.
Le ministère de la Santé rappelle que depuis juillet 2022, un dispositif d’écoute spécifique au virus mpox, chargé notamment d’informer, de conseiller et d’orienter vers les dispositifs de soins, est disponible. Le service Monkeypox info est accessible 7 jours sur 7, de 8h à 23h, au numéro vert 0 801 90 80 69.