Succès olympique, fiasco en finale de Ligue des champions… Le bilan d’Amélie Oudéa-Castéra au ministère des Sports
Le ministre des Sports, des Jeux olympiques et paralympiques a été remplacé par Gil Avérous, maire de Châteauroux, dans le gouvernement de Michel Barnier, après un mandat d’un peu plus de deux ans marqué par son bref passage à l’Education.
Publié
Temps de lecture : 6 min
Administration d’HabemusDeux semaines après avoir été nommé Premier ministre, Michel Barnier a dévoilé samedi 21 septembre son gouvernement, composé de 39 ministres. Parmi la valse des ministres ou secrétaires d’Etat sortants, Amélie Oudéa-Castéra, aux commandes depuis un peu plus de deux ans, quitte le ministère des Sports, des Jeux olympiques et paralympiques. Elle est remplacée par Gil Avérous, maire non partisan de Châteauroux. Retour sur le bilan de celui qui a été nommé en mai 2022, entre succès, bras de fer et polémiques.
Le succès des Jeux Olympiques et Paralympiques
C’était la grande échéance de son mandat et le mot « succès » n’est pas de trop, tant les Jeux de Paris ont été une grande échéance, tant sur le plan organisationnel que sportif pour la délégation française. L’événement a évité tous les écueils, la presse étrangère a été dithyrambique, les sites étaient pleins, les transports ont fonctionné et l’ambiance était là.
Plus de 12 millions de billets ont été vendus pour les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris (avec un taux de remplissage d’environ 95%), un chiffre qui bat facilement le record établi par les Jeux de Londres 2012 (10,9 millions de billets vendus).
Sur le plan purement sportif, les délégations olympique et paralympique françaises ont atteint leurs objectifs en terminant 5e et 8e au tableau des médailles.Il s’agit du meilleur record depuis 1900 pour les Jeux Olympiques et depuis 2000 pour les Jeux Paralympiques.
« C’est une immense satisfactiona souligné Amélie Oudéa-Castéra dans une interview à Figaro, 8 septembre. C’est la récompense d’une stratégie réfléchie depuis plusieurs années, avec des moyens inédits mis au service d’objectifs précis. Il y avait bien sûr tout ce qui concernait la préparation technique et mentale des athlètes, mais aussi leur accompagnement au-delà du sport. »
Ménage fait dans deux grandes fédérations
Ce n’était pas l’un des objectifs de son mandat, et pourtant, « AOC » a dû mettre la main à la pâte dans des fédérations secouées par des dossiers brûlants. Si la ministre des Sports n’avait pas le pouvoir de contraindre Noël Le Graët et Bernard Laporte, à la tête des fédérations de football (FFF) et de rugby (FFR), à quitter leurs fonctions alors qu’ils étaient empêtrés dans des scandales, elle y est parvenue.
D’abord, Bernard Laporte. Condamné le 13 décembre 2022 à deux ans de prison avec sursis et 75 000 euros d’amende pour corruption passive, trafic d’influence, prise illégale d’intérêts, recel d’abus de biens sociaux et abus de biens sociaux, notamment au profit du groupe Altrad, l’ancien président de la FFR avait proposé de se retirer de ses fonctions de président et qu’un président délégué soit nommé. Pas suffisant pour le ministre, ni pour les instances du rugby. Bernard Laporte a finalement annoncé sa démission un peu plus d’un mois après sa condamnation – dont il a fait appel – le 27 janvier 2023.
Pour Noël Le Graët, après de nombreux dérapages, la pression du ministre, un rapport d’audit accablant et l’ouverture d’une enquête préliminaire pour « harcèlement moral et sexuel« , avait rendu sa poursuite impossible et l’avait contraint à démissionner le 28 février 2023. Ce rapport soulignait une « exercice hautement centralisé du pouvoir », « Dérapages médiatiques »UN « Comportements inappropriés envers les femmes » et « manquements dans la gouvernance de la FFF ».
