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Que sait-on de ce cortège musulman qui a défilé à Paris ? – Libération

Les images d’une procession chiite qui a eu lieu dans les rues de Paris ont suscité de vives réactions. Il s’agit de la deuxième édition d’un événement qui s’est déjà tenu l’année précédente.

Dans plusieurs vidéos de cet événement, publiées sur les réseaux sociaux, on peut voir des hommes, des femmes et des enfants habillés entièrement en noir. Les femmes portent le hijab ou le niqab, et marchent entre elles à l’arrière du cortège. Les hommes, quant à eux, se frappent la poitrine en chantant et représentent la grande majorité des personnes qui défilent.

Ces images, relayées notamment sur X, ont provoqué de vives réactions. Noëlle Lenoir, ancienne ministre des Affaires européennes du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin et ancienne membre du Conseil constitutionnel, a même qualifié l’événement de «défilé des amis fondamentalistes du NFP».

Que sait-on de cette manifestation ? Il s’agit d’une procession pour l’Achoura, un événement célébré par les musulmans, organisée par une association religieuse chiite, l’Imamia Shah-e-Najaf, qui représente les membres de la diaspora pakistanaise. Sur YouTube, une vidéo en direct retrace la quasi-totalité de la manifestation, qui s’est déroulée samedi 13 juillet entre Bastille et Nation à Paris.

« C’est un deuil, c’est pour ça qu’ils sont habillés en noir »

Le mouvement chiite, minoritaire au Pakistan, est la religion officielle en Iran. Si pour les sunnites, l’Achoura est une fête, pour les chiites c’est une « quelque chose de complètement différent » explique Sabrina Mervin, directrice de recherche au CNRS et spécialiste de ce courant de l’islam. Elle explique que « Pour les chiites, c’est la commémoration du martyre de leur troisième imam qui s’appelait Hussein », mort dans une bataille à Karbala en Irak. « C’est un événement très important dans la doctrine chiite. Et c’est un deuil, c’est pourquoi ils sont habillés en noir », elle continue.

Sabrina Mervin explique également que brandir des drapeaux noirs et se frapper la poitrine correspondent exactement « à une expression de deuil. » Selon le chercheur, cette façon d’exprimer le deuil est «une pratique anti-islamique » que l’on retrouve au Moyen-Orient dans des représentations bien antérieures au début de l’Islam.

Sur les images prises lors du défilé de 2024, de nombreux drapeaux et banderoles sont visibles où il est possible de lire des slogans en ourdou, la langue officielle du Pakistan. Sur certaines banderoles, on peut lire « Ô Hussein, lumière de mes yeux » ou « Que la paix soit sur toi, Abu Abdullah, que l’humanité s’éveille. » Près d’une heure et quarante minutes après le début de la manifestation, on peut voir sur la vidéo en direct du cortège deux drapeaux tricolores français agités parmi les autres. L’association précise avoir réuni, pour l’édition 2024, « environ 500 fidèles ».

Car ce n’est pas la première fois que l’Achoura est célébrée publiquement à Paris. Vérifiez les nouvelles, Imamia Shah-e-Najaf, l’association pakistanaise qui a organisé l’événement, affirme que c’est «la deuxième fois » qu’un tel événement ait lieu dans les rues de la capitale. D’après les images de cette première édition, le cortège a eu lieu le 23 juillet 2023 entre Bastille et place de la République et semble avoir rassemblé le même nombre de personnes que cette année.

« Rien à voir avec la politique »

Les processions de l’Achoura ont lieu dans tous les pays qui comptent des communautés chiites,même s’ils sont minoritaires » explique Sabrina Mervin. C’est le cas en Iran, au Liban, en Irak, à Oman mais aussi aux États-Unis, en Australie et au Royaume-Uni.

Sur X, l’association Femme Azadi, relais français du mouvement de contestation iranien « Femmes, Vie, Liberté » critique le cortège parisien. Pour les représentants iraniens de l’association, «Voir des défilés comme celui-ci en Europe nous glace le sang… En Iran, seuls les partisans des ayatollahs et de la République islamique défilent » Sabrina Mervin confirme qu’il y a « des défilés quasi-officiels en Iran organisés par des groupes proches de l’État. » Mais il souligne que tous les chiites ne se reconnaissent pas forcément dans ces rituels et que certains « célébrer différemment. » Armin Arefi, journaliste principal à Indiquer et spécialiste de l’Iran, par exemple, ils ont partagé des images de la procession de l’Achoura à Téhéran, où de jeunes femmes non voilées participent à la procession.

A Vérifiez les actualitésl’Imamia Shah-e-Najaf déclare qu’elle n’a pas « rien à voir avec la politique » Et « être une association réservée uniquement aux Pakistanais. » La même association mentionne cependant avoir refusé de faire partie du collectif chiite de France, dont la charte précise que« L’influence étrangère n’a pas sa place dans notre culte. » L’Imamia Shah-e-Najaf fait en revanche partie de la Fédération française des musulmans chiites, dont la charte mentionne son attachement à la devise républicaine mais n’aborde pas la question de ses liens avec d’autres pays.

Contactés, ni le bureau central des cultes du ministère de l’Intérieur ni la préfecture de police de Paris n’ont souhaité répondre à nos questions.

Eleon Lass

Eleanor - 28 years I have 5 years experience in journalism, and I care about news, celebrity news, technical news, as well as fashion, and was published in many international electronic magazines, and I live in Paris - France, and you can write to me: eleanor@newstoday.fr
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