Nouvelles

Que penser des performances de Pogacar sur ce Tour de France 2024 ?

Au lendemain de son coup de force, Tadej Pogacar a poussé un peu plus loin Jonas Vingegaard à la veille de la deuxième journée de repos pour se rapprocher d’un troisième titre sur le Tour de France.

Rendez-vous désormais en 2025 ? Déjà bien lancé après le coup de maître de Tadej Pogacar sur les pentes du Pla d’Adet, le suspense pour la victoire finale s’est peut-être définitivement envolé ce dimanche, au terme de la 15e étape du Tour de France. « Ça commence à sentir bon », a même admis le fougueux Slovène de 25 ans, après avoir franchi la ligne aux commandes dans la chaleur du plateau de Beille. Un aveu qui en dit long sur son niveau de confiance, alors qu’il se rapproche plus que jamais d’un doublé Giro-Tour, comme il n’en avait plus réussi depuis Marco Pantani en 1998. Après lui avoir lâché trente-neuf secondes lors du premier gros tronçon pyrénéen, Jonas Vingegaard était cette fois relégué à plus d’une minute de son éternel rival. Il avait pourtant promis une réaction et tenté de relancer le bras de fer.

Le plan était de faire rouler ses hommes tout au long de cette nouvelle journée en enfer, courue à un rythme effréné, avec un total de 197,7km, pas moins de 4.800m de dénivelé positif, des pentes raides à souhait et un final démoniaque comme prévu au Plateau de Beille (15,8km, 7,9%). C’est au pied de ce col non classé que son gardien Matteo Jorgenson a haussé un peu plus le ton pour essorer ce qui restait du groupe de favoris, et tenter de stopper la machine UAE Emirates. A dix kilomètres de l’arrivée, « Vingo », dans son inhabituel maillot blanc à pois rouges, a lui-même activé le mode offensif en plaçant une attaque sur l’orgueil, sans créer le moindre écart. Le porte-bagages danois était si confortable que Pogacar s’y est accroché quelques minutes, prenant le temps de lâcher son guidon pour se rafraîchir, avant d’envoyer un contre éclair à 5,4km du sommet. Rideau, affaire classée.

Visma dit « chapeau bas »

Loin du jeu de poker des premières heures de ce Tour, et des bluffs sur la forme des uns et des autres, Visma-Lease a bike ne peut que s’incliner et capituler aujourd’hui. Avec une sérénité implacable, Pogacar semble intouchable et son dauphin, gravement blessé il y a trois mois au Pays basque, ressemble désormais à un frelon à court de venin, incapable de lui délivrer la piqûre fatale. « Nous sommes venus pour prendre l’étape et gagner un peu de temps mais ce n’était pas le cas. Pogacar était plus fort que Jonas. Chapeau bas, ils ont une belle avance désormais. Il faut l’accepter, être fier de ce que l’on a montré et reconnaître que quelqu’un d’autre est plus fort », s’incline Grischa Niermann, le directeur sportif de Vingegaard.

Le discours se voulait sensiblement identique pour Remco Evenepoel, troisième de l’étape et au classement général, conscient d’évoluer dans une autre ligue que le roi de ce Tour. « C’est clair que Tadej est le meilleur du monde, a résumé le Belge. Jonas n’est pas trop loin mais je pense que Tadej est plus fort que Jonas en ce moment. Et puis il y a moi. Je pense que je suis le meilleur du reste mais le Tour n’est pas encore terminé. Il reste de belles étapes et de grosses étapes très difficiles à passer. » Mauro Gianetti a pour sa part préféré temporiser, le manager de Pogacar évoquant une semaine dernière « terrible ». « Aujourd’hui, c’était une étape difficile, Jonas a montré beaucoup de panache, il a tout tenté. Tadej a pu profiter du travail fourni par Visma, il a su suivre dans le final et est parti quand Jonas a eu une petite faiblesse. On savait que Tadej était en meilleure forme que l’an dernier, il a fait des petits changements dans son entraînement. Jonas a aussi eu un grave accident. » « Ce qu’il fait est déjà exceptionnel. Le Tour est-il gagné ? Non, il reste encore du chemin à parcourir », a insisté le leader suisse.

