Sébastien Lecornu accepte un retard du drone Européen Male
« Je dois vous avouer qu’il y a un retard dans le futur drone européen, le système moyenne altitude et longue endurance (Mâle) »Le ministre des Armées Sébastien Lecornu l’a expliqué aux sénateurs à la mi-octobre. Soit un an de retard pour l’Eurodrone, a-t-il précisé un peu plus tard lors de son audition au Sénat. De l’ordre d’un an, ce retard du programme, toujours sous le feu des critiques, a été approuvé par l’OOrganisation commune de coopération en matière d’armement (OCCAr). Sébastien Lecornu a également souligné qu’il en discuterait « avec les industriels concernés »dont le maître d’œuvre de l’Eurodrone, Airbus Defence & Space GmbH (Airbus Allemagne).
Le ministre a également estimé qu’il « Il va falloir se poser la question des sanctions »lié au programme Eurodrone. Ce qui ne devrait pas enthousiasmer Airbus, hanté par les dispositions répétées sur l’A400M. Néanmoins, le groupe européen s’est apparemment mis à l’abri de tout dérapage financier pour éviter de retomber dans le cauchemar de l’avion de transport militaire européen. La France a déjà signé un contrat pour l’achat de quatre systèmes (trois drones et deux stations au sol par système) et cinq années d’accompagnement sur les six prévues (1,8 milliard d’euros sur un total de 7,1 milliards d’euros). Dans le projet de financement 2025, le ministère prévoit de mobiliser 115 millions d’euros de crédits de paiement (contre 212 millions en 2024). L’Eurodrone doit progressivement succéder à l’Américain Reaper d’ici 2030.
Un retard qui peut encore être résorbé ?
Selon nos informations, ce retard, qui concerne la phase en cours, n’est pas encore considéré comme un retard définitif du programme (retard d’achèvement) : les constructeurs pourraient encore absorber tout ou partie de ce nouveau glissement de calendrier. Et, actuellement, l’OCCAr et les constructeurs réfléchissent à un plan de rattrapage pour livrer les premiers drones Male européens avant 2030, soit avant la fin de la décennie, date limite fixée par les pays clients. Plusieurs solutions, certaines classiques, s’offrent aux constructeurs : paralléliser certaines évolutions et créer des standards ou des marches comme l’A400M, le Rafale… Pour l’instant, sur l’Eurodrone, il n’y en a pas.
Mais, avec les encouragements des pays clients et de l’OCCAr, les constructeurs pourraient à terme s’orienter vers une approche un peu plus audacieuse en prenant des risques et en ayant une approche agile. Le tout sans attendre d’avoir un prototype 100% prêt pour réaliser un premier vol prévu en 2027 et la livraison d’un premier système en 2029. Un pari qui pourrait faire gagner du temps au programme. Cette méthode peut coûter plus cher aux fabricants en raison des risques inhérents mais, au final, leur fait gagner du temps. Ce qui permettrait aussi d’économiser de l’argent…
Pour Sébastien Lecornu, « L’enjeu est désormais de fournir aux forces un drone qui soit toujours d’actualité d’un point de vue opérationnel. C’est aussi un des points de conversation qu’il faut avoir avec les différents partenaires ». L’objectif principal de la France est de disposer d’ici 2030 d’une capacité de drones MALE déployables pouvant être utilisés souverainement et sans contraintes dans les zones d’intérêt pour mener des missions de type ISTAR (Renseignement, Surveillance, Acquisition d’objectifs et Reconnaissance) et de neutralisation d’objectifs militaires.
Arrêter ou redéfinir le programme ?
Mais le ministre des Armées est allé un peu plus loin sur l’avenir de l’Eurodrone : faut-il l’arrêter ou le redéfinir ? Pour l’heure, aucun des pays du programme, rejoint par le Japon fin 2023, n’a jeté l’éponge (Allemagne, Espagne, France et Italie). Relancé par le président de la commission des affaires étrangères et de la défense Cédric Perrin sur l’impact financier d’une prochaine décision sur ce programme, Sébastien Lecornu a répondu : « Quoi qu’il arrive, il y a un impact financier dans un sens ou dans l’autre : soit on décide d’abandonner unilatéralement – je suis conscient du choc de ce que je dis – et par définition, cela peut coûter autant que si vous commandiez réellement l’article. ; soit nous décidons collectivement d’élaborer le programme”. Et le ministre a même évoqué dans la version audio de l’audience « une redéfinition du programme ».
Aujourd’hui, les forces aériennes des pays clients pourraient effectivement demander à l’OCCAr de travailler sur une évolution du programme Eurodrone. Et plus précisément en ajoutant des missions liées à de nouveaux besoins, qui n’avaient pas été identifiés initialement par les opérationnels. Les constructeurs répondent actuellement aux questions des forces aériennes. Pour le moment, ces projets restent encore à l’état de réflexion. Mais, avec l’Eurodrone, on n’est jamais sûr de la fin de l’histoire… D’autant que le drone européen est un expert des turbulences !