qu’est-ce que le Nutri-Score des bonbons, que les grandes marques refusent d’afficher ?
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Plus de 90 % des références de confiserie vendues en France par Haribo, Lutti, Carambar ou encore Chupa Chups obtiennent les deux pires notes d’indicateur nutritionnel, D ou E. Consultez notre moteur de recherche.
Une étrange absence. En parcourant le rayon bonbons de votre supermarché cet Halloween, vous aurez du mal à trouver le Nutri-Score. Ce n’est pas un vilain sort lancé par une sorcière dopée au sucre. En réalité, aucune grande marque nationale, comme Haribo, Lutti, Carambar ou Chupa Chups, n’a décidé de faire figurer ces petites lettres colorées sur les emballages de ses bonbons. « Les fabricants refusent d’afficher la réalité de la qualité nutritionnelle de leurs produits car elle n’est pas optimale pour la santé »tacle le créateur du Nutri-Score, Serge Hercberg. Mais il est possible de contourner ce manque de transparence.
Le Nutri-Score, dont l’affichage n’est pas obligatoire en France, est calculé à l’aide d’un algorithme public, créé par des scientifiques. Cette formule complexe prend en compte diverses données nutritionnelles (quantité de sel, sucre, matières grasses, fibres, protéines, etc.) qui doivent figurer sur tout emballage de produits transformés. « Ce tableau incompréhensible et illisible retrouvé au dos des colis »se moque de Serge Hercberg. Le Nutri-Score est une sorte de synthèse digeste de tout cela.
Pour éviter de sortir votre calculatrice au supermarché, le site collaboratif Open Food Facts, en collaboration avec Santé Publique France, permet de connaître le Nutri-Score de presque tous les produits disponibles, en un clic. L’association s’appuie sur plus de 100 000 contributeurs à travers le monde qui ont envoyé des photos de plus de trois millions de produits à sa base de données. Toutes les références à des friandises vendues en France et compilées par le site apparaissent dans le moteur de recherche ci-dessous.
Au rayon confiserie, les marques les plus connues cachent de mauvais classements, dus à des produits à forte teneur en sucre, et parfois en matières grasses. Pas vraiment une surprise sucrée. « C’est purement une consommation de plaisir »explique Pascal Zundel, président des Confisseurs de France, qui représente les entreprises du secteur, des PME aux géants de l’agroalimentaire.
Chez le numéro un de la confiserie Haribo, les Dragibus – les bonbons les plus vendus en France selon l’entreprise – sont classés D. Tout comme les fraises Tagada, les Schtroumpfs, les Crocos et les œufs au plat. Les Zanzigliss, un assortiment de bonbons aromatisés à la réglisse, sont notés E, la pire note du Nutri-Score. Chez Lutti, Bubblizz, Scoubidou et Longfizz sont également classés D. La note descend à E pour Koala et Smoodou. Seuls les Arlequins « sans sucre » s’en sortent mieux avec une note B.
Parmi les bonbons les plus scannés sur Open Food Facts, on retrouve également les sucettes TicTacs, Skittles, Krema Régal’ad et Chupa Chups, toutes classées D. Les têtes brûlées fraise et framboise et Carambar au caramel sont, pour leur part, classés E. sur les 5 697 produits référencés par l’association, plus de 90 % ont un Nutri-Score D ou E. A l’inverse, seulement 0,5 % de ces produits sont classés A et environ 4 % obtiennent la lettre B ou C.
Côté industriel, on assure que le Nutri-Score « ça n’a pas de sens » pour ce type de nourriture. « C’est un système tout à fait approprié pour les aliments qui sont consommés en quantités relativement importantes et qui contribuent de manière significative à l’alimentation, mais c’est une aberration pour la confiserie »assure Pascal Zundel. Il rappelle que le Nutri-Score est basé sur une quantité de 100 grammes, soit bien plus qu’une portion quotidienne de bonbons.
Un argument réfuté par Serge Hercberg. Selon lui, cet indicateur permet d’abord de comparer les produits au sein d’un même rayon. « Il ne s’agit pas d’interdire de manger des sucreries, mais de savoir très vite que certaines sucreries sont un peu moins sucrées que d’autres »explique le professeur de nutrition à l’Université Sorbonne Paris Nord.
« Un Nutri-Score D ou E rappelle simplement aux consommateurs, et notamment aux enfants, que ce sont des produits dont il ne faut pas abuser. »
Serge Hercberg, créateur du Nutri-Scoresur franceinfo
L’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) recommande donc de ne pas consommer plus de 100 g de sucres totaux par jour pour les adultes, 75 g pour les enfants de 8 à 12 ans et 60 g pour les enfants de 4 à 7 ans. . Il faut donc « limiter la consommation » confiserie, selon le guide alimentaire pour tous, publié par le ministère de la Santé (PDF).
De nombreux chercheurs estiment désormais que le Nutri-Score devrait être rendu obligatoire sur tous les emballages pour renforcer son impact, comme en témoigne cet article dans Le monde. « Cela pousserait les fabricants à améliorer un peu leurs formules pour que leurs produits soient moins gras ou moins sucrés »espère Serge Hercberg. Une étude, publiée en mars 2024 dans la revue Revue européenne d’économie agricolemontre en effet que l’affichage de cet indicateur oblige les fabricants à modifier leurs recettes afin d’obtenir un meilleur score pour attirer les consommateurs.
Alors, des lettres colorées apparaîtront-elles bientôt sur tous les paquets de bonbons ? La partie semble loin d’être gagnée. Après des mois d’attente, la France n’a toujours pas mis en œuvre les nouvelles règles du Nutri-Score qui devaient entrer en vigueur le 1er janvier 2024. Plusieurs ministres du gouvernement Barnier ont également affiché leur hostilité à cet indicateur.