« Pogacar ne vient pas de nulle part »

En attendant, face à ce genre de performances massives, et dans un sport qui échappe rarement au poids du soupçon, certaines questions ne manquent pas de ressurgir. « Le sport de haut niveau appelle toujours des questions. Mais Pogacar ne vient pas de nulle part. Il marche et obtient des résultats depuis qu’il est jeune. Ce n’est une surprise pour personne. C’est un grand champion. Les grands champions font toujours la différence et sont toujours au-dessus de tout le monde. J’y crois », répond Nicolas Guillé, directeur sportif de Decathlon-AG2R La Mondiale. « Quand je les vois (Pogacar et Vingegaard) passer, je me dis que ça va vite… Je ne sais pas si c’est moi qui suis en dessous d’un niveau que j’ai pu atteindre par le passé ou simplement que le niveau des premiers est encore monté… Je ne vais pas trop en dire mais dans l’ensemble c’est clair qu’il y a quand même un monde d’écart », a déclaré le grimpeur Cofidis Guillaume Martin sur France 2.

Relancé sur le sujet du suspense peut-être balayé à une semaine de la finale à Nice, Nicolas Guillé a précisé : « Tout le monde sait que la troisième semaine est très difficile. On sait que Pogacar est le meilleur de tous. Quand il est bon, on sait qu’il peut faire la différence, même à la fin d’un Giro. L’an dernier, il était en difficulté sur une étape. Une étape suffit… Il a pris son temps, il est avec une grosse équipe. Cela paraît difficile de le détrôner mais il reste humain. Il peut toujours se passer des choses dans la troisième semaine. Hier, Visma a pris une claque. Aujourd’hui, ils ont voulu remettre les compteurs à zéro. Il faut s’attendre à ce qu’ils réagissent. »

Alors que beaucoup le considèrent hors course pour le maillot jaune, en raison à la fois du niveau affiché par l’ogre de Komenda et de sa propre préparation tronquée liée à ses séquelles du printemps, les supporters de Vingegaard rêvent toujours de le voir transfiguré lors d’une troisième semaine théoriquement taillée pour lui, avec notamment l’étape d’Isola vendredi. « Sauf cataclysme, le podium ne devrait pas changer », assure notre consultant Jérôme Coppel, toutefois pas surpris par le feu d’artifice proposé par Pogacar.

« Difficile à comparer »

« Il a eu quatre semaines entre le Giro et le Tour, c’est un blocage qui lui permet de récupérer et de faire le plein d’énergie. Je suis plus surpris par le niveau de Vingegaard, qui n’a eu qu’un mois pour se reconvertir. C’est normal que Pogacar soit au-dessus de lui. Il est plus fort que les deux dernières années, mais l’écart est un peu réduit par la forme physique de Vingegaard. J’aimerais voir un Tour de France avec les deux au sommet », insiste-t-il. Avant de développer sa réflexion sur les éventuels doutes d’une partie du public et des observateurs.

« Il faut se poser des questions. On ne vit pas dans les équipes, on ne sait pas ce qui se passe, mais se poser des questions ne veut pas dire accuser sans preuve ou à tort. Il faut surtout faire dire aux données les bonnes choses et donner l’information la plus complète possible. Quand j’ai entendu samedi que Pogacar avait mis deux minutes pour établir le record de l’ascension (au Pla d’Adet), c’est vrai, mais il faut savoir que 13 coureurs ont battu ce record. Il faut savoir aussi que les vélos sont plus légers de deux kilos qu’avant, que les préparations sont plus spécifiques… C’est difficile de comparer des temps d’ascension entre des étapes qui n’étaient peut-être pas identiques, qui n’étaient peut-être pas courues de la même manière… C’est dans notre nature de comparer. Chacun peut se faire son opinion, on peut ne pas être d’accord, mais faut-il arrêter de croire au vélo ? Je ne pense pas », répond Coppel.

Rodolphe Ryo, au Plateau de Beille (Ariège)

Articles les plus lus

Cammile Bussière

One of the most important things for me as a press writer is the technical news that changes our world day by day, so I write in this area of technology across many sites and I am.
Bouton retour en haut de la page