Bien connu dans le monde du football provençal en tant que joueur et éducateur, Nessim Ramdane est décédé lorsqu’il a refusé d’obéir à un de ses clients dans son VTC à Marseille. Ce dernier était en réalité un tueur à gages de 14 ans qui s’apprêtait à commettre un narchomicide.
Le Figaro Marseille
«Quand j’ai appris la nouvelle, j’ai été choqué. Meurtre et Nessim Ramdane ne font pas bon ménage. C’est un victime collatérale. On est loin des clichés du trafiquant de drogue.» Trois jours après le drame, le vice-président de la Ligue méditerranéenne de football, Yacine Khelif, est sous le choc. Dans la nuit de jeudi à vendredi, Nessim Ramdane a été tué par un adolescent de 14 ans dans le quartier Saint-Lazare, à Marseille.
Décrit comme un « footballeur distingué âgé de 36 ans » par le procureur de la République de Marseille, Nicolas Bessone, connu dans plusieurs clubs de la région où il avait été à la fois éducateur et joueur, l’homme était également chef d’une entreprise de BTP et travaillait la nuit comme chauffeur au sein de l’entreprise Bolt « pour subvenir aux besoins de sa famille. »
Le trentenaire avait «ni directement ni à distance aucun lien avec le trafic de drogue, et n’exerçait finalement, ce soir-là, que son métier»a souligné Nicolas Bessone. Il est décédé au volant de sa voiture, en pleine course, touché à l’arrière de la tête par son client, un adolescent de 14 ans. Ce dernier avait eu recours aux services de Nessim Ramdane via l’application Bolt pour se rendre à la cité Félix Pyat de la Belle de Mai, avec un complice. Moyennant 50 000 euros, l’adolescent, armé d’un revolver à la ceinture, a été accusé par un trafiquant de drogue du meurtre d’un concurrent. Mais en chemin, dans la voiture du chauffeur du VTC, l’adolescent et son complice repèrent leur cible et demandent à Nessim Ramdane de les attendre pendant qu’ils mènent à bien leur macabre entreprise. Le chauffeur refuse. Il sera fusillé.
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« Un modèle »
« Nessim est mort parce qu’il a dit non, souffle Elhadi Abdelhak, entraîneur au club de Carnoux-en-Provence dans lequel Nessim Ramdane a joué pendant cinq ans. Je peux le voir faire cela, parce que c’était dans son caractère. Il était droit et intransigeant lorsqu’il pensait défendre quelque chose d’honnête. Un tel homme est un résistant, qui a beaucoup de courage, et les pouvoirs publics devraient lui rendre hommage. Il est très loin du trafic de drogue.
Dans le club de Saint-Zacharie, petit village varois non loin de Marseille qu’il avait rejoint récemment, le père encadrait des jeunes licenciés dont certains étaient d’un âge proche de son assassin. « Nessim était quelqu’un que tout le monde aimait, souligne Hachim Saïd, le président de l’Union sportive zacharienne. Le jour de sa mort, quand on me l’a dit, je me suis mis en colère. Je n’y croyais pas. Puis j’ai couru chez lui. J’ai vu sa famille en larmes. Je me suis assis dans les escaliers et j’ai pleuré. J’ai alors appris que les jeunes qu’il encadrait s’étaient spontanément rendus au stade à la sortie de l’école. Ils m’attendaient… Je n’ai pas réussi à leur dire que leur éducateur était mort d’une balle dans la tête, c’est très dur à entendre quand on a onze ans. »
« Il voulait faire sortir sa famille de Marseille »
Sur les réseaux sociaux, plusieurs clubs par lesquels le trentenaire est passé lui rendent hommage. « Nessim était une personne avec un grand cœur et un joueur hors pair »salue ainsi l’Étoile sportive ditouenne sur Facebook, rappelant « son côté attachant et respectueux. » « Notre tristesse est à la hauteur de l’image de cet homme droit et respectueux dont les valeurs ont toujours forcé l’admiration de ceux qui l’ont connu »insiste le club de football de Carnoux sur Facebook. Des cagnottes en ligne ont également été lancées pour aider sa femme et leurs trois enfants.
« C’est indescriptible, ce qu’on ressent, confie le maire de Saint-Zacharie Jean-Jacques Coulomb. Ce n’est même pas un choc. C’est une catastrophe, une abomination. C’était un homme simple, très gentil, très sociable et très heureux d’avoir éloigné ses enfants de la ville et de ses problèmes pour vivre au village. « Il y a quelques années, un épicier a été tué dans son immeuble, dans le quartier des Chutes Lavies, à Marseille, rapporte Elhadi Abdelhak. Il rêvait de quitter Marseille pour que ses enfants n’y grandissent pas, vu tout ce qui s’y passe. Lui qui a grandi à Marseille, souhaitait un meilleur contexte pour eux.»
« Ces enfants sont adorables, mais ils les voyaient grandir et il avait peur de perdre le contrôle d’eux avec ce qui se passait à Marseille »confirme Anthony Alexian. Le nouveau directeur sportif du club de Six-Fours-les-Plages venait de recruter Nessim Ramdane. C’est aussi lui qui a œuvré à son déménagement à Saint Zacharie, alors qu’il était directeur sportif du club. « Aujourd’hui, le chaos règne à Marseille, et il n’est pas le seul à vouloir partir. D’autres joueurs qui viennent notamment des quartiers marseillais partent parce qu’ils savent comment ça se passe.
« Nessim Ramdane est mort comme il a vécu : courageusement et comme un homme de travail »a résumé Nicolas Bessone au micro de France Bleu. Selon nos informations, ses obsèques devraient avoir lieu ce mardi. Après ses obsèques, l’organisation d’un éventuel hommage du monde du football est prévue, en concertation avec la famille de la victime. Ce week-end, les joueurs de son dernier club, Six-Fours-Les-Plages, affronteront Fos-sur-Mer avec un maillot à l’effigie de leur ancien coéquipier.
