Quelle est cette section israélienne top secrète qui serait derrière les explosions de téléavertisseurs et de talkies-walkies ?

Spécialisée dans le renseignement technologique, l’Unité 8200, une section ultra-secrète des services de renseignements israéliens, pourrait être à l’origine de l’explosion des bipeurs et des talkies-walkies du Hezbollah. Ses agents sont liés à de nombreux exploits militaires de l’Etat hébreu.

Souvent comparée à la gigantesque Agence de sécurité nationale américaine (NSA), l’Unité 8200 diffère par sa taille mais rivalise par son efficacité. Cette section ultra-secrète des renseignements israéliens, spécialisée dans les technologies numériques, est soupçonnée d’être à l’origine de la récente explosion des bipeurs et talkies-walkies du Hezbollah au Liban.

Pour l’heure, l’Etat hébreu n’a pas officiellement revendiqué cette attaque, qui a fait au moins 37 morts et près de 3 000 blessés. Mais les experts s’accordent à dire que l’Unité 8200 a les compétences pour organiser une telle opération.

L’agence de presse Reuters cite une « source de sécurité occidentale » selon laquelle l’unité militaire était impliquée dans le côté technique de l’attaque, notamment dans la détermination de la manière d’intégrer une quantité d’explosifs dans le processus de fabrication des dispositifs de transmission commandés par le Hezbollah.

Yossi Kuperwasser, ancien responsable du renseignement militaire et aujourd’hui directeur de recherche au Forum de défense et de sécurité d’Israël, a minimisé les informations rapportées, insistant sur le fait que l’implication de l’Unité 8200 n’avait jamais été confirmée.

Il reconnaît néanmoins que cette formation est au cœur des capacités de défense de l’Etat hébreu et que ses membres, confrontés à des défis « immenses » et « très exigeants », sont parmi les meilleurs et les plus brillants de l’armée israélienne.

Concrètement, ce groupe d’élite développe et exploite des outils de collecte de renseignements. Très secret, il aurait une base dans le désert du Néguev et serait composé de plusieurs milliers de membres, recrutés parmi les étudiants des meilleures écoles technologiques israéliennes.

un immense réseau d’espionnage

Interrogé par Le Parisien, Gérôme Billois, expert en cybersécurité chez Wavestone, explique que l’unité 8200 est chargée de décoder et d’analyser les informations obtenues par le renseignement. En 2010, un article du Monde diplomatique décrivait l’immense réseau d’espionnage déployé par cette formation mythique, capable d’intercepter appels, emails et autres types de communications à travers le monde.

L’unité 8200 aurait des postes d’écoute cachés dans les ambassades israéliennes à l’étranger et dans les territoires palestiniens. Elle serait capable de localiser des navires, de surveiller des câbles sous-marins et de disposer de jets Gulfstream équipés de matériel de surveillance électronique.

Dov Alfon, auteur du livre « Unité 8200 » paru en 2019 et lui-même ancien officier de cette formation secrète, affirme que celle-ci « espionne des millions de personnes dans le monde, des gens qui ne se rendent pas compte que leurs mails sont lus, que leurs messages sont perçus, à des milliers de kilomètres ». Son livre, devenu un best-seller, a même fait l’objet d’une série télévisée avec Patrick Bruel qui doit être diffusée prochainement en France.

En 2010, cette section des services de renseignement israéliens a été soupçonnée d’être responsable de la conception du virus Stuxnet, qui a infecté plusieurs ordinateurs industriels, notamment ceux situés dans des installations nucléaires iraniennes.

La démission de son leader prévue le 7 octobre

Peu de temps après, en 2014, l’Unité 8200 est impliquée dans l’affaire Snowden lorsque l’ancien consultant de l’Agence de sécurité nationale américaine (NSA) accuse ce dernier de lui avoir fourni des informations confidentielles brutes et non censurées, violant ainsi le protocole international.

Le contenu des conversations privées avec les noms des différents interlocuteurs a été évoqué, y compris celles de citoyens américains parlant à des proches en Israël et dans les territoires palestiniens.

Plus récemment, en septembre dernier, cette section d’élite a fait la une des journaux lorsque son chef, le général de brigade Yossi Sariel, a démissionné. Dans sa lettre de démission, il demandait « pardon pour n’avoir pas rempli la mission qui m’avait été assignée », en n’ayant pas empêché l’attaque du 7 octobre menée par le Hamas en Israël.

La télévision publique Kan avait en effet révélé l’existence d’un rapport de l’Unité 8200 daté du 19 septembre, moins de trois semaines avant l’attaque, qui détaillait des entraînements d’unités d’élite du mouvement islamiste palestinien en vue de raids contre des positions militaires et des kibboutzim dans le sud d’Israël.