Arrivé cet été à Marseille, Roberto De Zerbi a attiré bien plus que la curiosité. Intriguant à Sassuolo, courageux au Shakhtar, il a ensuite été scruté sous toutes les coutures à Brighton au point de faire craquer Manchester United et l’OM. Il dit avoir choisi la ville marseillaise pour l’ambiance du Vélodrome, mais peut-être que l’ambitieux entraîneur italien était aussi certain qu’il réussirait à mettre la Ligue 1 à ses pieds en imposant son style. Après onze journées, son équipe est troisième, à neuf points du leader parisien. Rien d’alarmant d’un point de vue comptable. Mais quant au contenu, tout reste à prouver. Des lancers de ballon innovants sont souhaités, le public marseillais s’impatiente parfois de la possession servant plus à limiter les risques qu’à en créer et le plaisir prôné par l’entraîneur dans tous ses anciens clubs n’est pas encore au rendez-vous. -TOI.
Après la lourde défaite à domicile infligée par Auxerre (1-3) vendredi, l’Italien a montré une autre facette de sa personnalité, plus volcanique : « Si je suis le problème, je peux y aller. Je laisse l’argent et rends mon contrat. » Après avoir baissé un peu, il a publié une autre déclaration significative : « Je suis venu à Marseille pour le Vélodrome. Et je n’arrive pas à amener les joueurs ici à donner ce que je vois à l’entraînement et en dehors. Donc c’est ma faute, c’est ma responsabilité. » Roberto De Zerbi se casse-t-il les dents sur notre bonne vieille Ligue 1, avec ses blocs compacts et ses transitions ? Parfois décrié et réduit à l’étiquette de « Ligue des agriculteurs »le championnat de France reste très difficile à comprendre.
D’autres ont dû s’adapter
Avant lui, plusieurs entraîneurs étrangers ont également dû suivre un apprentissage, qui n’a pas toujours été couronné de succès. Passé par l’OM entre 2021 et 2022, Jorge Sampaoli peut en témoigner puisqu’il a été contraint de troquer son jeu ultra-énergique pour des phases beaucoup plus calmes pour éviter que son équipe ne soit prise dans le dos. Lors d’un entretien avec Samir Nasri, en avril 2022, pour Canal+, l’Argentin expliquait sa démarche : « Cela fait déjà un an et un mois que j’essaie de jouer un football que vous savez, différent de ce qui se fait dans ce pays. Essayer d’imposer une autre idée de jeu est un défi pour moi. » Avant cela, il avait été vacciné de force par une victoire de Lens au Vélodrome (2-3) en début de saison au cours de laquelle son équipe s’est jetée dans la gueule du loup de sang et d’or dont le pressing était parfaitement rodé. « Nous luttons contre ce football de transitions, où de nombreuses équipes seront meilleures que nous. Pour cela, nous cherchons à contrôler le jeu »» a-t-il proclamé après cet échec, comme pour faire comprendre que les mouvements incessants dans la moitié de terrain adverse allaient être progressivement remplacés par la rétention du ballon dans les pieds de Pau López pour enfin retrouver ces foutus espaces.
Comme Jorge Sampaoli ou Roberto De Zerbi, Francesco Farioli, entraîneur de l’OGC Nice lors de la saison 2023-2024, est arrivé avec l’étiquette de technicien passionnant et a laissé de nombreux spectateurs en redemander. Si le Gym termine cinquième et que les plans tactiques de l’Italien étaient souvent intéressants, c’est surtout la stratégie défensive qui a déçu ceux qui s’attendaient à des envolées offensives. Alors que Nice n’a marqué que 1,18 but par match en Ligue 1, l’Ajax Amsterdam du même Farioli en est aujourd’hui à 2,27 buts par match en Eredivisie, un championnat plus ouvert où son équipe a plus de profondeur. De son côté, Paulo Fonseca a lui aussi dû se creuser la tête pour arrêter d’attaquer en vain et permettre à son LOSC de laisser une trace dans l’histoire récente du pays.
Inspiration Bielsa
Partout où il est passé, Roberto De Zerbi a essayé de proposer un football divertissant, mais cela ne s’est pas encore vu en France. Si l’OM est actuellement la deuxième équipe du championnat à toucher le plus de ballons en défense et au milieu, il n’est que septième en zone offensive et dixième dans la surface adverse. Avec 24 buts inscrits en 11 matches, l’équipe phocéenne n’est pas forcément ennuyeuse, mais ne coche pas encore les cases promises à l’arrivée du nouvel entraîneur. Victime de fuites de toutes parts face à Auxerre, Marseille avait auparavant été asphyxié par le pressing lyonnais (avant de s’imposer miraculeusement), contraint de s’allonger sans cesse face à Strasbourg, sans compter la faiblesse affichée face à Paris. Plutôt que de s’inspirer de Sampaoli, Farioli ou Fonseca, De Zerbi a décidé de citer une idole marseillaise après la défaite face au RCSA : « Marcelo Bielsa, l’un de vos anciens entraîneurs, a dit qu’on apprenait de la défaite. Et je pense que nous allons apprendre beaucoup de celui-ci. » Or, l’OM a déjà perdu trois fois et son entraîneur devra s’imprégner davantage des coutumes locales pour espérer durer plus longtemps que tous les entraîneurs passés récemment sur ce banc.
Mehdi Benatia félicite Roberto De Zerbi