Michel Barnier est Premier ministre depuis dix jours, et on attend toujours que son gouvernement soit formé. Le délai paraît long, compte tenu des pratiques politiques habituelles. Mais l’équation est complexe. Issu d’un parti qui ne dispose que du 5e groupe parlementaire à l’Assemblée nationale, il ne pourra s’appuyer sur aucune majorité stable. Les forces du centre et de la droite combinées seront insuffisantes pour élaborer un programme de réformes durable. Face au front du refus opposé par la gauche, il devra compter sur l’abstention de l’extrême droite. Une situation peu enviable. D’autant que les dossiers urgents ne manquent pas.
Ce gouvernement risque donc d’être de courte durée, à moins qu’il ne parvienne à rassembler autour de l’idée de compromis. La France est dans une situation difficile. Les crises multiples s’accumulent et génèrent des sentiments de colère. L’hypervolontarisme d’Emmanuel Macron n’a pas réussi à rassembler. Si l’Assemblée nationale – et donc le vote français – a rarement été aussi fragmentée, il faut néanmoins retrouver le sens de l’intérêt commun. Et créer une coalition dans laquelle chaque parti défendrait ses fondamentaux tout en acceptant que les autres affirment les leurs.
Cet art du compromis, qui se construit à partir des désaccords initiaux, est essentiel au fonctionnement démocratique. Il répond aux attentes des électeurs, qui souhaitent au moins autant des actes concrets qu’un avenir plus radieux. Développer ce corpus et rassembler les forces pour le soutenir prend certainement du temps. C’est aussi sous cet angle que sera examinée l’œuvre de Michel Barnier. Saura-t-il libérer l’action politique de la fébrilité des annonces et l’ancrer dans une démarche de long terme ? C’est sans doute dans sa nature. Mais il lui faudra beaucoup d’habileté, de résilience et de chance.
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