Ride or Die – critique aussi fatiguée que Will Smith
Sans Michael, la fête est moins folle
Au bout du Mauvais garçons 4une question se pose : la saga a-t-elle vraiment un potentiel de franchise ? égal à la plupart de ses camarades hollywoodiens, de Marvel à parc jurassique En passant par chasseurs de fantômes ? Rien n’est moins sûr, surtout quand on voit à quel point ce quatrième opus s’accroche plus que jamais aux rares motifs des scénarios en roue libre depuis les années 90. C’est bien beau de reproduire (pour la troisième fois !) la séquence où Mike et Marcus attaquent le pauvre Reggie – transformé le temps d’un twist forcé en machine de guerre –, mais ça sent surtout le fond.
La marque » Mauvais garçonsce ne sont pas ses personnages, mais ce que Michael Bay en a fait depuis le premier film. Derrière le buddy movie mécanique typique des productions de Jerry Bruckheimer, le cinéaste avait déjà imposé sa signature, sa manière de compresser le temps à travers son esthétique publicitaire, qui transforme le moindre plan en un plan financier époustouflant. Dans ce Miami où le soleil ne semble jamais se coucher, tout a été fait pour iconiser Will Smith et Martin Lawrence.
On parle souvent du montage de Michael Bay, de son côté très haché et frénétique, mais ce qui est intéressant c’est son hétérogénéité. Chaque mouvement, chaque instant demande à être remarqué dans le flux ininterrompu des images, comme si l’on recomposait une série de gestes dans le grand chaos du monde. Le moment de son introduction, Mauvais garçons 4 J’aimerais embrasser ce fait à grands coups de plans fous et improbables, depuis une caméra embarquée sur un revolver jusqu’à un insert depuis l’intérieur d’une montre. C’est gratuit, et pas très virtuose, mais pour un instant, le film convoque cette franchise de découverte, d’expérimentation et de wow bayien.
Certes, l’auteur de ces lignes est depuis longtemps un fervent défenseur du directeur deArmageddonmais l’échec de Mauvais garçons 4 n’est pas une affaire privée. Raconter de nouvelles histoires autour de Mike Lowrey et Marcus Burnett pourrait avoir un sens dans une Amérique de plus en plus bling-bling, vulgaire, individualiste et violente. Il fallait cependant différencier ce revival, plutôt que de chercher bêtement à reproduire son cadre stylistique dans sa version low-cost.
De Bataille navale au redémarrage tortues Ninja, l’imagerie ultra-dynamique de Bay a imprégné Hollywood, sans que personne ne puisse l’égaler. Mine de rien, effet de lumière dynamique, téléobjectif et ralenti ne suffisent pas à convoquer la même ampleur et la même dimension épique. Là où Mauvais garçons 3 s’est contenté de désamorcer certains de ses passages obligés, sa suite s’aventure dans des citations pathétiques, notamment lors de sa première grande scène d’action, miroir assumé de la course-poursuite qui concluait le deuxième acte du premier volet. Will Smith tourne toujours au ralenti, mais semble très fatigué, et on a droit à la version sans sucre ajouté de la marque de fabrique du cinéaste : son travelling circulaire autour des deux héros qui se lèvent, cette fois garanti sans aucun arrière-plan prévu pour donner corps à la longue focale et au mouvement de l’appareil photo.
Deux viks à Miami
De là, le long-métrage n’est qu’une série d’aveux d’échec, coincé entre ses aspirations de blockbuster old-school (pour ne pas dire réactionnaire) et ses touches de modernisation qui tombent comme un soufflet. A quoi bon embaucher de jeunes cinéastes si leur seule idée nouvelle est de reproduire les plans de drone que Michael Bay a imposés à l’industrie avec Ambulance ?
Peut-être qu’au fond, Adil El Arbi et Bilall Fallah ont compris ce qui a toujours été Mauvais garçons : la possibilité de tester les limites du bon goût et des techniques cinématographiques à travers la singularité de certains outils. Mais faute d’une vision épurée de cet univers surréaliste (dont on retiendra juste une amusante séquence de combat en hélicoptère), le tout baigne dans une avarice fade, comme un soda coupé avec de l’eau. Dans le domaine du recyclage, mention spéciale à la musique de Lorne Balfe, qui copiait visiblement les bongos de Mission : Impossible 6 dans sa partition échantillonnée.
Résultat, ceci Mauvais garçons 4 frustré par son incapacité à choisir une direction claire. Quitte à ne pas jouer le rôle d’expérimentateur technique, autant lâcher prise lorsqu’il s’agit de beauferia décomplexée, exactement comme le joyau du nihilisme crasseux et vulgaire que constitue le deuxième épisode. Même là, Rouler ou mourir est finalement assez mince, hormis une incursion chez les rednecks suprémacistes. Pire encore, le scénario voudrait nous faire croire qu’il a quelque chose à dire sur les traumatismes policiers et le virilisme méga-toxique de nos deux héros en donnant à Mike des crises de panique.
Ce serait presque drôle si le concept ne se réglait pas par une gifle et un discours de motivation où il faut enterrer ses émotions pour le plaisir d’agir. Nous ne nous attendions pas Mauvais garçons une forme de progressisme sur la masculinité. C’est un peu comme le reste du film : il valait mieux ne pas essayer.