Respirer par les fesses : une découverte folle remporte un (presque) prix Nobel
Et si les narines ou la bouche n’étaient plus les seuls orifices du corps qui nous permettent de respirer ? Cette théorie, qui fait actuellement l’objet d’un essai clinique, est issue d’une étude menée par des chercheurs japonais. Leurs travaux, sur la captation de l’oxygène dans le rectum de certains animaux, ont d’ailleurs été récompensés par un prix Ig Nobel jeudi 12 septembre.
Les prix Ig Nobel sont une parodie des prix Nobel. Là où la version originale met en avant les plus belles découvertes, les Ig Nobel se veulent plus satiriques. Contraction des mots Nobel et « ignoble » (qui peut se comprendre par « négligeable » en anglais), ces prix mettent en avant des recherches considérées comme anecdotiques, et peuvent même être drôles, mais qui ont de réelles implications – si on s’y intéresse – dans leurs domaines respectifs.
Un essai clinique est en cours sur des volontaires humains
Une cérémonie s’est tenue à Cambridge (Massachusetts, États-Unis) pour désigner les 10 prix Ig Nobel de 2024. Elle se veut un apéritif humoristique et ironique pour la cérémonie beaucoup plus officielle du prix Nobel dans un mois en Scandinavie, rappelle The Guardian.
Cette année, des scientifiques japonais de l’Université médicale et dentaire de Tokyo ont vu leur étude publiée en 2021 dans la revue Med faire sensation en recevant le prix Ig Nobel de physiologie. Après avoir travaillé sur des souris, des rats et des porcs, les chercheurs tentent de savoir si les humains souffrant de difficultés respiratoires peuvent bénéficier d’une injection d’oxygène dans leur anus.
Comme toutes les recherches récompensées par un prix Ig Nobel, le sujet de recherche peut paraître farfelu. Pourtant, la respiration entérale (c’est-à-dire par les intestins) est une voie qui a émergé pendant l’épidémie de Covid-19. Si ces recherches aboutissent, cette nouvelle technique pourrait remédier au manque de respirateurs mécaniques, une ressource qui s’est avérée essentielle pendant la crise sanitaire. Un essai clinique de phase 1 est en cours sur des volontaires humains.
Un Français s’est distingué lors de la soirée. Le professeur Roman Khonsari, chirurgien cranio-facial à l’hôpital universitaire Necker-Enfants malades de Paris, a reçu le prix Ig Nobel d’anatomie. Ses recherches ont montré que sur le cuir chevelu, les cheveux tournent en spirale dans le sens des aiguilles d’une montre chez la plupart des gens. Cependant, le sens inverse est plus fréquent dans l’hémisphère sud.
La remise en question des études démographiques récompensée par un Ig Nobel
Si le professeur de français reconnaît « le manque de pertinence » de ses recherches, il défend toujours son travail :
Je suis convaincu que le déchiffrage des formes dans la nature peut conduire à des découvertes importantes sur les mécanismes fondamentaux du développement. Les formes sont porteuses d’une quantité intéressante d’informations.
L’autre Ig Nobel, le prix de démographie, est particulièrement risible, tout en soulevant un problème fondamental. Le Dr Saul Newman, de l’université d’Oxford, a réussi à mettre en évidence un paradoxe surprenant en mars 2024. Son étude a montré que les records de longévité provenaient de personnes originaires de régions connues pour leur faible espérance de vie. Surtout, ces régions ont la particularité de ne pas disposer d’actes de naissance systématiques, de commettre de nombreuses erreurs administratives, mais aussi d’afficher un taux record de fraude aux retraites.
Ces travaux remettent ainsi en cause la majorité des études sur le vieillissement des populations. « Les registres de l’extrême vieillesse sont un cas statistiquement désespéré »déclare Saul Newman. « Qu’il s’agisse de cas individuels ou de grandes tendances démographiques, pratiquement aucune de nos données sur la vieillesse n’a de sens. »conclut-il.
GrP1