Une bonne heure après les embrassades à l’arrivée et les larmes à peine retenues de Warren Barguil, ému par le succès de son compatriote, John Degenkolb arrive à l’hôtel de l’équipe DSM-Firmenich Post NL torse nu et à peine moins secoué par le maillot jaune de Romain Bardet. Tombant dans les bras d’une connaissance, le visage encore marqué par la chaleur et la fatigue, il lâche : « C’est incroyable, je suis tellement heureuse pour lui, c’est comme un rêve, pour sa dernière année ! »
Le grimpeur auvergnat est une figure respectée. La manière dont il a remporté la première étape de son dernier Tour a plu à beaucoup de monde. Pendant que ses mécaniciens célébraient l’événement autour d’une bière, une voiture de Decathlon-AG2R La Mondiale, l’ancienne équipe du nouveau Maillot Jaune, klaxonnait sur la route. Ses passagers ont salué Matthew Winston.
Le coup de panne
Le directeur sportif se remettait à peine de cette journée où tout s’est mal passé pour son équipe, sauf pour les cyclistes. La fin du parcours de Bardet et Frank Van den Broek, dans la banlieue de Rimini, il l’a suivie à l’aveugle depuis sa voiture, privé de retransmissions TV par une tablette défectueuse et contraint de se fier uniquement aux indications de Radio Tour. Après l’arrivée, l’équipe n’avait pas de car pour permettre aux coureurs de se changer, d’arriver présentables, d’avoir tout l’arsenal de récupération habituel. Le leur est tombé en panne entre Florence et la côte adriatique.
Les troupes sont donc rentrées en ordre dispersé à Riccione, une dizaine de kilomètres plus au sud, les cars sur les vélos pour laisser la place aux coureurs dans les voitures. Quand Bardet a gravi les marches du hall d’entrée vêtu de la précieuse tunique, bien après ses coéquipiers, il n’a pas été attendu par le moindre fan qui oserait couper sa conversation téléphonique avec son papa.
Il ne risquait pas non plus d’être bombardé de sollicitations par les quelques clients attablés au bar, peu enthousiasmés par le héros français du jour quelques minutes après l’élimination de l’Italie en huitièmes de finale de l’Euro contre la Suisse (0-2).
« Des jours comme celui-ci sont merveilleux, s’est réjoui Christian Guiberteau, le directeur sportif de l’équipe française, quand les attaquants sont récompensés après une étape aussi exigeante. » Car la journée s’est vraiment bien terminée : à 22 heures, le car noir de l’équipe, réparé, s’est garé sur le parking de l’hôtel. Juste à temps pour que tout le groupe puisse enfin partager une coupe de champagne devant les écrans rediffusant l’exploit maison.