Il était une fois deux villages bretons qui se ressemblaient comme deux gouttes d’eau et qui pourtant étaient aux antipodes l’un de l’autre. Derrière le conte, une réalité : à Senven-Léhart, le RN est à plus de 55 %. A Trémargat, à quelques kilomètres de là, il peine à atteindre 5 électeurs.
A-t-on découvert une potion anti-RN dans ce petit village d’irréductibles progressistes ? Non. La différence réside dans une dynamique d’engagements solidaires entamée depuis des années. Logements sociaux, projets participatifs, aides aux associations… la vie de la commune peut se résumer en une formule : « Accueillir et faire preuve de solidarité ». Rien de tel à Senven-Léhart.
Ces villages ne représentent pas la France entière. Mais ils donnent matière à réflexion. Notamment sur la question de « l’abandon ». La réduction des dépenses publiques érigée en dogme a conduit à des privatisations, à des augmentations de prix, ainsi qu’à la disparition totale de nombreux services publics dans d’innombrables communautés rurales ou quartiers populaires. Combien de bureaux de poste, d’agences EDF, d’agences de mairies ou de commissariats de police, d’hôpitaux, de classes, de gares et de lignes SNCF ont disparu au cours des quarante dernières années ?
Les multiples transferts de compétences vers les collectivités territoriales sans moyens supplémentaires ont plombé leurs budgets. Donc moins d’argent pour les associations, les services sociaux, la création d’entreprises… Moins de lieux où se créent la solidarité et le commun. Chacun est renvoyé à sa seule responsabilité individuelle et l’autre devient un concurrent. Pain béni pour le RN qui fait justement de l’autre l’ennemi.
L’engagement progressiste, le militantisme solidaire, le syndicalisme permettent, là où ils existent, de contrer ce mouvement de fond qui vise à briser la solidarité là où elle peut s’exprimer et à remettre en cause le système. La vocation du RN est de détourner, de détourner, d’étouffer cette potentielle contestation pour que, surtout, rien ne change pour les plus aisés. Voter pour le RN, ce n’est pas voter contre Macron. C’est proposer une solution alternative à ses sponsors.
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