Russie : comment Moscou exporte des céréales des régions ukrainiennes occupées vers des pays d’Europe et d’Asie
Petits pois pour l’Espagne, blé pour la Turquie, orge pour l’Iran… Autant de denrées alimentaires en provenance des territoires ukrainiens occupés que Moscou s’engage à livrer discrètement depuis 2022 aux entreprises du monde entier.
Selon une enquête menée par Radio Free Europe, KibOrg, le Centre d’investigation biélorusse et Vertska sur la base de documents officiels russes, plusieurs dizaines de milliers de tonnes de produits agricoles pourraient être repérées en route vers des ports européens ou asiatiques, au sein d’un réseau vraisemblablement plus large. .
Les céréales, une production ukrainienne incontournable
La Russie et l’Ukraine sont historiquement de grands producteurs de céréales. Selon le ministère américain de la Défense, en 2021, les produits agricoles représentaient 41 % des exportations ukrainiennes, pour une valeur de quelque 27,8 milliards de dollars. Le pays est alors le 5ème exportateur de blé, le 3ème d’orge, le 4ème de maïs et même le premier d’huile de tournesol. Le Tchernozyom, ou « terre noire », un type de sol riche en humus très favorable à l’agriculture et très présent en Ukraine, est l’une des raisons pour lesquelles l’agriculture du pays est compétitive, alors que les salaires y sont très bas par rapport aux standards. Européens.
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L’occupation russe a cependant porté un coup dur à cette industrie dynamique. Selon le Centre d’études stratégiques et internationales, les régions occupées de l’Ukraine, hors Crimée, représentaient 21 % du blé, 17 % de l’orge et 19 % des graines de tournesol produites par l’Ukraine entre 2016 et 2020. Quant aux champs abandonnés en 2023, à cause de la guerre, ils représentaient environ 7,5 % de l’ensemble du pays, selon NASA Harvest, le programme de sécurité alimentaire et agricole de l’organisation spatiale.
Le conflit provoqué par Moscou est donc une catastrophe pour un secteur vital de l’économie ukrainienne, qui doit se restructurer malgré l’exode de sa population, les pertes matérielles et humaines et l’investissement de ressources dans l’effort de guerre. .
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Des droits de douane permettant de respecter les exportations de céréales
Mais la Russie profiterait de la situation pour vendre au reste du monde les céréales ukrainiennes des régions occupées, selon l’enquête de Radio Free Europe et ses associés. Les traces de ces transferts de céréales des régions occupées sont visibles depuis 2022 via des images satellites : au moins 6,4 millions de tonnes de blé ont été récoltées dans les régions occupées d’Ukraine en 2023, sans compter les autres céréales. Selon SeaKrime, une organisation ukrainienne traquant les expéditions de céréales ukrainiennes utilisées par la Russie, au moins 2 millions de tonnes de cette récolte ont été envoyées à l’étranger via les ports de Crimée.
Mais des données précises sur ce trafic pourraient être collectées dans la région de Kherson. Les autorités d’occupation de cette zone ont en effet donné à une dizaine d’entreprises des autorisations de réduction des droits de douane concernant des produits agricoles : les documents officiels stipulant ces autorisations permettent donc de recueillir des informations sur les entreprises qui en font la demande et les marchandises qu’elles souhaitent transporter.
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6,2 millions d’euros de produits agricoles ont été expédiés depuis cette région en 2023 à tarifs réduits ou sans droits de douane. Les destinations de ces cargaisons sont surprenantes : une cargaison de la société russe Agro-Fregat s’est ainsi retrouvée en Espagne, qui a obtenu 2 674 tonnes de pois transitant par le port de Sébastopol, et achetées par la société espagnole Cereales Y Harinas Garsan.
Une partie du trafic de céréales ukrainiennes
La Turquie, pays qui maintient une position ambivalente sur le conflit en Ukraine, a reçu de son côté 9 554 tonnes de blé et de méteil (un mélange de céréales) à taux réduit en juin et juillet 2023.
Parmi les autres pays cités par l’enquête, on retrouve l’Azerbaïdjan, l’Iran, ou encore la Syrie. Dans chaque cas, les compagnies sont basées sur le territoire russe, comme Moscou ou Rostov-sur-le-Don, mais exploitent en réalité les infrastructures des territoires occupés, comme le port de Sébastopol, pour transférer leurs marchandises.
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Bien que ce trafic ait déjà des proportions impressionnantes, il ne représente probablement qu’une partie des quantités réelles de céréales ukrainiennes vendues par Moscou. Outre Kherson, la Russie a accès à une partie des régions de Zaporizhia, Lougansk, Donetsk et Crimée, où la méthode utilisée par l’équipe de Radio Free Liberty pour suivre les expéditions de céréales n’est pas applicable.