Le sélectionneur de l’équipe de France dirigera samedi son 537e match à la tête des Bleues, en finale olympique. Alors qu’il avait annoncé son départ après les JO, il pourrait prolonger le plaisir jusqu’à la fin de l’année.
La victoire après prolongation contre la Suède en demi-finale ? « En termes de scénario, c’est le plus extraordinaire de ma carrière ». Pourtant, à 66 ans et 536 matches à la tête de l’équipe de France féminine de handball, Olivier Krumbholz a connu quelques succès obtenus sur le fil. C’est lui qui a mené l’équipe de France féminine à son premier titre mondial (2003), européen (2018) et olympique (2021).
Il était déjà à leur tête le 12 décembre 1999, lorsque les Bleus atteignirent la finale de la Coupe du monde, sa première au niveau international et acte fondateur pour le handball féminin français. L’ancien entraîneur des juniors était là depuis un an, déjà connu en coulisses pour son intransigeance avec ses joueuses.
« Il était dur, il ne nous laissait pas faire grand chose sur et en dehors du terrain. Il n’était pas cool, mais si nous en sommes arrivés là, avec autant de médailles, c’est grâce à lui. »assure Valérie Nicolas, gardienne des Bleues de 1995 à 2008 et consultante pour France Télévisions. Cléopâtre Darleux, qui lui a succédé dans les buts, abonde : « À l’époque, on avait peur de lui »Il est difficile de croire que c’est l’homme que l’on voit aujourd’hui, parfois souriant et détendu parmi ses joueurs, dans leurs publications sur les réseaux sociaux.
« Olivier Krumbholz est un vin qui, au départ, est épicé, fort en bouche et difficile à travailler. Près de trente ans plus tard, il est devenu l’un des grands crus du sport français, peut-être le plus grand vin qui existe. » La métaphore est signée Philippe Bana, le président de la Fédération française de handball, qui savoure le travail accompli par le sélectionneur. « Ces titres enchaînés depuis les années 2010 (un titre olympique, trois titres mondiaux et un titre européen au total) et fait marcher désormais le handball français sur deux jambes, sa jambe masculine et sa jambe féminine ».
« Dans un environnement qui n’était pas professionnel, il a exigé, il a réglementé et il a professionnalisé. Son exigence et sa rigueur ont façonné le monde qui l’entourait. Oui, il a changé la façon dont évolue le handball féminin et ses joueuses. »
Philippe Bana, président de la Fédération française de handballà franceinfo : sport
Educateur avant de devenir sélectionneur, Olivier Krumbholz a su se métamorphoser pour durer, notamment après son retour à la tête des Bleues en 2016. Il avait été écarté trois ans plus tôt en raison du manque de résultats aux JO de Londres (5e) et à l’Euro 2012 (9e). Le temps d’une réévaluation et l’occasion d’adoucir son caractère volcanique pour reprendre les commandes de l’équipe, qui n’a rien gagné sous le mandat d’Alain Portes. « J’essaie de gérer l’autorité et la gentillesse de manière intelligente. Beaucoup de gentillesse, mais un peu d’autorité quand il faut remettre les filles au travail plus sérieusement », a-t-il expliqué lors du tour préliminaire du tournoi olympique de Paris.
Il sait désormais donner plus d’espaces à ses joueurs. « Il y a une part d’autogestion. Je sais désormais me mettre en retrait, les laisser construire certaines stratégies. Il ne faut pas oublier que ce sont eux qui jouent, l’important c’est de garder une mission de conseil. »il ajoute.
« Il évolue au même rythme que le handball d’aujourd’hui. Ce n’est plus le même handball, il est beaucoup plus offensif et rapide. Les joueurs sont plus talentueux, tout en étant physiquement plus forts. Et dans la prise de décision, c’est plus collaboratif qu’avant. »a observé Grâce Zaadi, l’une des joueuses françaises les plus capées depuis ses débuts en 2013, rencontrée en avril par franceinfo : sport.
Quelques semaines plus tard, la demi-centre, qui a tout gagné avec les Bleues, est appelée comme remplaçante pour les Jeux olympiques, avant de retrouver l’équipe grâce à la blessure de Léna Grandveau. Pour elle, comme pour Béatrice Edwige ou Allison Pineau, Olivier Krumbholz ne fait pas dans la sentimentalité. « Il croit que l’équipe est plus grande que la somme de ses individus.explique Philippe BanaIl n’hésitera pas à mettre des filles de 18-20 ans en finale d’un championnat du monde, comme il l’a fait avec Léna Grandveau. (20 ans) en décembre » lors de la Coupe du monde remportée face aux Norvégiens, que la France retrouve samedi.
Encore plus tôt, Pauletta Foppa avait débuté à 17 ans, en décembre 2018. « Je ne sais pas ce qu’il a vu en moi, parce que je n’ai pas beaucoup joué. (rires). Il doit avoir l’oeil pour ça, car depuis, j’ai accompli beaucoup de choses grâce à lui.souriait le pivot avant le tournoi olympique.
Discret à l’entraînement, même si rien ne lui échappe, le sélectionneur délègue aussi de plus en plus à son staff, dont son adjoint Sébastien Gardillou, architecte du projet de jeu offensif de l’équipe de France. Le natif de Périgueux (Dordogne) serait d’ailleurs en bonne position pour lui succéder, alors qu’Olivier Krumbholz avait annoncé en 2022 qu’il arrêterait après les JO de Paris. Mais, ces dernières semaines, le sélectionneur entretient le flou et ne répond plus par l’affirmative lorsqu’on lui demande si ce tournoi olympique est bien son dernier.
« Ce n’est pas le débat, on verra avec la Fédération ce qui est le mieux pour cette équipe »« Il serait possible qu’il ne reste pas loin du groupe pour l’Euro à la fin de l’année, comme une sorte de passation de pouvoir », a-t-il déclaré fin juillet. « Nous avons une carte dans notre manche. Il lui reste un an avant sa retraite définitive, nous allons donc le garder comme un bon vin pour expliquer aux invités comment cela fonctionne. »a déclaré Philippe Bana en avril.