Les coups de feu résonnent encore mardi dans certains districts de Goma, une grande ville de l’est de la RDC livrée aux combats entre les forces armées congolaises et les combattants des alliés M23 aux troupes rwandaises, tandis que dans la capitale, Kinshasa de manifestants en colère a attaqué plusieurs embassades, y compris ceux du Rwanda.
Le M23 et les soldats rwandais sont entrés dans la ville de plus d’un million d’habitants dimanche soir et presque autant déplacés, après une progression de la foudre de quelques semaines, lancée après l’échec à la mi-décembre d’une médiation RDC-Rwanda sous l’Aegis de l’Angola.
Il est toujours difficile de dire quelles parties de la ville sont déjà tombées entre les mains du M23 et de l’armée rwandaise. L’armée sud-africaine a également annoncé quatre soldats supplémentaires tués dans la RDC, portant 17 membres de la force régionale d’Afrique australe (SAMIRDC) et de la Mission des Nations Unies (Monusco) décédée ces derniers jours dans les combats contre le M23.
À Kinshasa, des manifestants en colère ont attaqué plusieurs ambassades mardi, dont celles du Rwanda, accusées par les autorités congolaises d’avoir « déclaré la guerre », mais aussi de la France, en Belgique ainsi que aux États-Unis, des pays critiqués pour leur inaction dans la crise actuelle.
Le ministre français des Affaires étrangères Jean-No-Noël Barrot a décrit comme « inadmissible » les attaques visant l’ambassade de France.
– Réunion du Conseil de sécurité –
C’est dans ce contexte particulièrement tendu qu’une nouvelle réunion du Conseil de sécurité des Nations Unies sur la RDC est prévue pour l’après-midi.
Après une précédente réunion dimanche, le gouvernement congolais avait fustigé une déclaration « vague » de l’ONU sans une exigence claire au Rwanda de quitter le sol congolais. Selon l’ONU, plusieurs milliers de soldats rwandais sont présents dans la région.
À Goma, coincé entre le lac Kivu et la frontière avec le Rwanda, plusieurs dizaines de combattants M23 reconnaissables par leurs tenues et leurs équipements, ont été vus monter dans l’une des principales artères.
Le matin, les résidents ont bravé la peur et sont descendus au lac pour tirer l’eau, ont trouvé des journalistes de l’AFP. Les rafales ne sont pas loin. Mais pendant trois jours, la population est restée cloîtrée et il n’y a plus d’eau ni d’électricité. Les installations ont été détruites dans les bombardements.
Plusieurs disent qu’ils ont été jaillis par des miliciens ou des militaires congolais dans un bégaiement: « Ils nous ont tout volé, nos téléphones, même nos chaussures. Nous les avons vues se déshabiller et jeter leurs tenues et leurs armes », explique Jospin Nyolemwaka, qui a fui son quartier .
« Nous commençons à sortir ici, mais il y a eu un pillage hier. Nous avons vu des corps sur la route », a déclaré à l’AFP un résident du Kituku Market District.
– pénurie alimentaire –
Le programme alimentaire mondial des Nations Unies a déclaré qu’il était « préoccupé » mardi par une pénurie alimentaire à Goma après l’interruption de ses activités.
« Selon la durée de la violence, l’approvisionnement alimentaire de la ville pourrait donc être sérieusement entravé. Les prochaines 24 heures seront cruciales parce que les gens commencent à manquer de provisions et devront voir ce qu’ils peuvent trouver pour survivre », selon porte-parole de Pam, Shelley Thakral.
« Un demi-million de personnes de plus ont été ému ce mois-ci », a déclaré le Haut Commissaire des Nations Unies aux réfugiés, Filippo a grandi mardi sur X.
Dans la RDC de l’Est, les ressources naturelles, les conflits et les rébellions riches sont liés depuis plus de trente ans.
Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a alerté le risque de diffusion des virus, notamment Ebola, d’un laboratoire de Goma.
Le président Félix Tshisekedi, qui ne s’est pas encore exprimé depuis le début de la crise, devrait s’adresser à la nation pendant la journée. Le gouvernement congolais a assuré lundi à « éviter le carnage », selon son porte-parole Patrick Muyaya.
Le Conseil de la paix et de la sécurité de l’Union africaine (CPS) tiendra une « session d’urgence » sur cette crise à la mi-journée.
L’avance rapide de M23 à Goma, doublée par une escalade diplomatique entre la RDC et le Rwanda, a également conduit à la convocation par Nairobi d’une réunion mercredi entre le président de la RDC Félix Tshisekedi et son homologue rwandais Paul Kagame.
La présidence sud-africaine a écrit sur X lundi à la fin de la journée que Cyril Ramaphosa et son homologue rwandais Paul Kagame avaient discuté « de l’escalade des combats qui ont conduit à la mort des soldats de la paix ».
« Les deux chefs d’État étaient d’accord avec le besoin urgent d’un cessez-le-feu et de la reprise des pourparlers de paix par toutes les parties au conflit », a indiqué la présidence.
Au moins 17 personnes ont été tuées et 367 blessés lors de ces combats au cours des deux derniers jours, selon les bilans de plusieurs hôpitaux de la ville lundi.
Goma avait été brièvement occupé à la fin de 2012 par le M23, né cette année-là et battu militairement l’année suivante.
Publié le 28 janvier à 13h12