« Questions stupides » : convoqué au tribunal par les avocats de François Ruffin, Bernard Arnault finit par s’agacer
Ce jeudi 28 novembre, Bernard Arnault, le PDG de LVMH, a témoigné au procès de l’ancien patron du renseignement intérieur, Bernard Squarcini, soupçonné d’avoir profité de ses réseaux pour obtenir des informations confidentielles et des privilèges au profit du luxe. groupe. L’homme d’affaires a été convoqué par les avocats de François Ruffin, partie civile dans ce dossier, pour être interrogé sur l’opération de surveillance mise en place entre 2013 et 2016 par Bernard Squarcini et plusieurs autres prestataires du groupe contre le journal Fakir et celui qui est depuis devenu député.
« Ma mise en examen n’a jamais été examinée par les juges d’instruction »
« Je tiens à vous rappeler que je suis ici en tant que témoin, simple témoin, et que ma mise en examen n’a jamais été examinée par les juges d’instruction », a déclaré en préambule le milliardaire qui se présente comme un « ingénieur ».
Dès ses premiers mots, l’homme de 75 ans a fait référence à François Ruffin, partie civile, assis quelques mètres derrière lui. Ce sont ses avocats qui l’ont convoqué pour un interrogatoire sur l’opération de surveillance mise en place entre 2013 et 2016 par Bernard Squarcini et plusieurs autres prestataires de LVMH contre le journal Fakir, au moment du tournage du film « Merci Patron ! « .
« C’est faux de dire que nous étions les champions des licenciements et des délocalisations »
Dans son discours d’ouverture, Bernard Arnault a qualifié son groupe de « premier de la zone euro » qui verse « 8 milliards » d’euros à l’Etat par an et « recrute le plus en France ». « C’est un mensonge de dire que nous étions les champions des licenciements et des délocalisations », estime-t-il. « Je pense que M. Ruffin essaie d’exploiter ce procès pour des raisons personnelles, médiatiques, politiques, voire commerciales, car en même temps il fait la promotion de son dernier film », a-t-il poursuivi, qualifiant cela de « choquant ». Et de citer une « idéologie trotskyste » dont s’est inspiré, selon lui, le député, selon laquelle « quand on veut émerger politiquement, trouve un ennemi très connu et accroche-toi à lui pour progresser ».
Une CJIP de 10 millions d’euros pour éviter les poursuites
Dans cette affaire aux multiples ramifications, Bernard Arnault a été entendu par les juges d’instruction mais il n’a pas été présenté devant le tribunal aux côtés des dix prévenus. LVMH a signé, en 2021, une Convention judiciaire d’intérêt général (CJIP) de 10 millions d’euros pour éviter des poursuites.
A-t-il eu connaissance d’une tentative de chantage visant sa vie privée en 2008, pour laquelle la DCRI (aujourd’hui DGSI) a mobilisé ses agents pour identifier le maître chanteur ? « Absolument pas. »
Concernant la surveillance de François Ruffin et Fakir, lorsque Bernard Squarcini avait rejoint le privé, a-t-il été tenu informé par Pierre Godé, le vice-président du groupe décédé depuis ? « Absolument pas. »
Aux nombreuses questions du tribunal, Bernard Arnault a répété que c’était Pierre Godé, son bras droit, qui gérait la « sécurité » : dans une entreprise de « 220 000 personnes », les choses sont « réparties », Pierre Godé avait « les mêmes pouvoirs ». comme moi » et « une autonomie totale », a-t-il assuré.
« Je serais ravi de l’inviter pour un café, peut-être avec un cornet de frites »
Le patron de LVMH, qui possède notamment Les Échos et Le Parisien, s’est également présenté comme un « partisan de la liberté de la presse », affirmant avoir vu « Merci patron ! » à sa sortie et je l’ai trouvé « assez drôle ». « Je n’ai jamais demandé l’utilisation de barbouzes, je suis totalement contre », a-t-il déclaré, ajoutant : « Je suis personnellement contre l’infiltration ».
Le grand patron n’a donc pas d’antagonisme personnel avec François Ruffin ?, lui a demandé le président. « Non », a répondu Bernard Arnault, il est « très inventif », « je serais ravi de l’inviter à prendre un café, éventuellement avec un cornet de frites (…) ».
Plus tard, Bernard Arnault s’étonne : « est-il là ? » – avant de se retourner. «Bonjour, monsieur Arnault», a salué le député, qui lui a indiqué avoir tenté «à plusieurs reprises» de le rencontrer.
Des « classements » qui « n’ont rien à voir »
Bernard Arnault s’est ensuite tendu lorsque l’avocat de François Ruffin, Me Benjamin Sarfati, l’a interrogé sur des menaces contre le journaliste Tristan Waleckx et des pressions sur un autre, Benoît Duquesne, lors d’un reportage sur lui. Des « classements » qui « n’ont rien à voir là-dedans », estime l’homme d’affaires. « M. Ruffin essaie de m’utiliser pour gagner du terrain politiquement parce qu’il est actuellement au bord de l’effondrement. »
« Êtes-vous d’accord avec M. Ruffin ou va-t-il continuer ses bêtises ? »
« Vous lisez son comportement avec les lunettes qui sont les vôtres, celles de la prospérité commerciale », a répondu Me Sarfati, qui l’a interrogé sur le déménagement de l’usine de Poix-du-Nord (Nord), au cœur du « Merci patron. » « Sur la même période, combien d’emplois ai-je créé ? 190 000 ! Est-ce que ça va pour M. Ruffin ou va-t-il continuer ses bêtises ? », s’est emporté le PDG, laissant tomber les mots « questions stupides ».
« Accepteriez-vous de venir à Poix-du-Nord partager une cocotte de moules-frites avec les salariés ? », a finalement demandé l’avocat. « Commençons par une rencontre à Paris avec M. Ruffin, et nous verrons ce qui se passera ensuite. » En sortant de la salle, le député a dénoncé des « mensonges répétés sous serment ».
Quatre ans de prison avec sursis requis contre Bernard Squarcini
Ce jeudi soir, le parquet a requis quatre ans d’emprisonnement avec sursis et 300 000 euros d’amende à l’encontre de Bernard Squarcini. Dans cette affaire controversée, le procureur a requis contre neuf autres hommes des peines allant de quatre mois à deux ans de prison, accompagnées, selon les cas, d’amendes pouvant aller jusqu’à 100 000 euros.