Déjà monstrueux joueur du XV, le demi de mêlée toulousain a réussi son pari fou de devenir champion olympique à Paris. La saison qu’il vient de réaliser est tout simplement exceptionnelle.
Au Stade de France
Seulement sept minutes de jeu, suffisantes pour marquer deux essais et délivrer une passe décisive au terme d’une course effrénée de 40 mètres. Antoine Dupont, entré en jeu à la mi-temps de la finale olympique contre les Fidji, a mis le Stade de France à genoux. « C’est fou ! C’est difficile de trouver les mots quand on a la chance de vivre des émotions comme celles-là, « J’ai hâte de voir ce que je vais faire. Je suis très content de voir que nous sommes tous ensemble …
Après un début de match tendu, et un essai fidjien encaissé rapidement, les Français n’ont pas lâché. Ils n’ont pas paniqué. « On savait que physiquement, on serait meilleurs qu’eux à la fin du match.affirme le demi de mêlée et capitaine du XV de France. On a travaillé très dur. On a aussi des principes de jeu très solides qui ont été efficaces si on les respectait. L’état d’esprit de l’équipe était remarquable et au fur et à mesure du match, on s’est dirigés vers cette victoire. »
Déjà incontournable dans le monde du rugby à XV, celui qui a été élu meilleur joueur du monde en 2021 a réussi son incroyable défi de devenir champion olympique à domicile. Devant le monde entier. Comme les plus grands athlètes de la planète. L’hommage a été signé par la légende des All Blacks Dan Carter : « Beaucoup de gens sous-estiment la difficulté de passer du XV au 7, donc le fait que Dupont soit capable de le faire sans problème et de réussir immédiatement montre à quel point il est un athlète incroyable. »
Le Toulousain conclut cette longue année, débutée par la préparation de la Coupe du monde 2023 en France, avec un palmarès hors du commun : champion d’Europe et de France avec Toulouse, champion du monde et olympique avec France 7. « C’est exceptionnel bien sûr, mais c’est toujours difficile de se rendre compte des choses quand on est à l’intérieur, il se confie humblement, fidèle à lui-même. Il faut savoir savourer. Là, on vit vraiment l’instant présent. On va profiter de celle-là et j’aurai tout l’été pour regarder en arrière et profiter du reste.
Antoine est une personne très humble, même s’il peut être vaniteux en raison de son statut.
Jean-Pascal Barraque
Grâce à la bonne entente entre le Stade Toulousain et la Fédération Française de Rugby, le joueur gersois a pu se consacrer pleinement à son projet olympique. Il a fait la navette entre les Rouge et Noir et les Bleus à 7. Il a bénéficié de périodes de repos spécialement aménagées, ce qui lui a valu, de son propre aveu, moins de temps de jeu que les saisons précédentes. Il a pu s’intégrer facilement au groupe à 7. « Antoine est une personne très humble, même s’il peut être vaniteux en raison de son statut, affirme son coéquipier Jean-Pascal Barraque. C’est quelqu’un de très calme, sûr de lui. Il ne veut pas forcément se mettre en avant, il le fait grâce à ses qualités. Les projecteurs braqués sur lui, il n’y est pour rien et ça nous donne une bonne image aussi. »
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Jérôme Daret, son entraîneur qui quittera son poste après un titre olympique, revient sur son adaptation réussie. « Il est arrivé avec beaucoup d’humilité, pour se remettre en question aussi. Il a envoyé un signal fort à cette équipe : « Je veux venir avec toi pour devenir champion olympique. » « Quand le meilleur joueur du monde vous dit ça, ça dépasse les bornes, dit-il. Il est arrivé sur la pointe des pieds mais aussi avec quelques craintes, il ne savait pas comment ça allait se passer. Mais je savais que ça allait marcher. »
Et pour revenir à son choix tactique de l’utiliser comme « joueur d’impact » : « Il a fallu faire entrer Antoine dans la compétition petit à petit. Le rugby à 7 ne s’improvise pas. Il faut y aller à doses homéopathiques. Quand on est sur le banc, on apprend tout autant, c’est important d’être un observateur et un auditeur actif. Il faut apprendre des qualités des autres joueurs. Et il a tout de suite répondu favorablement. Il y a aussi un volet stratégique, où il faut cacher son jeu et sortir les bons coups au bon moment. J’ai décidé de le coacher à la mi-temps, même s’il y avait un risque si un autre joueur se blessait. C’est un jeu d’échecs. » Échec et mat pour les Fidjiens, qui n’avaient jamais perdu aux JO et avaient remporté 17 matchs d’affilée depuis 2016.
« On s’est rendu compte qu’on représentait le rugby, mais aussi tout le sport français en général. »
Le rugby français a lancé la délégation française en remportant cette première médaille d’or. « Nous voulions lancer les Jeux Olympiques de la meilleure des manières. C’était déjà bien fait avec la cérémonie d’ouverture (Vendredi) et nous savons aujourd’hui que nous avons un rôle à jouer dans ce domaine. Cela nous a fait avancer », savoure Antoine Dupont. En racontant sa visite au village olympique : « On s’est rendu compte qu’on représentait le rugby, mais aussi tout le sport français en général. Quand on rentre dans le village, l’esprit olympique vous imprègne et le patriotisme revient au premier plan. »
Il est désormais temps de faire la fête et surtout de prendre des vacances bien méritées. « Je vais me reposer parce que j’en ai besoin physiquement et mentalement, il avance. Je m’étais fixé beaucoup d’objectifs pour cette année, qui se sont tous réalisés. J’ai eu beaucoup de chance que les choses se soient passées ainsi. Maintenant, je vais pouvoir profiter et me reposer un peu au soleil. » Avant de se lancer dans d’autres défis, Antoine Dupont n’aura que 28 ans en novembre.