Nouvelles

« Royaume-Uni, du Brexit à « Bregret » », sur France 5 : chronique d’un grand désamour

Michel Barnier, ancien négociateur en chef de l'Union européenne, en 2016, chargé de mener les négociations sur le Brexit. Image extraite du documentaire

FRANCE 5 – DIMANCHE 15 SEPTEMBRE À 21H05 – DOCUMENTAIRE

Huit ans après avoir voté pour quitter l’Union européenne (UE), les Britanniques n’en ont pas fini avec le Brexit. Si la question a curieusement été peu débattue lors des élections générales britanniques de juillet, qui ont ramené le parti travailliste au pouvoir, c’est que le fossé creusé par le référendum de 2016 reste béant et les conséquences politiques explosives dans un pays qui se targue de sa stabilité et de sa modération.

Lire l’éditorial (en 2023) : Le Royaume-Uni au temps du « Bregret », trois ans après la mise en œuvre du Brexit

C’est le mérite du documentaire captivant réalisé par Thomas Johnson et écrit avec Eric Albert, journaliste à Mondeque de décrire et d’analyser les dégâts profonds causés par le Brexit sur le long terme. Une économie freinée, une réputation internationale écornée, un chaos politique… Les conséquences néfastes de la rupture du Royaume-Uni avec ses voisins européens sont amplement documentées et ressenties, au point qu’une majorité de Britanniques regrettent aujourd’hui ce choix. Un nouveau terme a été inventé pour décrire cette tendance : « Bregret » (une combinaison de « Brexit » et de « regret », « Brexit regret »).

Mais le Brexit a eu une conséquence d’un autre ordre dans l’opinion publique : une perte accélérée de crédit auprès des dirigeants politiques et des institutions et un large sentiment de trahison. A l’amertume, voire à l’aigreur, de la moitié des électeurs qui avaient voté pour le maintien dans l’UE, s’est ajoutée la colère des Brexiters, l’autre moitié des citoyens britanniques qui avaient cru aux promesses insensées de Boris Johnson et ont vite déchanté.

Un énorme gaspillage

Le film traduit clairement ce double ressentiment : celui des petits pêcheurs, électeurs pro-Brexit en 2016 à qui on avait promis la lune, mais dont le déclin a été précipité par le Brexit, et celui des jeunes pro-européens dont les horizons se sont rétrécis et qui se sentent « prisonniers d’une décision prise par des personnes âgées ». « Nous avons tous été trompés »résume un professeur de danse pittoresque dans le documentaire.

Que peut-il sortir de cet immense gâchis ? Le Brexit ressemble à une cruelle opération de vérité : privés de la démagogie qui consistait à imputer tous les maux à Bruxelles, les conservateurs au pouvoir se sont retrouvés en première ligne avec leurs mensonges. Ils ont montré qu’ils n’avaient pas la moindre idée de la manière de gérer l’après-Brexit. Et que leurs promesses − « reprendre le contrôle », « La Grande-Bretagne mondiale »etc. – n’étaient que des slogans creux. Même le remplacement du clown et menteur Boris Johnson par le « sérieux » Rishi Sunak n’a rien changé à la situation.

Regardez la vidéo « L’histoire du Brexit en vidéo, épisode 1 » (en 2019) : Le pari raté de David Cameron

La force de ce documentaire est de montrer que la désillusion née de cette impressionnante liste de promesses non tenues a non seulement accéléré le divorce entre l’opinion publique et la politique, mais aussi favorisé la radicalisation du Parti conservateur et renforcé l’extrême droite, avec de profondes conséquences sur le paysage politique.

Certes, l’alternance politique a été à l’avantage du Labour. Mais l’élection au parlement en juillet de Nigel Farage, principal artisan du Brexit, et les émeutes anti-musulmanes de juillet fomentées par l’extrême droite montrent à quel point les forces du repli et de la haine pèsent désormais sur le pays.

« Colère populaire »

Sur ce point, on écoute attentivement l’apparition dans le film, en tant que chef des négociateurs du Brexit, du nouveau Premier ministre français, Michel Barnier. Il cite « colère populaire » comme première cause du non britannique en 2016. Et invite à « Ne confondez pas le populisme avec le besoin d’écouter, de comprendre » cette colère et« réponds-y ».

Dans cette image dérangeante mais riche, On regrettera cependant l’absence d’analyse de la position du Labour, désormais aux commandes, sur l’Europe. Les apparitions trop fréquentes de Tony Blair, électron libre perspicace mais totalement dévalorisé dans son pays, n’en disent rien. Les raisons pour lesquelles les Britanniques, bien qu’ayant changé de ton sur le Brexit, semblent loin de frapper à nouveau à la porte de l’UE sont également passées sous silence.

Les Ateliers du Monde

Cours en ligne, cours du soir, ateliers : développez vos compétences

Découvrir

Le nationalisme anglais, l’insularité et le sentiment d’exceptionnalité britannique sont évidemment loin d’avoir disparu avec la désillusion née de la rupture avec le continent. Sans parler de la fierté, tempérée, il est vrai, par l’humour anglais. « Nous avons fait un mauvais choix, mais nous nous y tenons. Sinon, nous passerons pour des idiots. », Selon Rachel Johnson, la sœur pro-européenne de l’ancien Premier ministre. Pour conclure : « Mais c’est déjà le cas de toute façon. »

Royaume-Uni, du Brexit au « Bregret »documentaire de Thomas Johnson et Eric Albert (Fr.-RU, 2024, 70 min). Diffusé dans le cadre de l’émission « Le Monde en face », sur France 5, et disponible en replay sur France.tv.

Réutiliser ce contenu

Eleon Lass

Eleanor - 28 years I have 5 years experience in journalism, and I care about news, celebrity news, technical news, as well as fashion, and was published in many international electronic magazines, and I live in Paris - France, and you can write to me: eleanor@newstoday.fr
Bouton retour en haut de la page