quel impact pour la France ?
L’agence de notation S&P a annoncé vendredi soir qu’elle abaissait la note souveraine de la France de « AA » à « AA- ». Il s’agit du premier abaissement de la note française depuis 2013 par S&P. L’agence américaine accompagne cette note d’une perspective « stable », indiquant qu’elle n’envisage aucune modification à moyen terme.
Ce score évalue la capacité d’un pays à rembourser ses dettes. Une bonne notation élimine toute perspective de défaut de paiement : c’est un gage de confiance pour les investisseurs. La meilleure notation symbolisant une excellente gestion est AAA, la pire est C ou D (défaut de paiement) selon les agences : S&P, Moody’s et Fitch pour les principales.
Pourquoi une telle décision ?
Pour justifier sa décision, S&P explique que « la dette publique française en proportion du PIB va augmenter en raison de déficits plus importants que prévu sur 2023-2027 », une vision plus sombre que lors de sa précédente analyse, en décembre.
L’agence ne croit pas non plus que le déficit sera ramené en dessous de 3% du PIB en 2027, comme le prévoit le gouvernement (2,9%), et table même sur 3,5% à cette date.
Le risque de dégradation de la note souveraine se profile depuis plusieurs trimestres, le précédent « AA » s’accompagnant d’une « perspective négative » depuis décembre 2022.
La note de la France « a changé parce que notre niveau d’endettement a augmenté », a déclaré samedi Bruno Le Maire dans une vidéo sur ce qui a permis de « sauver l’économie française face à la crise du Covid et à la crise de l’inflation ».
Quelles conséquences ?
Le risque inhérent à une dégradation est un mouvement de défiance des investisseurs et un alourdissement du poids de la dette. Mais avec un double A même suivi d’un signe moins, la capacité de la France à honorer les échéances de sa dette reste « très forte » selon les critères de l’agence de notation.
« Les expériences passées (…) montrent que cela n’a pas vraiment de répercussions », analyse Sylvain Bersinger, économiste à Asterès. « Pour l’instant la dette française est encore recherchée, c’est une dette qui est toujours considérée comme l’une des plus sûres au monde, l’Etat français n’a aucun problème aujourd’hui à se financer », poursuit-il.
Vers davantage de réformes budgétaires ?
Sur le plan politique, la dégradation de la note pourrait venir s’ajouter aux arguments du gouvernement pour justifier de futures rafales d’économies budgétaires dans le cadre du budget 2025, l’ayant répété vendredi soir à l’Assemblée nationale. Parisien l’objectif de « revenir sous la barre des 3 % de déficit en 2027 ».
La dégradation de la note de la France « confirme la nécessité de réduire notre déficit », ajoute le rapporteur général du budget Jean-René Cazeneuve (Renaissance).
Les oppositions ont dénoncé la gestion budgétaire « catastrophique » du gouvernement, selon les mots de la cheffe des députés RN Marine Le Pen. Le président insoumis de la commission des Finances de l’Assemblée nationale, Eric Coquerel, s’est dit sûr que le gouvernement « utiliserait cette décision pour justifier de nouvelles coupes budgétaires ».
Existe-t-il des précédents ?
Le passage de « AA » à « AA- » a un air de déjà-vu pour le gouvernement français : c’est ce que lui a fait vivre l’agence Fitch fin avril 2023. Ses analystes parlaient alors de « déficits budgétaires importants et de progrès modestes ». » concernant leur réduction.
Certes désagréable, l’épisode de vendredi est moins marquant que la perte de la note triple A de la France – S&P et Moody’s ont privé Paris de ce sésame en 2012, Fitch en 2013.
Parmi les trois grandes agences de notation, Moody’s est désormais la plus flatteuse à l’égard de la France, en lui attribuant la note « Aa2 », l’équivalent d’un « AA » pour S&P.
Où en est la France ?
La France est « un peu au milieu du tableau » parmi les pays développés, résume M. Bersinger.
Parmi les grands pays européens, la France est moins bien notée par S&P que l’Allemagne (triple A) ou même l’Autriche (AA+). Elle reste cependant mieux placée que l’Espagne (simple A) ou l’Italie (triple B).
Quel que soit leur profil, tous les pays européens sont confrontés depuis 2022 à une forte hausse des taux d’intérêt, qui alourdit le coût de leur dette.