Son fils devient handicapé, un père conçoit une maison où tout est accessible
De l’extérieur, il est difficile de le distinguer des autres immeubles voisins de Dinsheim-sur-Bruche (Bas-Rhin). La maison est certes de plain-pied, mais rien n’indique qu’elle a été conçue pour accueillir une personne à mobilité réduite (PMR).
Peut-être la largeur inhabituellement large du carport ? Pas même. C’est à l’intérieur de la maison qu’il faut aller pour comprendre. Face à la baie vitrée se trouve un étrange module en forme de cylindre. Comprenant trois pièces : une cuisine, une salle de bain et un WC. Sans oublier ses placards. Ultime caractéristique de la célèbre innovation ? Elle tourne ! En quelques secondes, une trentaine maximum, chaque emplacement devient facilement accessible. Le tout dans un silence presque parfait !
« Il suffit d’appuyer sur un bouton, et nous avons même une commande vocale pour ceux qui ne savent pas cliquer », explique Adam Bruner, qui s’est retrouvé malgré lui à l’origine de ce projet imaginé par son père. Le jeune homme, aujourd’hui âgé de 24 ans, a été victime d’un accident le 15 septembre 2019. « J’ai plongé dans une piscine et je me suis cogné la tête au fond. Mon cou et ma moelle épinière ont été touchés. »
Depuis, il est « tétraplégique incomplet » et ne peut plus bouger de nombreux membres. Comme le bas de son corps ou ses doigts. « J’ai eu plus de trois mois de soins intensifs et trois mois de soins intensifs, avant de passer un an en centre de rééducation », se souvient Adam Burner, qui est également passé par un hébergement PMR à la fin de son long périple. Là aussi, un mauvais souvenir…
« Redonner le plus de liberté possible à mon fils »
« J’ai dû prendre trois douches en trois mois car rien n’était facile. L’ascenseur ne rentre même pas ! Pour aller à la terrasse, il y avait une marche de 15 centimètres… Oui, c’était aux normes PMR, mais ce n’était pas adapté aux personnes à mobilité réduite. » Heureusement pour lui, tout cela n’a pas duré très longtemps.
En mai 2021, le jeune homme revient dans la maison familiale à Boerch (Bas-Rhin) et découvre un logement totalement modifié. Avec ce fameux plateau près de son lit. « Il fallait que je trouve une solution pour redonner le plus de liberté possible à mon fils », résume aujourd’hui modestement Nicolas Brunner, marchand de marchandises de métier qui a développé ce projet avec un ami mécanicien, Roland.
« Il est arrivé avec un drap, et on y a réfléchi », sourit l’intéressé, sans cacher sa fierté du résultat. Et surtout devant l’enthousiasme retrouvé d’Adam. « Malgré mon handicap, je pense avoir retrouvé une vie presque normale. Ce système a changé mon quotidien. Je peux faire ma lessive moi-même, ma cuisine, c’est beaucoup plus simple pour l’entretien…», explique-t-il en montrant les nombreuses options.
Comme ce lève-personne situé au dessus du lit qui permet, grâce à un rail, de se placer dans la salle de bain sans effort. Comme ce plan de travail de cuisine adaptable à toutes hauteurs. Comme cette machine à laver accrochée au mur, à sa portée… Et bien sûr, comme ce plateau rotatif baptisé « OTO, pour automatique », qui lui permet d’avoir « tout à deux mètres du lit ».
« Le système est vraiment agréable pour lui et pour nous, car il permet une prise en charge fluide », raconte Sarah Kherfi, une infirmière à domicile qui s’est occupée de lui pendant longtemps. « Avec d’autres personnes, il y a parfois des couloirs ou des pièces plus petites dans lesquelles ce n’est pas pratique… Là-bas, Adam peut conserver une certaine autonomie et il se sent inclus dans le soin. Il a traversé des moments difficiles mais maintenant il est dans une vraie dynamique. »
« Nous voulons aider les autres »
Le jeune homme et son père souhaiteraient désormais que le « système de rotation OTO », qu’ils ont breveté, soit reproduit ailleurs. C’est tout le sens de cette maison témoin, réalisée dans l’atelier du constructeur Booa, spécialisé dans la charpente en bois. « Nous voulons aider les autres », insiste Nicolas Burner sans vouloir donner de prix. « Peut-être dans un mois, mais cela dépend beaucoup des besoins de chacun. Il existe des options concernant le handicap. Nous voulons offrir le prix le plus juste. »
Des organismes spécialisés dans les certifications PMR se sont déjà rendus sur place, et d’autres visites sont attendues. «Il y aura aussi des tests cliniques avec des patients», précise Adam, convaincu du succès futur du produit. « Nous sommes même sûrs que cela fonctionnera. La première année, nous sommes capables de sortir deux à trois modèles par mois, mais plus tard, cela peut être un par jour », poursuit son père. « Nous cassons les codes du handicap. Nous ne pouvons pas le réparer, mais nous pouvons aider à vivre avec grâce à la technologie. »