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Société Générale se lance en Bourse

C’est le petit coup de pouce qui manquait pour que le cours de l’action Société Générale décolle. Lors d’un entretien avec l’agence de presse américaine Bloomberg, en marge du sommet de l’investissement « Choisissez la France » à Versailles, le président de la République Emmanuel Macron s’est déclaré favorable à la consolidation du secteur bancaire européen.

« Nous devons maintenant ouvrir cette boîte et proposer une approche de marché unique beaucoup plus efficace », a-t-il notamment déclaré. Et répondant à une question sur la possibilité d’un rachat d’une banque française, comme la Société Générale, par une banque européenne, comme le groupe espagnol Santander, le président a répondu que ce scénario était tout à fait ouvert :  » c’est possible ! « .

Une proie plutôt qu’un prédateur

Bref, l’exécutif ne s’opposerait pas à une offre publique sur la Société Générale, seul groupe bancaire français de taille systémique, coté et « exploitable ». D’autant plus réalisable que sa valorisation est parmi les plus basses des grandes banques européennes, à 0,4 fois l’actif net estimé (contre une moyenne européenne de 1 fois l’actif net estimé), soit environ 22 milliards d’euros aujourd’hui. Certes, le cours de l’action a gagné 23% en un an mais, dans le même temps, l’indice bancaire européen a augmenté de près de 40%.

La publication de l’interview a eu un effet immédiat sur le cours de bourse de la banque : le titre a gagné plus de 4% en fin de journée dans un marché stable. Une fois de plus, le président Macron s’affranchit des règles de réserve lorsqu’il s’agit de parler « business ». Et ses propos contrastent également avec ceux du gouvernement espagnol qui a exprimé son opposition au projet de rachat de Banco Sabadell, « la banque des PME » en Espagne, par le géant espagnol BBVA, lui aussi contraint à une OPA « hostile ». . .

Prime spéculative

Pour de nombreux investisseurs, seule une prime spéculative est nécessaire pour faire grimper le cours de l’action de la banque. Cette valeur bancaire souffre en effet d’un statut bien plus volatil que la moyenne du secteur ou du marché, ce qui empêche de nombreux gérants de la mettre en portefeuille. En revanche, un scénario de rachat de la banque constitue un facteur favorable. Et la réglementation bancaire européenne sur le traitement du « badwill » (goodwill négatif, lorsque la valeur de la banque est inférieure au montant des fonds propres) est plutôt favorable aux opérations de fusion.

Le rachat de la Société Générale a toujours été un scénario jugé crédible depuis son échec sur Paribas en 1999, finalement racheté par la BNP. Le projet le plus abouti fut sans doute celui d’une fusion avec la banque italienne Unicredit juste avant la crise financière de 2007. Un projet finalement avorté par l’affaire Kerviel et la crise des subprimes qui rendaient la réalisation de la fusion trop risquée. Cependant, ce scénario a dû faire surface sans progrès concrets. La fusion était jugée trop compliquée à réaliser et le gouvernement italien s’était déjà montré assez hostile.

Souveraineté européenne

Aujourd’hui, le contexte est différent. Tout d’abord, les banques européennes n’ont jamais été aussi solides et rentables. Ensuite, les régulateurs européens militent depuis des années pour accélérer les consolidations transfrontalières et ils ont mis en place des outils réglementaires pour faciliter ces opérations. Enfin, la question de la souveraineté européenne a pris une place importante dans le discours politique.

Ce n’est pas un hasard si Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, parle à nouveau d’union bancaire et d’union des marchés des capitaux, tout comme les autorités européennes. Mais la résistance aux rapprochements majeurs reste forte, comme en témoigne la position du gouvernement espagnol. A l’inverse, le gouvernement suisse n’a pas hésité une seule seconde en faveur de la fusion (sauvetage) du Crédit Suisse avec l’UBS.

Le président Macron souhaite donc avancer sur les questions financières. Mais il n’est pas sûr que ce soient des sujets prometteurs pour les prochaines élections européennes.