Gage de confiance pour les investisseurs, la note souveraine de la France a été dégradée par l’agence S&P ce vendredi. Une mauvaise nouvelle dont l’impact économique à court terme devrait toutefois être limité.
Pour la première fois depuis 2013, l’agence de notation S&P (Standard & Poor’s) a abaissé la note de crédit de la France de « AA » à « AA- ». Sachant que ce score évalue la capacité d’un pays à rembourser ses dettes et constitue un gage de confiance, ou non, pour les investisseurs, faut-il s’attendre à des conséquences économiques pour la France ?
Le principal risque est un mouvement de défiance des investisseurs et une augmentation du poids de la dette. Mais, interrogé par l’AFP, l’économiste Sylvain Bersinger affirme que « les expériences passées (…) montrent que cela n’a pas vraiment de répercussions », notamment parce que la note souveraine de la France, bien que dégradée, reste bonne.
Selon les critères de l’agence S&P, un double A, même suivi d’un signe moins, indique une « très forte » capacité française à honorer les échéances de sa dette. A titre de comparaison, la meilleure note, symbole d’excellente gestion, est AAA tandis que la pire, signe de non-paiement, est C ou D.
« Pour l’instant la dette française est encore recherchée, c’est une dette qui est encore considérée comme l’une des plus sûres au monde, l’Etat français n’a aucun problème aujourd’hui à se financer », développe Sylvain Bersinger.
D’un point de vue politique, l’impact sera probablement plus mesurable. Le gouvernement pourrait en effet utiliser cette dégradation de la note souveraine du pays pour justifier de futures vagues de coupes budgétaires dans le cadre du budget 2025. Le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, a également rappelé que son objectif est de « revenir sous la barre des 3% de déficit en 2027 » mais, dans l’ensemble, il s’est montré rassurant.
La note de la France « a changé parce que notre niveau d’endettement a augmenté », a-t-il déclaré dans une vidéo publiée sur l’économie française face à la crise du Covid et face à la crise de l’inflation, a-t-il ajouté.
La France « au milieu de tableau »
La dégradation de la note des Français « ne changera rien à votre vie », a également assuré le ministre en s’adressant directement aux Français. Tout simplement parce que cela ne changera rien à notre stratégie de redressement des finances publiques (…) Nous avons engagé 20 milliards d’euros d’économies sur les dépenses de l’Etat en 2024 (…) Nous avons commencé à débloquer des mesures exceptionnelles de protection contre l’inflation et contre Covid. Nous continuerons exactement sur le même chemin.
Pour les groupes d’opposition en revanche, la décision de S&P illustre la gestion budgétaire « catastrophique » du gouvernement d’Emmanuel Macron, selon les termes utilisés par Marine Le Pen, cheffe des adjoints du Rassemblement national.
A l’international, la France se situe « un peu au milieu du tableau » parmi les pays développés avec ce nouveau classement, selon Sylvain Bersinger. Elle est moins bien notée par S&P que l’Allemagne (AAA) ou l’Autriche (AA+), mais fait mieux que l’Espagne (A) ou l’Italie (BBB). A noter que la France est mieux notée par l’agence Moody’s, qui lui attribue un « Aa2 », équivalent à un « AA » pour S&P.
Ce dernier a justifié sa décision d’abaisser la note de la France en arguant que « la dette publique française en proportion du PIB augmenterait en raison de déficits plus importants que prévu sur la période 2023-2027 ». S&P juge également peu probable que le déficit français soit ramené en dessous de 3% du PIB en 2027 comme le prévoit Bruno Le Maire : il table plutôt sur 3,5% à cette date. L’agence a accompagné sa notation d’une perspective « stable » qui indique qu’elle n’envisage pas de la modifier à moyen terme.
L’agence Fitch avait déjà dégradé la note française de « AA » à « AA- » fin avril 2023. A l’époque, ses analystes invoquaient « des déficits budgétaires importants et des progrès modestes » pour justifier leur décision. Cet épisode et celui de vendredi sont désagréables, mais leur impact est moindre que celui de la perte du triple A français, infligée par S&P et Moody’s en 2012, puis par Fitch en 2013.