La réponse ne s’est pas fait attendre, et elle s’est révélée glaciale. Dans une lettre adressée au député macroniste Mathieu Lefèvre, Charles de Courson – le nouveau rapporteur général du budget à l’Assemblée – a renvoyé la majorité sortante à ses objectifs. Il a expliqué qu’il ne lui appartenait pas de se prononcer sur l’éventuelle irrecevabilité d’un projet de loi visant à abroger la réforme des retraites.
En fin de semaine dernière, le camp présidentiel avait pris à partie le député Liot, dans une lettre révélée par « Les Echos ». Mathieu Lefèvre et dix autres parlementaires macronistes ont demandé à Charles de Courson sa position sur une potentielle abrogation, défendue par plusieurs groupes d’opposition parlementaire – NFP et RN en tête. Ils l’ont interrogé sur sa volonté de soulever l’« irrecevabilité manifeste » de celle-ci au regard de l’article 40 de la Constitution, qui empêche les parlementaires de créer de nouvelles dépenses pour l’Etat sans contrepartie.
Opposition intacte à la réforme
Alors que les dernières prévisions de déficit du système de retraite sont mauvaises, et que la situation budgétaire globale est préoccupante, la majorité sortante a ainsi mis en évidence, en filigrane, une contradiction potentielle entre la position sur la réforme et la fonction occupée par Charles de Courson – élu rapporteur au titre de l’âge, et grâce aux voix de la gauche, face au candidat macroniste sortant Jean-René Cazeneuve.
Dans sa réponse, révélée dans « Le Monde », le député Liot assume son opposition intacte au report de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans. Héraut improbable de la contestation contre cette réforme, imposée sans vote en recourant à l’article 49.3 de la Constitution, Charles de Courson avait alors échoué, à neuf voix près, à faire adopter une note de censure qui aurait fait échouer le texte et tomber le gouvernement d’Elisabeth Borne.
Cette détermination semble inébranlable. « Ma position sur cette réforme des retraites est très connue, écrit ce vétéran de l’Assemblée. Je pense qu’il faut des mesures incitatives, qui ont d’ailleurs été proposées par le groupe LIOT au Premier ministre de l’époque, pour inciter nos concitoyens à travailler plus longtemps. En revanche, je me suis battu contre l’augmentation de l’âge légal de départ à la retraite, qui constitue une mesure socialement injuste. »
Cela dit, le nouveau rapporteur du Budget conteste aussi l’interprétation de son rôle faite par ses collègues macronistes. Le règlement de l’Assemblée, souligne-t-il dans sa lettre, prévoit que c’est le bureau de l’Assemblée qui examine la recevabilité financière des propositions de loi, puis le président de la commission des Finances qui apprécie l’éventuelle irrecevabilité soulevée. Or, le bureau est dominé par le Nouveau Front populaire même si sa présidente, Yaël Braun-Pivet (Ensemble pour la République) aura aussi son mot à dire. Et la commission des Finances est de nouveau présidée par le député LFI Eric Coquerel. Une manière de dire que la proposition d’abrogation a de bonnes chances d’être examinée par le Parlement.