Alors que le 8 mai résonnait des 80 ans de la victoire sur le IIIe Reich et l’élection de Léon XIV, un traité commercial entre le Royaume-Uni et les États-Unis s’est forgé loin des regards. En effet, les deux puissances ont scellé un accord commercial qualifié d’« historique » par le Premier ministre britannique Keir Starmer, marquant une étape clé post-Brexit. Cet accord, axé sur la réduction des droits de douane, vise à renforcer les liens économiques entre Londres et Washington, notamment via des concessions sur l’acier, l’automobile et les produits pharmaceutiques. Annoncé comme une trêve dans la guerre commerciale lancée par Donald Trump, il laisse toutefois place à des réserves, notamment chez les conservateurs britanniques. Pour la France et l’UE, les implications économiques restent ambiguës, entre chances et risques de déséquilibre concurrentiel.
Réserves conservatrices et ambiguïtés de l’accord
Les détails de l’accord, encore en cours de finalisation, suscitent des critiques, outre-Manche. Kemi Badenoch, chef des conservateurs britanniques, a dénoncé un deal désavantageux, estimant que « le Royaume-Uni s’est fait avoir ». Selon elle, les concessions britanniques, comme la baisse des tarifs douaniers de 5,1 % à 1,8 % sur les biens américains, risquent de fragiliser certains secteurs face à la concurrence. En contrepartie, les États-Unis maintiennent une taxe de 10 % sur les importations britanniques, un compromis perçu comme asymétrique par les Tories.
L’accord soulève également des questions sur les normes agricoles. Keir Starmer a insisté sur le maintien des standards britanniques, refusant d’importer des produits comme le poulet chloré ou le bœuf hormoné américain. Une fermeté qui ne serait que de façade, puisque les conservateurs craignent que cet accord, présenté comme un « document de conditions générales », ne soit qu’un prélude à des concessions plus lourdes, notamment dans le domaine technologique, où Londres envisage de revoir sa taxe sur les services numériques.
Répercussions pour la France et l’Union européenne
Pour l’économie française, cet accord accentue la pression concurrentielle, en particulier dans le secteur automobile – où l’Hexagone se trouve déjà dominé par ses pairs européens. Les exportations automobiles britanniques, représentant plus d’un quart des ventes vers les États-Unis en 2024, bénéficieront de tarifs réduits à 10 %, contre 25 % initialement prévus par Trump. Une politique qui renforcerait donc la compétitivité des constructeurs britanniques, comme Jaguar Land Rover (détenu par le groupe indien Tata Motors), face à leurs homologues français (avec Stellantis) et plus encore leurs concurrents allemands (13 % des voitures allemandes vendues à l’export l’ont été vers les États-Unis), sur le marché américain. Par ailleurs, la levée des surtaxes américaines sur l’acier britannique risque de désavantager les producteurs français, déjà confrontés à une concurrence mondiale accrue.
Exclue de cet accord, l’Union européenne fait face à un défi stratégique. Au moment où Trump desserre le poing pour d’éventuelles négociations, Bruxelles menace de taxer 95 milliards d’euros d’importations américaines, visant des secteurs comme l’automobile et l’aéronautique. Dans un document de 218 pages publié le jour même de cet accord, la Commission européenne a dégainé une liste à la Prévert de produits susceptibles d’être surtaxés à l’importation allant des avions aux automobiles tout en passant par les parapluies et autres viandes de baleine… Reste à savoir quelle attitude adoptera Trump en réponse et quels fruits pourraient bien tirer les États membres de l’UE de ces perpétuels haussements de ton.