Que reste-t-il de Gaza, ravagée par un an de bombardements israéliens ? – Libération
Que reste-t-il de Gaza après un an de bombardements israéliens ? Au-delà du bilan humain qui se compte en dizaines de milliers (42 000 selon le ministère de la Santé dirigé par le Hamas), l’enclave a été en grande partie rasée, conduisant les institutions internationales ou les médias à mobiliser les concepts d’« urbicide », ou de « domicide ». pour décrire la destruction massive de bâtiments dans l’enclave. Ces ravages, depuis un an, sont rapportés par de nombreuses images, comme celles filmées par un convoi de l’ONU au nord de la ville de Gaza le 17 août, ou encore cette prise de vue par drone prise dans la même zone, diffusée par le photographe Abdallah El Hajj en octobre. 4. Des séquences qui révèlent un paysage apocalypse. Mais ils ne suffisent pas à rendre compte de l’ampleur globale.
Aujourd’hui dans le nord #Gazamaison après maison aplatie.
J’étais à côté d’un jeune garçon lorsqu’une grève siffla au-dessus de nous. Il se fige, les yeux grands ouverts. Il a frappé à proximité et il est resté là, paralysé par la peur.
Que reste-t-il aux enfants ici ? Déplacement constant, parmi une horreur constante et inimaginable. pic.twitter.com/bQvS4uLfOv
– Louise Wateridge (@UNWateridge) 17 août 2024
63% des bâtiments détruits, totalement ou partiellement, ou éventuellement endommagés
Depuis le 10 octobre 2023, Unosat, le centre satellite des Nations Unies, documente régulièrement le sujet. Fin septembre, ce dernier a rendu public son neuvième « Évaluation globale des dégâts causés à la bande de Gaza ». Sur la base des dernières images collectées le 6 septembre 2024, il apparaît que 52 564 bâtiments étaient «détruit« , 18 913 bâtiments ont été « gravement endommagé», 56 710 étaient «modérément endommagé» , et 35 591 «peut-être endommagé« . Soit un total, en additionnant ces quatre catégories, de 163.778 bâtiments, représentant 66% du total des bâtiments de la bande de Gaza. Ce pourcentage total était de 63% en juillet, 55% en mai, 35% en mars, 30% en janvier.
La répartition des dégâts visible sur la carte, bien qu’affectant l’ensemble de l’enclave, chevauche plus ou moins la densité de population de Gaza, comme le montre ce diagramme de CNN.
Dans sa méthodologie transmise à VérifierActualitésUnosat explique la catégorisation comme « détruit » un bâtiment lorsque la totalité ou la majeure partie de la structure est visiblement effondrée sur des images prises depuis l’espace. « Gravement endommagé» concerne les bâtiments dont au moins une partie de la toiture ou des murs s’est effondrée, lorsque la catégorie «modérément endommagé» comprend les bâtiments dont la destruction visible est partielle, souvent adjacente à des destructions plus importantes. La catégorie «peut-être endommagé» contient des bâtiments sans dégâts visibles sur les images satellites, mais où des débris et des traces de poids lourds sont observés à leur proximité directe.
Ce travail d’interprétation visuelle est réalisé par les équipes de l’ONU en comparant des images satellites de différentes dates, là où d’autres organisations utilisent plutôt des algorithmes ou l’intelligence artificielle. « Une méthode plus longue à mettre en œuvre mais plus précise que ce que l’IA peut produire dans ce contexte urbain… pour le moment », ajoute Unosat à VérifiezActualités.
Un niveau de destruction parfois sous-estimé
L’agence précise également dans son document « qu’il s’agit d’une analyse préliminaire qui n’a pas encore été validée sur le terrain ». Si dans certains cas (bâtiments ou quartiers rasés) la destruction est évidente sur l’imagerie satellite, la technique peut avoir ses limites. Le processus, utilisant une vision verticale (souvent très légèrement oblique) avec plus ou moins de précision, donne parfois des faux positifs, et le plus souvent des sous-évaluations. L’étendue des dommages infligés aux bâtiments et aux infrastructures n’est pas nécessairement visible depuis le toit ou l’extérieur d’un bâtiment. Ceci est démontré par certaines zones visiblement sous-répertoriées, où des images authentifiées comparées par VérifierActualités montrent un niveau de destruction bien supérieur à celui enregistré par l’ONU, notamment à Jabalia ou au nord de la ville de Gaza.
Au-delà des chiffres bruts, la nature des infrastructures détruites a également été documentée. L’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) a rapporté le 1er août que les deux tiers des écoles de Gaza, soit plus de 120, avaient été endommagées ou détruites. .
Une autre analyse Unosat (basée également sur des images satellite) dédiée au réseau routier de Gaza a identifié 68% des routes endommagées dans l’enclave sur la base d’images du 18 août. Le Programme des Nations Unies pour l’environnement souligne dans son rapport de juin que les dégâts infligés au réseau électrique du réseau, des centrales électriques aux panneaux solaires, représente une destruction de 61,5% du réseau total de distribution de l’enclave.
Unosat a également constaté que 103 des 150 kilomètres carrés de terres agricoles de l’enclave (ce qui représente au total 41 % de sa superficie) ont été endommagés. Une quantification réalisée à l’aide du NDVI (indice de végétation par différence normalisé, ou indice de végétation par différence normalisé), un indicateur de référence dans le secteur de l’imagerie satellitaire qui permet d’observer l’évolution de la santé des plantes. Selon des images du 26 septembre 2024, comparées par Unosat à la moyenne des sept dernières années sur la même période, environ 68 % des champs de cultures permanentes dans la bande de Gaza présentaient un déclin sanitaire significatif. et la densité (à partir de cet indice NDVI). Une analyse qui, là encore, reste à confirmer sur le terrain.
La destruction visualisée par ses débris
Enfin, les services de l’ONU ont proposé un dernier indicateur, modélisant la quantité de débris dans l’enclave liés au conflit. Dans une infographie publiée en août, Bloomberg, reprenant le travail de l’ONU, évoquait 42 millions de tonnes de décombres depuis Rafah, au sud, jusqu’à Beit Hanoun, au nord.
Le Programme des Nations Unies pour l’environnement a publié en juin un rapport préliminaire sur le sujet. Cet indicateur, construit à partir des données Unosat sur les destructions, permet de représenter différemment le niveau de destruction, mais aussi ses conséquences dans le temps. Ainsi, selon le document de l’ONU, le seul nettoyage des décombres pourrait prendre entre huit et douze ans.
Contacté par VérifiezActualités, le Programme des Nations Unies pour l’Environnement explique que cette approche vise à fournir des informations sur la gestion future des débris, et à planifier la reconstruction. Un horizon qui ressemble pour le moment à un mirage tant il semble lointain et hypothétique. Les bombardements sur Gaza n’ont pas cessé. Ce week-end, une nouvelle école a été prise pour cible par l’armée israélienne au centre de l’enclave. C’est le sixième depuis début septembre. Dimanche, Tsahal a ordonné à tous les Gazaouis présents dans le nord de l’enclave d’évacuer « immédiatement » vers le sud, annonçant de nouvelles opérations à grande échelle dans la zone déjà la plus détruite de Gaza. Aux habitants exsangues d’une ville dévastée, l’armée israélienne a annoncé que la guerre entrait dans une « nouvelle phase ».