La ministre elle-même a été critiquée pour le salaire qu’elle a perçu lorsqu’elle était directrice générale de la Fédération française de tennis, de 2021 à 2022. Selon un rapport d’enquête parlementaire dévoilé en janvier 2024, eElle perçoit alors un salaire brut de 400 000 euros par an, plus 100 000 euros de bonus. Auditionnée en En novembre 2023, elle avait affirmé que son salaire était « très proche de celui de son prédécesseur »alors qu’il était 86 000 euros plus élevé.
La lutte contre les violences sexistes et sexuelles renforcée
Depuis le début de son mandat, « AOC » a fait de la lutte contre les violences sexistes et sexuelles (VSS) une priorité. « Aucun argument, pas même la quête d’une médaille, ne doit nous freiner dans ce combat. Je serai intransigeant car nous le devons aux victimes, à nos enfants et aux valeurs du sport. »elle a insisté en mars, lors de la présentation des résultats de l’action de son ministère sur le sujet.
Même si elle avait admis à l’époque que la cellule de signalement Signal Sport, mise en place par sa prédécesseure, Roxana Maracineanu, en 2020, était peu connue, la ministre s’était réjouie de l’intensification des contrôles : « 1,9 million de bénévoles ont été contrôlés. L’un des objectifs est de doubler le nombre de contrôles dans les établissements, de 3 900 à 6 000 en 2024. Ce type de contrôle n’existait pas il y a quatre ans. » Quatre-vingts représentants sportifs ont été désignés au sein des tribunaux.
Avant la dissolution de l’Assemblée nationale, un projet de loi concernant les VSS dans le sport devait être déposé « fin novembre ou début décembre pour une inscription en séance publique début 2025 »Les pistes alors engagées étaient « suspension à vie du permis de conduire dans les cas les plus graves de violences sexuelles et sexistes »mais aussi le renforcement des contrôles d’intégrité pour tous les bénévoles. Cette loi engloberait d’autres thématiques sportives, comme la démocratie au sein des fédérations.
Le chaos va commencer en finale de la Ligue des champions
Quelques jours après sa nomination, en mai 2022, Amélie Oudéa-Castera a dû faire face à l’un des plus gros ratés organisationnels de l’histoire française en matière d’événement sportif : la finale de la Ligue des champions entre Liverpool et le Real Madrid au Stade de France.
Alors que c’étaient surtout le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, et le préfet de police de Paris de l’époque, Didier Lallement, qui étaient visés par les critiques et le rapport accablant du Sénat, « AOC » n’a pendant longtemps pas voulu se désolidariser des décisions prises, ni des propos tenus sur la responsabilité des supporters anglais, qu’elle accusait d’être venus en masse avec de faux billets.Ce qui s’est passé a été une expérience désastreuse. J’ai présenté mes excuses aux supporters de Liverpool et du Real Madrid. C’est une blessure profonde qui nous a tous touchés (…) Je veux que les supporters ne soient plus jamais exposés à une telle situation.« , a-t-elle concédé sur le plateau de La Chaîne L’Equipe en mai 2023.
Un très court mandat comme ministre de l’Éducation
Le 11 janvier 2024, dans le cadre du précédent remaniement, Amélie Oudéa-Castera avait pris en charge, outre le portefeuille des Sports et des Jeux olympiques, celui de l’Education. Lors de son premier déplacement, aux côtés de Gabriel Attal, alors Premier ministre, AOC avait fait une déclaration qui allait déjà provoquer sa chute.
Interrogée sur la scolarisation de ses enfants dans un établissement privé, la ministre a répondu que leur transfert du secteur public vers le secteur privé s’est effectué après avoir « j’ai vu des paquets d’heures qui n’ont pas été sérieusement remplacés »Il n’en a pas fallu plus pour que la confiance envers le corps enseignant soit brisée et que la ministre se retrouve empêtrée dans une controverse dont elle n’a pas su se sortir.
Trois semaines après sa nomination, les enseignants sont en grève dans la rue le 1er février. Si l’exécutif lui a d’abord accordé sa confiance, la tension est finalement devenue trop forte. Lors d’une deuxième vague de nominations, le 8 février, c’est finalement Nicole Belloubet qui prend la tête de l’Education, Amélie Oudéa-Castéra ne conservant que son portefeuille des Sports et des Jeux olympiques.