Le Conseil espagnol des sports a annoncé jeudi la mise sous tutelle de la RFEF, au cœur d’une vaste enquête pour corruption, quelques mois seulement après le scandale du baiser forcé de Luis Rubiales.
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Le gouvernement de Pedro Sanchez a annoncé, jeudi 25 avril, la mise sous tutelle de la Fédération espagnole de football, dont le personnel est visé par une enquête pour corruption, pour « remédier à la situation grave dans laquelle se trouve la RFEF »Dans « l’intérêt de l’Espagne »organisateur de la Coupe du monde 2030 conjointement avec le Portugal et le Maroc.
Une décision inédite qui témoigne de la grave crise que traverse le football espagnol, déjà au cœur des polémiques à l’été 2023 après le baiser forcé de Luis Rubiales à Jenni Hermoso.
Que signifie ce placement sous tutelle ?
La RFEF sera placée sous tutelle « au cours des prochains mois » par une commission créée par le Conseil supérieur des sports (CSD), organisme autonome chargé de mettre en œuvre la politique nationale du sport. Il est rattaché au ministère espagnol de l’Éducation, de la Formation professionnelle et des Sports, mais jouit d’une plus grande liberté vis-à-vis du gouvernement que le ministère français des Sports.
Cette commission de « supervision, normalisation et représentation » sera dirigé par « personnalités indépendantes », chargé de superviser la RFEF. Selon la presse espagnole, l’ancien sélectionneur Vicente del Bosque, champion du monde en 2010, devrait en faire partie. Les pouvoirs de cette commission paritaire restent à définir, car les fédérations sportives doivent être indépendantes de leurs gouvernements.
Pourquoi une telle décision ?
Le gouvernement espagnol a pris cette décision radicale à la suite d’une vaste enquête de corruption – baptisée Opération Brodie – dans laquelle sont inculpés Luis Rubiales, ancien président démissionnaire de la RFEF également accusé d’agression sexuelle sur Jenni Hermoso, et son successeur (et ancien bras droit) Pedro Rocha. .
Cette affaire concerne des irrégularités dans les contrats signés par la fédération espagnole au cours des cinq dernières années, notamment les conditions dans lesquelles la Super Coupe d’Espagne a été délocalisée en Arabie Saoudite.
Par ailleurs, le Tribunal administratif du sport (TAD) a estimé dans un récent rapport que Pedro Rocha, actuel président de la fédération, et sa direction intérimaire avaient commis des erreurs « très graves » en prenant des décisions allant au-delà de leurs compétences d’intérim, comme celui de la prolongation du contrat de l’entraîneur Luis De La Fuente. C’est ce rapport qui a conduit à la décision prise jeudi.
Quels risques pour l’avenir du football espagnol ?
La mise sous tutelle de la RFEF rompt avec le principe d’autonomie et de non-ingérence des gouvernements au sein des fédérations consacré dans les statuts de la FIFA et de l’UEFA. Dans un communiqué commun, les deux autorités ont indiqué qu’elles suivaient « de près et avec une grande inquiétude la situation entourant la fédération espagnole« , pour s’assurer que cette commission n’affecte pas « son indépendance ».
Eux seuls sont normalement capables d’intervenir dans les affaires internes des fédérations, comme lorsque la FIFA a suspendu Luis Rubiales à cause de son baiser forcé à Jenni Hermoso. Le non-respect de ce principe pourra entraîner des sanctions allant jusqu’à l’exclusion de toutes les équipes, sélections et clubs espagnols des compétitions européennes et internationales.
Le Conseil supérieur des sports reste cependant serein et assure avoir tenu la FIFA informée de tous ses efforts au fur et à mesure de leur avancement. Le gouvernement espagnol aurait même apprécié que les deux autorités elles-mêmes interviennent au préalable, afin de ne pas laisser à la tête de la fédération espagnole des individus inculpés pour corruption, administration déloyale et appartenance à une organisation criminelle.
En ne suspendant pas Pedro Rocha et l’ensemble de sa direction intérimaire, le CSD n’a pas créé de « vide » à la tête de la fédération et a même laissé désigner le remplaçant de Luis Rubiales au cours d’un processus quasi électoral. ‘réalisé. Autant d’arguments que le comité de surveillance devra faire valoir à la FIFA et à l’UEFA, qui ont prévu de demander des éclaircissements sur la base juridique lui permettant de se placer au-dessus de tout dirigeant de la fédération, y compris son président.
Vers un conflit entre le gouvernement et la fédération ?
Au lendemain de ce placement sous tutelle, la fédération espagnole a nommé vendredi Pedro Rocha comme nouveau président, pour un mandat courant jusqu’en septembre prochain. Celui qui était jusqu’alors président par intérim, après le départ de Luis Rubiales, était le seul candidat à l’élection présidentielle, qui devait initialement se tenir le 6 mai si plusieurs personnes s’étaient présentées.
Mis en examen dans l’affaire de corruption qui secoue la fédération, Pedro Rocha ne pouvait pas être suspendu au moment de la tutelle par le CSD, puisqu’il n’était que candidat à sa propre succession, sans rôle officiel dans l’organigramme de la RFEF.
Toutefois, le Conseil supérieur des sports pourrait encore décider de le suspendre ainsi que les autres membres de la commission de gestion intérimaire mardi prochain, lors d’un vote. Tous font toujours l’objet d’une enquête ouverte par le Tribunal administratif du sport et la création de la commission de contrôle faciliterait leur suspension, puisque cette autre instance pourrait prendre le relais.