Sans Internet, le Bangladesh ne peut plus fournir de services aux entreprises étrangères

Les autorités bangladaises ont toutefois largement coupé jeudi l’accès à Internet pour empêcher les manifestations contre les quotas de recrutement de la fonction publique – qui ont fait au moins 174 morts selon un décompte de l’AFP mardi 23 juillet. Le secteur a, selon la profession, perdu 7 millions de dollars par jour depuis le début des coupes.

Il nous a fallu dix ans pour constituer une clientèle de 150 entreprises, et j’ai peur de les perdre toutes en quelques jours.

Internet a été progressivement rétabli mardi soir, comme l’avait promis peu auparavant le ministre des Télécommunications Junaid Ahmed Palak, mais le réseau mobile, largement utilisé par les manifestants, restait coupé.

Les professionnels de l’externalisation estiment qu’il est déjà trop tard. Ils craignent que leurs concurrents indiens, philippins et vietnamiens ne leur volent leurs clients. « Il nous a fallu dix ans pour constituer une base de clientèle de 150 entreprises, et j’ai peur de les perdre toutes en quelques jours », a déclaré Monir Hosen, directeur général de la société de centres d’appels Creative Clipping Path, qui emploie environ 300 personnes. « La réputation du Bangladesh sera ternie à jamais », a-t-il déclaré.

Réputation ternie

« Lorsqu’un retard de cinq minutes n’est pas acceptable dans ce type de travail, une panne complète est franchement un désastre », déplore Fahim Mashroor, entrepreneur en technologie et ancien président de l’Association des logiciels et des services d’information du Bangladesh.

Sa société Bdjobs.com fournit des services offshore à des clients dans 13 pays, dont le fabricant allemand de vêtements de sport Puma et la marque de mode suédoise Ellos. « Toutes nos communications se font par e-mail. Lorsque l’internet a été soudainement coupé, nous n’avons pas pu informer le client de notre situation », explique-t-il.

Zayed Uddin Ahmed, le patron d’ASL, qui fournit des services de back-office à deux grands clients européens, estime qu’il devra fermer ses portes et licencier ses 200 employés. Les clients étrangers exigent un service ininterrompu pour la communication, le traitement des données et les paiements en temps réel, explique-t-il. « Ils dépendent de nous 24 heures sur 24 et si nous ne leur fournissons pas ce dont ils ont besoin, ils se tourneront vers nos concurrents dans les pays voisins », estime-t-il. « L’ampleur des pertes est incommensurable ! »

« Si le client devait annuler son contrat avec nous à cause d’une panne d’Internet, tous les membres de mon équipe perdraient leur emploi », explique Jannati Tazrimin, formatrice dans son entreprise. « Je ne suis pas la seule. La peur de perdre son emploi s’est emparée de toute l’équipe ! »

« La Somalie et le Nigéria sont déjà apparus et ce sont des concurrents coriaces, proposant des prix plus bas »

« La Somalie et le Nigeria ont déjà émergé et ce sont des concurrents coriaces, proposant des prix plus bas », explique Humayun Kabir, responsable de production chez Creative Clipping Path, une entreprise spécialisée dans le traitement d’images pour les sites de commerce électronique.