« Tata » de Valérie Perrin
Encore une histoire captivante et émouvante de Valérie Perrin. Comme dans un film, elle a l’art de raconter et de faire virevolter les époques, avec une sacrée « Tante » dont on entend presque la voix, et qu’on n’est pas prêt d’oublier !
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Après Les oubliés du dimanche, Changer l’eau des fleursEt TroisLà Tatale nouveau roman de Valérie Perrin qui vient de paraître aux éditions Albin Michel.
LIVRES ET JEUNESSE – Ecouter l’interview complète de Valérie Perrin (13 min)
« Trois ans plus tard »Colette est morte à nouveau. Ce mot n’existe nulle part. « Il n’y a pas de mort possible »…
C’est pourtant ce qu’apprend Agnès, réalisatrice de cinéma à succès et dépressive, depuis que son mari et acteur préféré l’a quittée pour une « jeune fille » et qu’elle survit grâce à l’amour de sa fille Anna. Celle qui est « remorte », c’est elle Tatasa tante Colette, avec qui Agnès a passé toutes les vacances de son enfance en Bourgogne, à Gueugnon, historiquement réputée pour ses usines sidérurgiques, et maintenant aussi pour sa cordonnerie, celle de Colette. C’est donc elle, Tataenfin, l’héroïne de cette intrigue incroyable, une femme discrète, célibataire et apparemment – du moins avant de mourir deux fois – sans histoire…
On pourrait aussi se tromper au départ, et penser qu’il s’agit simplement d’une histoire fantastique avec cette seconde mort. Mais en fait, c’est le prétexte pour aborder l’enfance de Colette et de son frère Jean, donc le père d’Agnès, qui est un virtuose du piano, et aussi l’enfance de son amie Blanche. Et puis, dans un autre registre, l’enfance brisée de Lyèce, l’amie d’enfance d’Agnès qu’elle retrouve à Gueugnon. La transmission, les blessures de l’enfance sont décidément ses thèmes de prédilection.
« L’abandon, l’adoption, les liens du cœur, du sang, sont très importants pour moi… J’aime comprendre ça, approfondir ça, j’aime me poser des questions. Et puis j’aime être au plus près des gens qui ne sont plus des personnages. En fait, pour moi ils sont proches de moi. Que ce soit Colette, que ce soit Agnès, que ce soit Pierre ou Blanche, Lyèce aussi, peu importe, je me sens très proche d’eux, et c’est vrai que j’aime me poser des questions sur l’espèce humaine. »
Valérie Perrinà franceinfo
De plus, nous, lecteurs, nous nous sentons aussi, au fur et à mesure que nous avançons, au fil des pages, très proches des personnages. Il y a une sorte d’intimité qui se crée, d’autant que tout, ou presque, passe par la voix dans ce roman. Les voix des cassettes enregistrées par Colette, et celles de quelques autres personnages que nous ne nommerons pas, sont au cœur de l’enquête. Et c’est grâce à ces enregistrements sur le vieux magnétophone d’Agnès que nous comprenons peu à peu cette incroyable histoire de famille.
Une histoire qui remonte à la Seconde Guerre mondiale. On ne peut s’empêcher de penser que Valérie Perrin partage cela avec son compagnon Claude Lelouch, l’art de raconter, et le talent de faire virevolter les époques. On lit et on est là aussi, dans le film ! Valérie Perrin :
« Je construis mes histoires comme des films, je sais qu’elles sont très visuelles et qu’elles sont extrêmement dialoguées… Ensuite, je crois que mes romans, outre le fait qu’ils sont construits comme des romans policiers, donc je m’en tiens souvent à une intrigue très forte, il y a beaucoup d’enquêtes, donc les lecteurs aiment ça et en même temps, c’est comme si les personnages leur étaient familiers. Je pense qu’il y a une sorte de mélange étrange en fait, un mélange de fiction, mais aussi beaucoup de réalité. C’est ce qu’on me dit, j’apporte la parole de vie, mais à travers la fiction, c’est peut-être ça… »
Valérie Perrinà franceinfo
Tatac’est aussi bien sûr un bel hommage à la ville de sa jeunesse, Gueugnon, et à ses parents, comme elle le dit elle-même :
« Un hommage à mon père, qui est arrivé en fait avec ma mère dans cette petite ville, j’avais un an, pour y jouer au foot puisqu’il était footballeur professionnel. A l’époque, il y avait un statut très particulier appelé « semi-professionnel », et les joueurs travaillaient à l’usine le matin et s’entraînaient l’après-midi et jouaient le week-end. C’est pour ça que j’ai grandi là-bas. »
Tatac’est un roman de plus de 600 pages. S’il pèse lourd, c’est parce qu’il contient des vies ! Des vies extraordinaires, celles d’artistes, qui côtoient des vies « ordinaires » dans lesquelles chacun peut se reconnaître, ou retrouver un être cher à travers les personnages. Un roman comme tous ceux de Valérie Perrin qu’on a du mal à lâcher !
A noter l’adaptation de son roman Changer l’eau des fleurs de Jean-Pierre Jeunet est actuellement en cours d’adaptation… Encore un peu de patience avant de voir le film sur les écrans un jour !
L’interview complète de Valérie Perrin (13 minutes) est à retrouver en haut de cette page.
Grb2