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TÉMOIGNAGE. Faux volontaire, il envisage de « saboter l’esprit » des Jeux de Paris 2024

De faux volontaires ont infiltré les rangs des 45 000 volontaires sélectionnés pour l’organisation des Jeux olympiques, prévus du 26 juillet au 11 août. Franceinfo : le sport a rencontré l’un d’entre eux.

France Télévisions – Éditorial Sport

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De la

« Avant d’entrer, peux-tu me donner ton téléphone s’il te plaît? » Pour Michel*, qui nous reçoit dans son appartement luxueux, toutes les précautions sont bonnes à prendre. Notre smartphone finit au micro-onde, avec le sien et celui de sa colocataire, pour ce premier rendez-vous de quelques minutes. Michel est un « des radicalisés indignés » face à l’organisation des Jeux de Paris 2024, telle qu’elle se définit. Un « faux volontaire », comme on les appelle. Sélectionné parmi les 45 000 volontaires des Jeux olympiques et paralympiques (JOP), il s’est infiltré dans les rangs des volontaires dans le but de saboter l’organisation.

Depuis le début de l’hiver dernier, franceinfo : sport est parti à la recherche de ces « faux volontaires », source d’inquiétude pour le Comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques (Cojop) et le gouvernement français. Combien sont-ils ? Personne ne sait. Plusieurs personnes, susceptibles de devenir des infiltrés au sein des volontaires, ont été contactées. Seul Michel a accepté d’expliquer cet engagement. Franceinfo : Sport a pu consulter et authentifier les documents officiels de sa sélection comme volontaire JOP, ainsi que son affectation et ses missions aux Jeux. « Je suis quelqu’un qui s’est lentement mais progressivement radicalisé, vers des idées d’extrême gauche. » est-ce qu’il se définit.

Faux volontaire, Michel pose devant le Parc des Princes avec la ferme intention de perturber l'organisation des Jeux de Paris 2024.  (FRANCEINFO : SPORT)

Après plusieurs échanges indirects, via une tierce personne, et trois premiers entretiens informels, il a finalement accepté de prendre la parole. Michel, trentenaire sans casier judiciaire, ingénieur informaticien de profession, ressemble à tout le monde. Ce semblant d’anonymat lui sert dans son projet, mais il se montre particulièrement méfiant. Depuis plusieurs mois, toutes les correspondances avec lui s’effectuaient sur une plateforme de messagerie cryptée et sécurisée, afin de ne pas dévoiler son identité. « couverture » en danger.

Car, depuis le début de l’année, les services de renseignement français ont déjà mis sur la touche pas moins de 1 618 personnes. Parmi eux, plusieurs centaines ont été identifiés comme « des bénévoles qui n’avaient visiblement pas de bonnes intentions », selon le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin. En revanche, selon nos informations, les services de renseignement chargés des enquêtes de filtrage concernant les 45 000 volontaires (1 million d’enquêtes ont été lancées au total) ont toutes les peines du monde à identifier ces fameux « faux volontaires ». Contactée, la Délégation interministérielle aux Jeux olympiques et paralympiques (Dijop) n’a pas répondu à nos demandes.

Michel l’assure : il « ne prévoit en aucun cas une action violente et extrême ». « Je ne risque pas la prison pour les actes que je pose. Au final, une petite garde à vue ou au pire une amende, mais rien de plus. » il dit.

Son objectif ? UN « sabotage. Le mot est fort, » concède-t-il en s’arrêtant longuement. Mais je l’utilise un peu car l’idée est avant tout de saboter cet esprit festif. Je veux semer la panique dans l’organisation. Attention, pas de paniqueil se justifie. Parce que mon objectif ne sera jamais de mettre en danger autrui, mais de rendre visible mon action, si possible aux yeux du monde. »

« L’idée est plutôt de faire parler d’eux, des messages que je veux faire passer, et de chatouiller les pulsions répressives de l’Etat. »

Michel, « faux volontaire » lors des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024

sur franceinfo : le sport

Selon la « Charte du volontariat olympique et paralympique » de Paris 2024, les sanctions peuvent varier, selon la gravité des faits, d’une simple « avertissement » à « procédures judiciaires et judiciaires » en passant par le « révocation du statut de bénévole ».

Quelles sont ses motivations ? Pour Michel, le tournant est survenu récemment. «Je fais partie des indignés suite à la réforme des retraites (mouvement social de janvier à juin 2023)et c’est après ça que j’ai eu envie de m’impliquer dans ce mouvement (contre l’organisation des Jeux Olympiques de Paris 2024) », il confie. A cette époque, plusieurs collectifs lançaient un appel sur les réseaux sociaux, autour du hashtag #PasDeRetraitPasDeJO. La crise du Covid-19 est venue parfaire un phénomène de radicalisation chez nous : « Enfermée seule à la maison, j’ai pris le temps de développer ma réflexion sur le monde en lisant de nombreux auteurs différents comme (Jeans) Jaurès ou (Rocher) Kropotkine », dans ce qu’il appelle « une retraite littéraire ». « J’en suis arrivé au point de me dire qu’il fallait des actions concrètes, que je fais quelque chose »conclut-il.

Son discours est répété, centré sur les injustices sociales : « Le gouvernement (Français) essaie de cacher la pauvreté socialeil accuse, sauf qu’on ne vit pas dans le Paris du film d’Amélie Poulain ». Michel évoque notamment l’expulsion de plus de 2.000 étudiants de leur logement universitaire réquisitionné par le Cojop, et le déplacement, vers d’autres villes, de sans-abri ou de migrants… « Je parle d’expulsionMichel s’aventure. Je sais que c’est un mot fort. Mais c’est un mot qui a un sens. Il suffit d’ouvrir un dictionnaire pour voir ce que cela signifie et on est littéralement dans la définition même de la déportation. » LE Larousse définit pourtant un « déportation » par « transfert et internement dans un camp de concentration situé dans une zone reculée ». « Il y a une connotation, il minimise. C’est également volontaire. C’est l’idée de remettre en question ce que nous sommes capables de faire pour les loisirs, et de divertir la galerie à l’international. »

Son discours va plus loin : « Le but est aussi de montrer les dérives autoritaires des Etats dits démocratiques, il incrimine. La France n’est pas celle qu’ils veulent montrer au monde ! Pour lui, « La France d’aujourd’hui n’est pas seulement celle de la cérémonie d’ouverture sur la Seine, elle est aussi celle qui vide et ‘assainit’ ses rues, qui expulse de chez eux ses étudiants précaires. »

« Ce qui me révolte vraiment, ce sont toutes ces questions de société. Mon objectif, à terme, est de rendre visible l’invisible.

Michel, sélectionné parmi les 45 000 volontaires des JOP Paris 2024

sur franceinfo : le sport

Depuis plusieurs mois, Michel réfléchit aux différentes actions qu’il pourrait entreprendre. Il refuse d’en dévoiler les contours, mais espère pouvoir réaliser « une action qui va faire du bruit, et qui va perturber la bonne organisation et la diffusion TV » de l’épreuve à laquelle il a été assigné. Pour ce faire, il cherche à se rapprocher d’un collectif ou d’un groupe organisé, avec lequel il partagerait « certaines valeurs » et le désir de formuler des revendications communes. Mais si ses contacts restent infructueux, il lancera une manifestation individuelle. Son choix n’est pas encore fait.

*Le prénom a été modifié

Ray Richard

Head of technical department in some websites, I have been in the field of electronic journalism for 12 years and I am interested in travel, trips and discovering the world of technology.
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