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Quelle est cette maladie détectée pour la deuxième fois en Nouvelle-Aquitaine ?

jeL’inquiétude grandit dans la filière tomate. Le virus du fruit rugueux brun de la tomate, appelé « ToBRFV », a fait une nouvelle apparition au printemps dernier en Nouvelle-Aquitaine. Un foyer a été détecté chez un adhérent de la coopérative de Rougeline, dans le Lot-et-Garonne. Le département avait déjà connu un cas au lycée agricole de Sainte-Livrade, près de Villeneuve-sur-Lot, en 2021, le premier authentifié dans la région. La virulence de cette maladie inquiète les semenciers, pépiniéristes, producteurs et chercheurs, comme Éric Verdin, spécialiste du diagnostic et de la caractérisation des maladies virales émergentes au sein de l’unité de phytopathologie de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE) à Avignon.


Éric Verdin est chercheur à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE).

Inrae

D’où vient ce virus et quelle est la situation en France ?

Le ToBRFV a été identifié pour la première fois en Jordanie et en Israël en 2013 et 2014. En Europe, il est apparu pour la première fois en Allemagne en 2018. Il a ensuite été retrouvé dans plusieurs pays, dont l’Espagne, l’Italie, les Pays-Bas, où il est endémique… En France, depuis le premier cas en Bretagne en 2020, plusieurs foyers ont été identifiés en Pays de la Loire, en Nouvelle-Aquitaine et en Provence-Alpes-Côte d’Azur. Mais sa progression reste limitée.

Il s’agit d’un nouveau virus, mais il appartient à une famille que l’on connaît très bien et depuis longtemps, les tobamovirus. Ils étaient bien contrôlés depuis les années 1970 et 1980 grâce à des programmes de sélection de tomates résistantes. Or, le ToBRFV infecte ces variétés et a aplati la sélection qui s’effectuait depuis plusieurs décennies.

L’émoi est alors général. La menace oblige les semenciers et les pépiniéristes à redoubler de vigilance à l’égard des semences. Malgré les passeports phytosanitaires qui garantissent que les produits sont exempts de virus, certains lots contaminés peuvent traverser les frontières et arriver dans les serres.

Comment se propage-t-il naturellement ?

C’est un virus extrêmement stable qui peut survivre sur des milieux inertes, en dehors d’une plante, sans se multiplier, pendant de très longues périodes. Le virus pénètre dans la plante par une micro-blessure. En serre, un simple contact suffit pour que le virus se propage par une simple manipulation, un outil de taille, etc. C’est ce qui le rend dangereux.

Une fois dans la plante, le virus infecte toute la plante jusqu’au fruit et peut contaminer la serre, l’eau et le milieu sauvage. Dans l’environnement, il peut s’établir dans des plantes réservoirs, comme la morelle noire, qui peuvent à leur tour contaminer les cultures.

Comment cela se manifeste-t-il ?

Les premiers signes s’expriment sur les feuilles par des mosaïques ou des marbrures, une chlorose voire une nécrose sur les pédoncules. Mais ces manifestations varient selon les variétés. Dans un deuxième temps, des décolorations sur les fruits vont apparaître jusqu’à cet aspect rugueux et brun qui donne le nom au virus et qui rend le produit invendable. C’est un processus difficile à repérer. Et une fois qu’une plante est infectée, elle ne peut pas être traitée. C’est pourquoi il faut être très vigilant dès le départ.

Est-ce que cela représente un danger pour les humains ?

Aucun des virus végétaux n’est dangereux pour la santé humaine.

Comme les plantes ne peuvent pas être guéries, des mesures drastiques sont prises pour empêcher leur prolifération…

En cas de détection d’un foyer, les mesures sont contraignantes pour le producteur, oui. Les plantes sont arrachées et un vide sanitaire est réalisé, nettoyage strict des structures, supports de plantes, etc.

Une méthode de culture, biologique ou conventionnelle, en plein champ ou hors sol, est-elle plus vulnérable qu’une autre ?

Si le ToBRFV infecte tous les types de cultures de tomates, la gestion des cultures peut avoir un impact sur la survenue d’épidémies. En plein champ, les tomates destinées à la conservation ou aux sauces ne sont pas tuteurées et moins manipulées, ce qui limite la propagation du virus. Pour les tomates de table cultivées en pleine terre, des débris porteurs du virus peuvent persister dans le sol et augmenter le risque d’infection pour la plantation suivante. À l’inverse, dans les serres hors-sol, des mesures de remplacement et de désinfection des pains de culture peuvent réduire le risque.

À plus grande échelle, comment pouvons-nous lutter ?

Le principal moyen de lutter contre les virus reste l’utilisation de variétés porteuses de résistance. Certaines prometteuses commencent à arriver sur le marché. On peut espérer qu’elles permettront de limiter la progression. Mais comme on l’a vu avec le Covid, les virus sont des agents qui mutent facilement et évoluent très vite. Le même processus existe chez les virus des plantes. Il est crucial d’avoir des variétés résistantes de manière durable, qui ne soient pas facilement contournées par des variants.

N’existe-t-il pas des virucides ?

Il n’existe pas de molécule de ce type suffisamment efficace. Leur utilisation poserait des questions sur leur impact sur la santé humaine et leur diffusion dans l’environnement, comme pour les antibiotiques. Il existe une autre piste de contrôle, la prémunition, qui s’apparente à la vaccination.

Ray Richard

Head of technical department in some websites, I have been in the field of electronic journalism for 12 years and I am interested in travel, trips and discovering the world of technology.

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