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Stéphanie Merhand, eczéma à visage ouvert

Stéphanie Merhand ne court pas pour porter la flamme olympique mais pour faire passer un message. Des plages de La Baule aux quais de Paris, samedi 15 septembre, la fondatrice de l’Association Française Eczéma va parcourir des kilomètres dans le cadre de la PEAUsitive Race. Cette course « Pas de gagnants ni de perdants » a été créée il y a cinq ans pour récolter des fonds et changer le regard sur cette maladie à la fois répandue et mal comprise. « Bien que tout le monde connaisse, directement ou indirectement, quelqu’un atteint d’eczéma, peu de gens savent d’où cela vient ou mesurent son impact sur la vie quotidienne »note Stéphanie Merhand.

« Certains de mes amis ont pris leurs distances »

Cette maman de 36 ans, active et chaleureuse, a appris très tôt à vivre avec un système immunitaire surréactif et une peau hypersensible. « Le plus dur quand j’étais enfant, c’était que j’adorais partir en vacances à la mer et à chaque fois que j’allais nager, les plaques qui recouvraient les plis de mes bras et de mes jambes me brûlaient. »se souvient-elle. À 18 ans, l’inflammation envahit son cou et son visage. Un coup dur à un âge où l’image de soi est cruciale. « En fait, ma peau était si douloureuse que je n’avais pas l’énergie de me soucier de ce que les autres pensaient. Mais certains de mes amis ont pris leurs distances. »

Cette maladie chronique, qui touche selon l’association près de 4 millions de Français, dont 20% d’enfants, a toujours suscité des idées fausses et des propos déplacés. « Ce n’est ni sale ni contagieux et ce n’est pas seulement une éruption cutanée rouge qui démange ! »dit Stéphanie Merhand, lasse d’attirer l’attention et d’être sans cesse ramenée à sa maladie. « Quand on va chez le coiffeur ou chez le pharmacien, il y a toujours quelqu’un qui vous propose un remède de grand-mère, même si ce qui a fonctionné pour quelqu’un n’est pas forcément transférable. »

 » Il faut faire attention à ce que l’on met sur sa peau. »

A 21 ans, son BTS tourisme en poche, elle crée un blog pour pouvoir communiquer avec des personnes traversant la même épreuve qu’elle : « J’ai réalisé que beaucoup d’entre nous se sentaient isolés et mal informés. La recherche médicale accordait peu d’attention au problème chez les adultes et les données statistiques manquaient. » L’Association Française de l’Eczéma, qu’elle a fondée en 2011, s’est alors donnée pour objectif de soutenir les patients et la recherche. Depuis 2016, elle mène régulièrement des études de qualité de vie, publiées dans de prestigieuses revues de dermatologie européennes et américaines.

Impact sur la vie professionnelle, la sexualité, le sommeil, le budget… difficile d’oublier une pathologie qui nécessite une vigilance de tous les instants : « Il faut faire attention à tout ce que l’on met sur sa peau : la matière des vêtements, la lessive, les cosmétiques et les produits d’hygiène, qu’il faut acheter en pharmacie ou en parapharmacie… Il faut s’habiller en couches pour pouvoir se déshabiller facilement car la transpiration provoque des sensations douloureuses. Même quand on a la peau fine, on est toujours un peu stressée. Une sortie à la piscine, par exemple, ne déclencherait-elle pas une poussée d’eczéma ? »

Une pièce de théâtre pour sensibiliser

Cette charge mentale et ces aléas de la vie quotidienne constituent le fil conducteur de la pièce « Eczéma, à la surface de la peau « , qu’elle vient de créer avec la compagnie lyonnaise ThéâtriCité et un dermatologue. Présenté pour la première fois en juin au Théâtre de la Tour Eiffel, ce spectacle, équilibré entre la lumière et le sérieux, était un véritable défi pour cette jeune femme plutôt timide, qui n’avait jamais joué sur scène. « Cette expérience m’a permis de réfléchir sur ma propre histoire avec la maladie et de prendre confiance en moi. »

C’est un atout supplémentaire pour faire entendre la voix des patients auprès du corps médical, au comité d’éthique du Collège national des enseignants de médecine générale, dont elle est membre depuis huit ans, ou à la faculté de médecine de Nantes, où elle dispense des cours d’éducation thérapeutique du patient. Mieux former les futurs médecins, créer des passerelles entre professionnels de santé et patients pour faciliter le parcours de soins à l’heure où de nombreux spécialistes partent en retraite et font déjà défaut dans certaines régions… les défis ne manquent pas pour les années à venir.

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Sa boussole : « Mes enfants »

« J’ai longtemps eu peur de devenir maman et de transmettre ce fardeau permanent qu’est l’eczéma, avec toutes les contraintes et les souffrances que cela implique. J’ai réussi à surmonter mes angoisses et j’ai eu la chance d’avoir deux enfants en bonne santé, Alice (10 ans) et Siméon (6 ans). Dans les moments de doute, quand la maladie est trop présente ou quand mon combat à l’Association Française Eczéma me paraît difficile, ils me donnent de la force, comme une flamme qui éclaire mon chemin. Ils sont toujours là pour me sortir du lit et me rappeler pourquoi j’ai décidé de soutenir des personnes comme moi. Je suis tellement fière d’eux. Ils ont une sensibilité et une ouverture aux autres déjà bien ancrées. Ils m’aiment telle que je suis, avec ou sans mes plaques d’eczéma. »

New Grb1

Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
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