Dans un avis rendu lundi 1er juillet, la Cour suprême des États-Unis a décidé de prolonger l’immunité pénale du président. Une bonne nouvelle pour Donald Trump, qui a été la cible de plusieurs enquêtes fédérales et a été condamné pour des accusations criminelles.
Dominée par des juges conservateurs, la Cour suprême des États-Unis vient de porter un coup sévère à l’enquête fédérale sur l’assaut du Capitole du 6 janvier 2021. Lundi 1er juillet, elle a prolongé l’immunité pénale du président, ce qui constitue une victoire pour Donald Trump, qui voit la menace d’un procès fédéral s’éloigner une nouvelle fois.
À une majorité de six juges conservateurs contre trois, contre des progressistes, la plus haute juridiction des États-Unis a estimé que « le président ne bénéficie d’aucune immunité pour ses actes non officiels » mais qu’il « a droit au moins à une présomption d’immunité pour ses actes officiels ».
« Nous concluons que, dans le cadre de notre structure constitutionnelle de séparation des pouvoirs, la nature du pouvoir présidentiel exige qu’un ancien président bénéficie d’une certaine immunité contre les poursuites pénales pour les actes officiels commis pendant son mandat. Au moins en ce qui concerne l’exercice par le président de ses pouvoirs constitutionnels fondamentaux, cette immunité doit être absolue », a écrit le juge en chef John Roberts. Il a ajouté que « le président ne bénéficie d’aucune immunité pour ses actes non officiels, et tout ce qu’il fait n’est pas non officiel ».
La Cour suprême renvoie donc l’affaire au tribunal de première instance, qui doit désormais déterminer quels actes sont potentiellement à l’abri de poursuites pénales, selon qu’ils sont considérés comme « officiels », c’est-à-dire relevant de la fonction présidentielle elle-même, ou non. Cela devrait bloquer l’affaire pendant de nombreux mois encore.
Cette décision est une victoire pour Donald Trump, notamment dans le dossier qui l’accuse d’ingérence dans l’élection de 2020, car elle garantit presque à coup sûr qu’il ne sera pas jugé à Washington avant l’élection présidentielle de novembre. Or, la stratégie juridique du républicain repose depuis des mois sur le report des poursuites contre lui après l’élection.
Donald Trump peut également espérer un impact favorable de cette décision dans les autres enquêtes ouvertes contre lui, notamment celle menée en Géorgie concernant les pressions exercées, fin 2020, sur des responsables de cet Etat pour modifier le résultat de l’élection. S’il accède de nouveau à la Maison Blanche, il pourrait même être en mesure d’ordonner la cessation des poursuites fédérales à son encontre. Dans ce contexte, le républicain a salué la décision de la Haute Cour sur la vérité sociale, saluant une « grande victoire pour notre Constitution et notre démocratie ».
« Aucun homme n’est au-dessus de la loi »
Selon CNN, son équipe juridique espère utiliser les conclusions de la Cour suprême pour contester le cas du procureur spécial Jack Smith, qui enquête sur plusieurs affaires contre l’ancien président.
Parmi les questions soumises au tribunal de première instance figure par exemple la pression exercée par Donald Trump sur le vice-président de l’époque, Mike Pence, et sur le ministère de la Justice pour qu’ils annulent les résultats de l’élection présidentielle de 2020. Sur ce point, le camp Trump espère faire valoir que les interactions du républicain avec ces responsables étaient des actes « officiels », effectués dans le cadre de ses fonctions de président.
Il faut également analyser en profondeur divers messages postés par Donald Trump sur Twitter à l’époque, tout comme son discours à ses partisans peu avant l’émeute du Capitole.
Sachant que l’ancien président a été reconnu coupable le 30 mai par la justice new-yorkaise de « faux comptable aggravé pour dissimuler une conspiration visant à pervertir l’élection de 2016 », ses avocats, souhaitant profiter de la décision de la Cour suprême, ont immédiatement écrit au juge lundi pour reporter le prononcé de la peine, attendu le 11 juillet.
La peine de Trump pourrait être retardée
Mardi 2 juillet, au lendemain de la publication de l’avis de la Cour suprême, le parquet de Manhattan s’est dit ouvert à un tel report. Si le juge Juan Merchan décide de reporter la date du prononcé de la peine, cela signifie que celle-ci tombera très probablement après la convention républicaine, prévue du 15 au 18 juillet à Milwaukee, où Donald Trump doit prêter serment comme candidat à la présidence.
« Bien que nous estimions que les arguments de l’accusé ne sont pas fondés, nous ne nous opposons pas à sa demande » de faire appel et à un « ajournement du prononcé de la peine », a écrit le parquet. Il a cependant demandé un délai au 24 juillet pour pouvoir déposer ses contre-arguments à l’appel de la défense.
Parmi les juges de la Cour suprême qui ont voté contre l’extension de l’immunité présidentielle, Sonia Sotomayor a exprimé son inquiétude face à une décision qui, selon elle, « se moque du principe fondamental de notre Constitution et de notre système de gouvernement, selon lequel aucun homme n’est au-dessus de la loi ».
« Ironie du sort, n’est-ce pas ? L’homme chargé de faire respecter les lois peut désormais les enfreindre. Lorsqu’il utilisera ses pouvoirs officiels de quelque manière que ce soit, a estimé la majorité, il sera désormais à l’abri de poursuites pénales », a-t-elle écrit. « Ordonne-t-il à la Navy Seal Team 6 d’assassiner un rival politique ? Immunisé. Organise-t-il un coup d’État militaire pour conserver le pouvoir ? Immunisé. Accepte-t-il un pot-de-vin en échange d’une grâce ? Immunisé. Immunisé, immunisé, immunisé. »
Lundi soir, le président Joe Biden a également réagi en déclarant que la Cour suprême avait rendu un « terrible mauvais service » au peuple américain. Il a ajouté que les électeurs méritaient de connaître l’issue de l’affaire avant de se rendre aux urnes, pour « décider si l’attaque de Trump contre notre démocratie le 6 janvier le rend inapte à occuper une fonction publique ».