Taylor Swift et l’horlogerie bien huilée du « Eras Tour », de l’Asie à la France
Il pleut souvent à Singapour. En mars, une averse exceptionnelle s’est abattue sur la cité-État d’Asie du Sud-Est : une pluie de paillettes a fait scintiller les abords du Stade national, où Taylor Swift a donné six concerts, entre le 2 et le 9 mars. Partout, des paillettes : sur les jupes et les paupières, sur les peaux et les chapeaux, sur les bottes de cowboy et les hijabs d’un public venu de tous les coins du sous-continent pour acclamer la pop star mondiale – elle-même brillait de paillettes. face à face, pendant la majeure partie du spectacle.
L’étape singapourienne de l’« Eras Tour », comme on appelle la tournée la plus lucrative de l’histoire, était la dernière avant de s’arrêter à Paris La Défense Arena, du 9 au 12 mai, puis au Groupama Stadium, près de Lyon, les 2 et 3 juin. Comme tous les autres, ces concerts affichent complet depuis la mise en vente des billets il y a presque un an. Singapour était aussi la dernière étape avant la sortie, le 19 avril, du onzième album de l’Américain, Le département des poètes torturés, qui s’est depuis hissé au sommet des charts mondiaux.
Ainsi va le carrosse de la fée Taylor : partout où il passe, il modifie le cours ordinaire des choses, laissant derrière lui, de records en tours de force, comme une traînée de poussière dorée. Combien de sorts exactement sont attribués au chanteur de 34 ans ? Selon certains politologues, cela pourrait influencer les élections aux Etats-Unis début novembre. Par sa capacité à mobiliser un électorat jeune, statistiquement plus démocrate et abstentionniste que la moyenne, d’abord ; par la cote d’amour qu’il maintient parmi les fans de country, qui sont donc considérés comme conservateurs.
Les économistes lui attribuent le don de booster la croissance des villes qu’elle visite, car la ruée vers Taylor attirerait des touristes en masse. Et pas n’importe lesquels : notamment issus des classes moyennes ou aisées, les « swifties », comme on appelle leurs fans, sont particulièrement prompts à dépenser.
Selon une indiscrétion du Premier ministre thaïlandais, jaloux du pactole singapourien, la cité-État aurait versé près de 18 millions de dollars aux producteurs pour s’octroyer l’exclusivité de ses concerts dans la région. Une bagatelle, si on les compare aux 400 millions de dollars qu’ils auraient rapportés à Singapour, soit une augmentation de 0,3% du PIB, selon les estimations des banquiers locaux. Dès la pose de ses bottes sur la scène du Stade National, le 3 mars, la chanteuse a elle aussi mis les pieds dans le plat : « Qui d’entre vous a voyagé ici ? », apostrophe-t-elle. Les clameurs de la foule ne laissent aucun doute : la majorité des 360 000 spectateurs qui ont assisté aux six concerts ne sont pas indigènes.
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